Retraité, diplômé en sciences économiques, j'ai été enseignant, chercheur en sciences sociales, syndicaliste, mutualiste militant, chef d'entreprise d’économie sociale. Depuis mes études je suis intéressé par l'épistémologie en sciences sociales et la pluridisciplinarité. J'ai créé ce blog pour m'exprimer et échanger avec ceux qui le souhaitent.
Le 24 février prochain marquera le triste anniversaire de la 2e invasion russe de l’Ukraine. Depuis trois ans, le peuple ukrainien résiste héroïquement face à une agression d’une violence inouïe. Malgré les destructions systématiques de ses infrastructures vitales et le coût humain dramatique, l’Ukraine continue de se battre pour sa liberté – et pour la nôtre. Aujourd’hui plus que jamais, c’est l’heure de l’Europe. Face au désengagement américain et au risque d’un nouveau Munich, l‘Union Européenne doit prendre ses responsabilités historiques. Notre continent ne peut plus se contenter de demi-mesures : il doit apporter à l’Ukraine l’aide décisive qui lui permettra de vaincre.
Nous appelons à une mobilisation urgente pour : La confiscation et le transfert à l’Ukraine des 200 milliards d’euros d’avoirs russes gelés en Europe La protection effective du ciel ukrainien par la fourniture massive de systèmes de défense anti-aérienne Le déploiement d’une force européenne pour sécuriser la frontière avec le Bélarus. Le retour impératif des enfants ukrainiens déportés en Russie, condition non négociable de tout accord futur (Signez notre appel)
Pour échanger sur ces enjeux cruciaux et coordonner nos actions, je vous invite à nous rejoindre : – Le 21 février à 18h pour une réunion en ligne sur Zoom « Riposte au nouveau Munich » avec Sylvie Rollet (Présidente de Pour l’Ukraine…) Olivier Védrine, Alexandre Melnik et plusieurs orateurs. Pré-inscrivez-vous. – Le 23 février à 14h à Paris, Place de la République, pour une grande manifestation de soutien. Retrouvons pour défiler avec l’association- Le 24 février pour des rassemblements dans toute la France – Le 27 février 18h à Sc-Po Rennes pour une conférence sur les déportations d’enfants ukrainiens avec Me Gabriel Sebbah et Pierre Raiman
L’Ukraine peut gagner cette guerre avec notre aide. Ne la décevons pas. Ne nous décevons pas.
Bien cordialement, Pierre Raiman cofondateur de Pour l’Ukraine, pour leur liberté et la nôtre !
C’est une communication de l’association « Pour l’Ukraine, pour leur liberté et la nôtre » que je me fais un devoir de publier. Notre solidarité et notre soutien est la seule réponse à la capitulation que veut imposer le nouveau pouvoir des États Unis d’Amérique.
La direction générale des finances publiques (DGFiP) vient de publier une étude sur les revenus et le patrimoine des foyers les plus aisés. Cette étude confirme que les ultra-riches deviennent d’année en année encore plus riches et que les inégalités se creusent.
Étude portant sur les revenus les plus élevés
L’étude porte sur les 40700 foyers fiscaux qui disposent des revenus les plus élevés. En 2022, pour faire partie de ce groupe, il fallait avoir déclaré un revenu annuel d’au moins 463 000 euros. En moyenne ces foyers avaient déclaré un revenu d’un peu plus de 1 million d’euros à comparer aux 32 000 euros gagnés en moyenne par les autres foyers, soit trente fois plus.
L’écart se creuse
Entre 2003 et 2022, le revenu moyen de ce groupe, un dixième du décile supérieur de la population (10 % des revenus les plus élevés), a augmenté de 119% soit plus que doublé. Les neuf dixième suivant du décile supérieur ont vu aussi augmenter leurs revenus de 79%. Pour le reste de la population, neuf foyers sur dix, les revenus n’ont pas augmenté de plus de 39% sur la même période.
L’étude montre que depuis 2003 le revenu des ultra-riches a augmenté de 3% par an hors inflation et celui des autres français a progressé de 0,5%. L’écart se creuse. Même à l’intérieur des foyers aisés cet écart se creuse.
D’où viennent ces revenus ?
Pour le groupe des plus aisés, les traitements et salaires représentent 35,5% du total. Les dividendes et les plus-values tirés des capitaux dont ils sont propriétaires constituent 47% et les bénéfices des entreprises qu’ils détiennent 10,5%. Leur patrimoine foncier n’intervient que pour 3%.
Pour le reste des contribuables les revenus des capitaux mobiliers pèsent très peu (2%). Ce sont les traitements et salaires qui constituent l’essentiel des revenus (63%).
Accroissement des inégalités
Selon les auteurs de l’étude, en 2022, les 10% de ménages les plus aisés reçoivent ensemble 34,1% des revenus de tous les français, contre 32,4% en 2003. C’est l’enrichissement des 10% des foyers les mieux dotés qui explique l’accentuation des inégalités.
Le patrimoine immobilier des foyers les plus aisés a augmenté de 18% entre 2017 et 2022. Ces foyers sont très majoritairement propriétaires de leur habitation principale.
La fiscalité est là pour corriger cette situation. Mais sur les années étudiées, le taux réel d’imposition s’est alourdi pour les 50% les plus pauvres de même que pour les 9,9% les plus aisés. Pour les autres il a au contraire baissé. C’est le cas notamment des 0,1% les plus riches dont le taux moyen a été ramené de 29,3% à 25,7%.
Pour conclure
Que peut-on déduire de cette note du Ministère de l’économie et des finances ?
Les revenus des très riches s’envolent
Il y a enrichissement des riches et appauvrissement des pauvres
Les inégalités se sont creusées en 20 ans
Pour le patrimoine c’est le grand écart entre le « top 0,1% » et les autres
Avec un tel constat, la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, prévue dans le projet de budget, est bien la moindre des choses.
Quand on annonce dans la presse le même jour que 10 millions de français ont des problèmes pour terminer la fin du mois et que les entreprises du CAC 40 distribuent 98 milliards de dividendes au titre de l’exercice 2023, il y a de quoi s’interroger sur le respect de notre devise républicaine qui orne les frontons de nos mairies : Liberté, Égalité, Fraternité.
La réaction du français le plus riche de France qui s’indigne de l’augmentation des impôts sur les sociétés, est pour le moins indécente. Il préfèrerait sans doute que le coût de la crise budgétaire soit supporté par les plus pauvres ?
Comme le dit la directrice générale de l’ONG Oxfam France, dans une tribune dans le journal « Le Monde », la milliardocratie, c’est-à-dire le pouvoir des milliardaires, constitue la menace ultime contre la démocratie.
Il est devenu banal de dire que le monde se transforme à très grande vitesse. Les bouleversements sont multiples à tous les niveaux. Les défis auxquels la planète se trouve confrontée sont d’ordre climatique, économique, politique, et technologique. Les problèmes sont universels et les réponses sont fragmentées. Aucun pays seul ne peut faire face à chacun de ces défis.
Le défi climatique
La biosphère est un vaste système complexe autorégulé et autoreproducteur de régulations interdépendantes, dans la reproduction duquel la vie, et par conséquent l’espèce humaine, joue un rôle primordial. Nous constatons chaque jour que la biodiversité est compromise.
Les effets du changement climatique sont incontestables. Quels que soient les chiffres ou les courbes que l’on regarde, les indicateurs sont tous au rouge. L’année 2024 est la plus chaude jamais enregistrée à l’échelle mondiale depuis le début des relevés.
Le dérèglement climatique est causé par la hausse continue des émissions de gaz à effet de serre liées à la combustion d’énergies fossiles, charbon, pétrole et gaz. Les prévisions publiées par l’Organisation météorologique mondiale confirment qu’il est probable que la température moyenne annuelle du globe franchisse le seuil de 1,5°C de réchauffement, maximum fixé par l’accord de Paris.
La rupture de l’équilibre entre la planète et les humains qui l’habitent fait ressortir notre immense responsabilité mais crée aussi l’opportunité de redéfinir notre rapport à la terre. Force est de constater que ce défi n’est pas considéré comme une priorité au niveau de la planète.
Le défi économique et social
Dans les démocraties les inégalités culminent à des niveaux historiquement élevés. Les disparités de patrimoine sont plus fortes que celles de revenus. Les politiques néolibérales sont devenues culturellement dominantes et ont bouleversé le panorama des inégalités.
La promesse néolibérale de dynamisation de la croissance par la baisse de la fiscalité des plus riches n’a pas marché. La théorie du ruissellement n’a pas généré la prospérité pour tous. Le recul des politiques de redistribution par la fiscalité a eu pour conséquence d’augmenter les écarts de revenus et de patrimoine au bénéfice des plus riches par rapport aux catégories sociales moyennes sans pour autant sortir du marasme les catégories les plus défavorisées.
L’objectif premier de toute société démocratique est d’améliorer le sort de tous. Si les pouvoirs publics continuent de laisser le 1% de la population s’accaparer l’essentiel des richesses et mettre à contribution les classes moyennes et populaires, il laisse se développer une désespérance qui ne peut que nuire à la démocratie. Cette réalité sévit à l’intérieur des pays comme entre les pays. L’écart entre les pays riches et les pays pauvres ne cesse de s’accroitre.
Le défi politique
L’affrontement « monde capitaliste » contre « monde socialiste » disparait progressivement et laisse la place à l’affrontement entre démocraties et autocraties. Les dirigeants chinois et russes ne cachent pas leur mépris du système démocratique qui est faible et incapable d’assumer des risques importants. Ils louent ensemble l’efficacité de leur système autocratique. Une bonne partie des pays émergents semblent de plus en plus se rallier à cette vision.
L’utilisation de l’arme nucléaire est aujourd’hui brandie comme possible. Depuis le début de l’offensive en Ukraine, le Président russe agite la menace nucléaire. Il a averti les pays qui s’opposeraient à son intervention qu’ils s’exposeraient à des conséquences « comme ils n’en ont jamais vu ».
L’Union Européenne doit prendre conscience qu’elle doit d’abord compter sur elle-même pour sa défense devant les orientations futures de la puissance américaine en direction de l’Asie. La guerre en Ukraine aide à cette prise de conscience qu’il n’est plus possible devant ce nouvel ordre du monde, s’il ne l’a jamais été, d’être uniquement dépendant des États-Unis.
Après la crise sanitaire et maintenant la guerre à ses portes qui ont mis en évidence les faiblesses de l’Union Européenne et ses dépendances stratégiques, la souveraineté européenne et son autonomie stratégique sont une priorité incontournable.
Le défi technologique
La confiance aveugle envers les sciences et les techniques est une erreur, la défiance systématique en est une autre. Ce n’est pas la technique qui est en soit bénéfique ou maléfique, mais les usages qu’on choisit d’en faire. Nous devons rester vigilants quant aux possibles dérives, aux possibles mauvais usages des découvertes scientifiques. Aidons le plus grand nombre à comprendre, à avoir accès aux connaissances, pour que chacun ait les moyens d’un jugement approprié.
L’idée que l’humain peut détruire le monde terrestre et ainsi se détruire lui-même émerge et pose le problème des limites de l’activité humaine et de sa responsabilité vis-à-vis de la nature. L’humain est une partie d’un tout qui a la particularité d’être responsable de la conservation de ce tout. Nous devons prendre conscience de nos limites et développer un humanisme différent, un humanisme de la diversité. Plus que jamais l’homme a besoin des principes éthiques des Lumières pour mettre les sciences et les technologies au service de l’humanité et non l’inverse.
Le paradoxe
Nous devons affronter la contradiction entre l’universalité des problèmes et la fragmentation des réponses à apporter. L’envergure mondiale des différents défis auxquels nous sommes confrontés rend nécessaire, même si cela apparait complètement utopique, au moins une concertation de l’ensemble des pays de la planète.
Après l’élection confortable du président des États unis pour un deuxième mandat, la montée des extrêmes droites dans les démocraties, la guerre en Ukraine, le clivage entre les pays du Nord et du sud sur le climat, cette perspective de concertation semble s’éloigner. Nous risquons de voir le chaos s’installer.
La réforme en profondeur du seul embryon de gouvernance mondiale existant aujourd’hui, l’ONU, semble indispensable. Il reste la seule institution légitime malgré ses faiblesses pour établir un véritable dialogue et affronter les problèmes qui se posent au monde dans un cadre universel, démocratique et rénové.
Éviter le chaos
Devant la faible probabilité de voir l’ONU jouer son rôle au niveau de la gouvernance mondiale, deux économistes, Jean Pisani-Ferry et Georges Papaconstentinou dans un livre publié aux éditions du Seuil en fin 2024, « Nouvelles règles du jeu – Comment éviter le chaos planétaire », se sont essayés à faire des propositions pour faire face à ce paradoxe.
Ils examinent neuf champs de coopération internationale : le climat, la santé publique, le numérique, le commerce international, la stabilité financière, les migrations, la concurrence, la règlementation bancaire et la fiscalité. Selon eux, l’analyse permet de montrer ce qui marche et ce qui ne marche pas dans les organisations actuelles de coopération internationales. Tirer les leçons des échecs et des succès des différents mode de gouvernance leur permet d’aboutir à des prescriptions sur la façon d’organiser la coopération dans un monde non coopératif. Le monde a changé, il faut en tenir compte et adopter de nouvelles règles si l’on veut éviter le chaos. Ces nouvelles règles du jeu n’éviteront pas de laisser plus de place aux pays émergents et aux pays du sud, parties prenantes indispensables à la gestion des biens communs mondiaux.
La paix par la force
Ces propositions ont au moins l’intérêt de vouloir faire face à nos défis par la concertation entre les pays et l’engagement volontaire de chacun. Mais l’arrivée du nouveau président des États-Unis ne manque pas d’interroger. La politique annoncée de ce dernier ne semble pas laisser beaucoup de place à la concertation. La vision « América first » relève plus du racket et de la pratique de la mafia : non-respect des règles sauf celles imposées par les États Unis et si vous voulez être des alliés et être protégés, il faut payer. Un mélange confus d’isolationnisme et d’impérialisme où la transaction est le maître mot. Les déclarations à propos du changement climatique, de l’Ukraine, du Canal de Panama, du Canada et du Groenland sont édifiantes. C’est sans doute ce que certains appellent la paix par la force.
Quel avenir ?
Les États Unis et la Chine ne séparent pas intérêts économiques et intérêts géostratégiques. Les États-Unis ont adopté une approche fondée sur la sécurité nationale et identifie la Chine comme un rival géopolitique. La Chine affirme sa propre vision du monde et sa volonté de réécrire les règles conformément à ses intérêts. L’Union Européenne dans ce monde conflictuel est la seule puissance qui peut essayer d’influer sur l’ordre du monde dans un sens plus coopératif. En a-t-elle encore la capacité ?
Les européens, s’ils veulent éviter la vassalisation et vivre dans un monde façonné par d’autres, doivent faire de la souveraineté européenne et son autonomie stratégique une priorité incontournable. Ils doivent œuvrer à promouvoir la place des pays émergents et en développement dans le concert des nations. L’ordre mondial doit préférer la coopération à la force et la puissance. L’objectif est d’améliorer le sort de tous. L’humanisme universaliste issu de la philosophie des Lumières doit être la référence pour construire une humanité plus éclairée, moins inégalitaire, plus fraternelle en respectant la diversité humaine et en préservant la planète qui constitue notre cadre commun de vie.
Avec la réélection de Donald Trump à la présidence des États Unis nous assistons à l’augmentation de l’influence d’un courant idéologique faisant la liaison entre les utopies libertariennes et les valeurs conservatrices. Un article du journal « Le Monde » signé par Valentine Faure en fait une analyse détaillée. Je vous en livre l’essentiel.
Des pouvoirs sans précédent
En 2020 Elon Musk était démocrate mais en 2024 c’est avec zèle qu’il s’est employé à la réélection de Trump. Il a investi plus de cent millions de dollars sur quelques mois dans la campagne et mis à disposition du candidat républicain son réseau d’information. Il a fait un bon investissement puisqu’une semaine après l’élection sa fortune personnelle avait déjà augmenté de 70 milliards de dollars.
La mue de l’homme le plus riche du monde n’est pas la seule. D’anciens donateurs du Parti Démocrate ont suivi la même trajectoire que Musk, notamment Peter Thiel qui a cofondé avec lui Pay Pal et qui est devenu très riche avec son investissement dans Facebook. Une partie des dirigeants de la Silicon Valley ont basculé vers le soutien au Parti Républicain. Sur les 70 milliardaires que compte la Silicon Valley, ils sont une vingtaine à soutenir le 47ème président des États Unis. « Mais ces vingt personnes ont un accès direct à l’espace public médiatique mondial qu’ils ont eux-mêmes composé. La concentration des pouvoirs qu’ils ont entre leurs mains, l’accès aux technologies et leur capacité à mettre en pratique ce en quoi ils croient est sans précédent » dit Olivier Alexandre, sociologue, chercheur au CNRS.
Un ennemi commun
Selon un rapport de l’ONG Public Citizen l’industrie des cryptomonnaies représente près de la moitié de l’argent versé par les entreprises aux comités d’action politique en 2024. Le Parti Républicain soutenu par ces donateurs reviendra sur les mesures qui entravent le développement des technologies nouvelles.
La bureaucratie est l’ennemi général dans la Silicon Valley. L’État n’est pas efficace, il impose un tas de réglementations idiotes qui font perdre du temps et des talents. Il faut gérer l’État comme une entreprise. Le progrès technologique doit être poursuivi sans relâche, sans se préoccuper des coûts potentiels ou des dangers pour la société. La bureaucratie doit céder la place à un « CAO(PDG) national » dit Curtis Yarvin, qui pense que les différences génétiques font que certains groupes sont « plus aptes à la maîtrise », tandis que d’autres sont « plus aptes à l’esclavage ». Ce penseur de la droite radicale a contribué à populariser un tournant de la droite américaine contre la démocratie et les valeurs conservatrices traditionnelles, tout en aidant à normaliser des vues racialistes autrefois absentes du conservatisme américain. C’est un exemple des nouvelles tendances importantes dans la pensée et l’activisme de l’extrême droite radicale.
La droite tech s’estime muselée par la gauche libérale. Elle considère que l’argent ne doit pas être dépensé pour réduire les inégalités, mais pour financer les progrès technologiques. Elle rejette la discrimination positive et la « diversité ». Un commentateur d’extrême droite, Richard Hanania, estime que : « bien qu’il y ait des différences avec le conservatisme américain, il n’y a aucune raison pour que les deux parties (conservateurs et droite tech) ne puissent travailler ensemble dans un avenir prévisible. La forme de notre politique et de notre culture dans les décennies à venir dépendra de la mesure dans laquelle ils le feront ».
Trouver un terrain d’entente
Le nouveau vice-président des États-Unis, J.D. Vance, ancien sénateur anti élite passé par l’université de Yale, est le visage de cette « nouvelle droite » qui tente de donner une orientation encore plus radicale (en matière de nationalisme, de politique anti-immigration, d’opposition à l’interventionnisme américain) à la révolution idéologique commencée par Trump. Cette ligne s’incarne dans le « Projet 2025 » rédigé par la Fondation Héritage, très puissant cercle de réflexion de la droite conservatrice.
The Héritage fondation, leadership for América
Dans un débat sur « la tech et la république américaine », Kevin Roberts, le président de Héritage s’interrogeait : « Comment le conservatisme et la technologie peuvent-ils trouver un terrain d’entente pour stimuler l’innovation tout en protégeant la liberté d’expression, les libertés individuelles et l’autogouvernance ? ». Il y précisait que « les conservateurs et les (gens de la tech) ne doivent pas seulement collaborer, ils sont en réalité des esprits frères » et l’IA représente « un des plus grands espoirs pour protéger la souveraineté de l’être humain ».
La droite tech a son « CAO national » !
Après l’élection du 5 novembre, les félicitations de l’élite technologique à Trump sont arrivées promptement. Elon Musk est remercié par une nomination à la tête de l’efficacité gouvernementale où il prévoit une coupe de deux billions de dollars. L’Amérique a le « CAO national » dont la droite tech rêvait.
Amazon, propriété de Jeff Bezos, et Meta propriété de Mark Zukerberg, ont annoncé donner chacune un million de dollars au fonds d’investiture de Donald Trump. Ces deux patrons de la tech étaient historiquement considérés comme des opposants au futur président. Ces donations témoignent de la volonté qu’ils ont de se rapprocher du président élu.
Comment résoudre la contradiction ?
Comment résoudre la contradiction d’une alliance entre le parti de la tradition qui tient le langage de la nostalgie d’une Amérique perdue (Make América Great Again) et qui défend un retour à une économie pré-New deal, protectionniste et isolationniste, avec une industrie aux intérêts supranationaux qui promet au monde les bouleversements les plus violents et les plus incertains ?
Restons attentif à ce qui risque de se passer aux USA et dans le monde après le mois de janvier 2025 !
Quand on évoque le sens de l’Histoire, de quoi parle-t-on ? cette expression peut s’interpréter de plusieurs façons selon la polysémie du mot sens. Ce mot nous renvoie à différentes interprétations.
Si le mot sens est pris comme orientation, s’interroger sur le sens de l’Histoire nous conduit à nous demander dans quelle direction chemine l’Histoire ? Celle-ci a-t-elle une direction déterminée ?
Si sens est traduit par valeur objective, s’interroger sur le sens de l’Histoire nous conduit à nous demander quelle est la signification des évènements historiques ?
Une direction unique
Depuis des siècles les religions ont cru ou croient encore que l’histoire ne peut progresser que vers le triomphe de leur culte. La direction de l’Histoire est unique et bien déterminée.
Hegel, pour qui l’univers évolue selon un processus continuel de dépassement, pose les principes d’une approche dialectique de l’Histoire. Il confère à l’idée, ou à l’esprit le rôle de moteur premier dans le déroulement du processus dialectique. Il affirme qu’il convient de considérer les choses, non dans leur état, mais dans leur mouvement. L’esprit est la contradiction suprême qui met le monde en mouvement et transforme le réel.
Marx conteste l’idéalisme de la vision d’Hegel, il estime que la dialectique hégélienne « marche sur la tête », c’est la vie qui détermine la conscience et non la conscience qui détermine la vie. Mais il souligne la portée révolutionnaire de la conception dialectique de Hegel et voit en celle-ci le mécanisme annonciateur de la disparition du capitalisme dans son dépassement par une autre forme de société issue de ses contradictions.
Pour Marx, le matérialisme historique est l’étude des formations sociales, c’est-à-dire l’analyse du processus complexe par lequel une formation sociale se produit et se reproduit comme unité, comme un tout structuré. Il permet de penser l’ensemble de la société et de prévoir son évolution. L’Histoire chemine dans une direction donnée, elle est mue par un moteur unique, la lutte des classes.
Les dirigeants des dictatures idéologiques du XXème siècle étaient aussi persuadés que leur victoire inéluctable entraînerait la fin de l’Histoire par l’avènement d’un monde incontesté.
Le progrès scientifique et technique
Au XVIIIème siècle, appelé « siècle des Lumières », philosophes et scientifiques s’affranchissent des interdits religieux, idéologiques et politiques de l’époque. Ils promeuvent des conceptions nouvelles, rationnelles et humanistes. Le progrès scientifique et technique a indéniablement influencé l’évolution de la société. La foi dans le progrès s’accompagne de la foi en l’homme, en sa créativité et sa raison.
De nos jours encore, les nouvelles technologies de l’information et de la communication, Internet, les réseaux sociaux, l’Intelligence artificielle, le transhumanisme et l’illusion de la vie éternelle ont des conséquences considérables sur les rapports entre les hommes, les nations, les peuples, les économies, l’échange des idées… et donc sur l’Histoire.
Mais cette foi dans le progrès scientifique et technique est aussi porteur de craintes et d’angoisses accentuées par le changement climatique, la pollution, les manipulations génétiques. La notion du progrès comme moteur de l’Histoire est ainsi contrariée comme le furent les religions et les totalitarismes. L’idée que l’Histoire est mue par un moteur constant, unique ou au moins principal, et qu’elle progresse dans une direction donnée est peut-être une illusion.
La signification des évènements historiques
Il est possible aussi de s’interroger sur la signification des faits historiques. Quel sens donner à l’enchainement des nombreux épisodes d’aventures, de passions, de créations, de contradictions, de sentiments, d’interactions et de conflits humains. C’est depuis toujours la question que se posent les historiens. A chaque époque la recherche de la signification des faits historiques se perfectionne, devient plus rigoureuse, plus complète pour aboutir à une interprétation plus argumentée.
Dans la première moitié du XXe siècle, le grand historien Marc BLOCH a œuvré dans ce sens. Au sein d’un courant intellectuel novateur, l’École des annales, il prend à contre-pied la conception dominante de l’histoire qui est essentiellement événementielle et chronologique. Il fait de l’histoire un outil permettant de comprendre le fonctionnement des sociétés et celui de ses mécanismes d’évolution. C’est un courant qui a renouvelé en profondeur l’étude de l’histoire en France et dans le monde. Les faits économiques et sociaux, l’organisation du travail et de la vie des gens sont aussi indispensables que les faits politiques, diplomatiques et religieux de chaque époque, pour la compréhension de l’Histoire.
L’Histoire a des moteurs multiples
L’Histoire est mue par de nombreux moteurs : politiques, culturels, économiques et sociaux. L’interdisciplinarité est essentielle pour comprendre le monde contemporain. L’histoire est une science sociale au coté d’autres disciplines (la géographie, la sociologie, l’anthropologie…) pour contribuer à cette compréhension.
L’Histoire ne progresse pas invariablement dans la même direction mais souvent de manière contradictoire. Les directions prises varient avec le temps. Aucun bouleversement ne peut provoquer la fin de l’Histoire ou son évolution unidirectionnelle. La complexité de la vie et les caractéristiques humaines engendrent la complexité de la science historique qui, elle, cherche à établir et comprendre cette évolution et ses nombreuses inflexions.
Le travail de l’historien est une démarche humaniste. Mieux comprendre le fonctionnement de la société et son évolution permet aux hommes et aux femmes, à leurs dirigeants politiques d’œuvrer à l’amélioration de cette société. L’histoire est une discipline engagée au service de la société et de la démocratie.
Je vous transmets le message de l’association « POUR L’UKRAINE, POUR LEUR LIBERTÉ ET LA NOTRE ». Notre solidarité ne doit pas faiblir surtout maintenant.
C’est l’heure de l’Europe :
Ne trahissons pas l’Ukraine !
Appel à une mobilisation des citoyens européens
Rencontre et mobilisation Jeudi 5 décembre à 18h30 sur Zoom
Le 5 décembre à 18h30 rejoignez nous sur Zoom pour vous informer, débattre et agir en soutenant notre Appel à une mobilisation des citoyens européens (en pj). avec : ➡ Nicolas Tenzer, géopolitiste, enseignant à Sciences Po Paris, ➡ André Gattolin, universitaire, ancien sénateur ➡ Alexandre Melnik, professeur de géopolitique à l’ICN Business School. Quelle est la situation sur le front ?Pourquoi l’Europe doit-elle intervenir ?Avec quels moyens Peut-elle le faireUne coalition de pays volontaires pour protéger l’Ukraine est-elle souhaitable et possible ?Comment empêcher un nouveau Munich et agir en tant que citoyens Européens ? Rencontre animée par Melodie Combot, universitaire, Florence Hartmann, journaliste et essayiste, Pierre Raiman, historien, co-fondateur de l’association Pour l’Ukraine, pour leur liberté et la nôtre !
L’Ukraine vit des heures angoissantes. L’armée russe, forte d’un budget militaire de 106 Md€ qu’elle veut porter à 135 Md€ en 2025, poursuit son invasion au prix de dizaines de milliers de morts et de la destruction systématique des infrastructures vitales de l’Ukraine : ses centrales énergétiques, ses hôpitaux, ses usines. Malgré la résistance héroïque des Ukrainiens, elle gagne du terrain grâce aux demi-mesures et aux retards de l’aide apportée par leurs alliés, qui se gardent bien de désigner la seule issue admissible de cette guerre : le retrait de la Russie dans ses frontières. Paralysés par le « chantage au nucléaire » de Vladimir Poutine, Joe Biden et les dirigeants occidentaux ont livré à contretemps des armements en quantité et de portée limitées, sans procurer à l’Ukraine les moyens de la victoire. Préoccupés avant tout par le souci de ne pas concourir à une « escalade », ils ont laissé le Kremlin franchir successivement toutes les étapes de la surenchère militaire, jusqu’à l’arrivée ces derniers jours de 10 000 soldats nord-coréens, couronnée par l’emploi de charges chimiques et d’un missile intercontinental. Tétanisés par les rodomontades de Donald Trump, les gouvernements européens se préparent-ils mezza-voce à accepter, avec un lâche soulagement, que la nouvelle administration américaine négocie un accord de cessez-le-feu au détriment de la volonté ukrainienne ? La trahison de l’Ukraine signerait l’arrêt de mort du projet européen : triomphant aujourd’hui, Poutine reprendrait dans deux, cinq ou sept ans ses guerres de conquête contre l’Ukraine, mais aussi la Géorgie, la Moldavie ou les Pays baltes. L’ensemble du continent glisserait vers l’abîme. Notre sécurité, nos libertés et nos valeurs sont directement menacées. Il faut donc agir, vite. L’OTAN est suspendue au bon vouloir de la Maison blanche. L’Union européenne se heurte à l’indécision et la pusillanimité de certains chefs d’État et de gouvernement et au double jeu du premier ministre hongrois Viktor Orban. C’est pourquoi nous en appelons à la prompte mise en place d’une coalition des États européens volontaires ─ qu’ils soient ou non membres de l’UE (comme le Royaume-Uni et la Norvège). Cette coalition pourrait très rapidement s’accorder sur un ensemble de mesures :
Assurer le financement de l’armement nécessaire, réclamé par Kyiv, en confisquant et transférant à l’Ukraine les 200 Md€ d’avoirs de la Banque centrale de Russie actuellement bloqués en Europe. Compte tenu de l’ampleur des besoins du pays ruiné par la guerre d’agression (évalués par la Banque mondiale à 483 Md$ au 1er janvier 2024), non seulement le droit international le permet, mais l’urgence le justifie. Cela raffermirait aussi la souveraineté collective européenne sur la scène internationale.
2. Protéger le ciel et la frontière Nord de l’Ukraine :
En autorisant les Ukrainiens à frapper en Russie, avec les armes que nous leur procurons, les sites militaires d’où partent les attaques de Moscou ;
En fournissant une quantité significative de batteries et de vecteurs anti-aériens, afin d’arrêter la destruction des infrastructures civiles ;
En neutralisant avec le concours de nos forces aériennes et antiaériennes, depuis l’espace européen, les missiles et drones à moyenne et longue portée lancés contre les villes ukrainiennes ;
En envoyant un contingent, formé par la coalition des pays volontaires, pour protéger la frontière de l’Ukraine avec le Bélarus, afin de permettre aux troupes ukrainiennes immobilisées sur ces positions de rejoindre le front. Cette intervention défensive serait la meilleure réponse à l’implication aux côtés des forces russes de troupes du régime totalitaire de Kim Jong-un et le signe de notre détermination, susceptible de dissuader Poutine d’aller plus loin.
3. Refuser tout accord de paix qui ne prenne pas en compte :
la dimension humaine (et pas seulement territoriale) de l’invasion russe : aucun Ukrainien ne doit être retenu contre son gré en Russie. Le retour en Ukraine des populations déportées par l’armée russe, dont des dizaines de milliers d’enfants kidnappés, n’est pas négociable ;
la sécurité de l’Ukraine : lui imposer le statut d’État démilitarisé ou neutre la mettrait en danger, alors qu’elle a, au contraire, vocation à entrer dans l’OTAN, seule garantie à long terme de l’inviolabilité de son territoire. Quoi qu’en dise la propagande du Kremlin, aucune de ces mesures n’implique d’entrer en guerre avec la Russie. Leur coût est limité. Elles sont vitales pour un pays qui défend sa liberté et protège les nôtres.
Premiers signataires : Sylvie Rollet, présidente de l’association Pour l’Ukraine, pour leur liberté et la nôtre Pierre Raiman, historien, co-fondateur de l’association Pour l’Ukraine, pour leur liberté et la nôtre Galia Ackerman, historienne, rédactrice en chef de « Desk Russie » Julien Bayou, avocat, ancien député André Gattolin, universitaire, ancien sénateur Emmanuel Wallon, professeur émérite de sociologie politique à l’université Paris-X.
Pour signer cet appel
Envoyez vos signatures à appelpourlukraine@gmail.comavec vos prénoms, noms et fonctions ou titres.
A l’approche de la fin de l’année il est traditionnel de se rappeler la revendication de faire du 9 décembre le jour de la fête de la Laïcité. C’est une occasion de revenir sur ces notions de Liberté de conscience et de Laïcité.
Philosophie et religion
La philosophie, du grecque philo sophia, c’est l’art de prendre soin de ses pensées, de s’affranchir des limites de l’expérience vécue, des premières illusions, des préjugés, des traditions, de l’idéologie qui présente comme naturel ce qui est social et historique. La notion de liberté de conscience est issue de la philosophie grecque.
SOCRATE
Pour Socrate, le sentiment de soi qui définit la conscience est délié de toute contrainte. Il a été condamné à mort, entre autres, pour irrespect supposé des dieux de la cité. Protagoras, l’auteur de « l’homme est la mesure de toute chose » a été banni pour agnosticisme. Les religions justifient leurs usages par des exigences divines.
Baruch SPINOZA
Dès l’apparition de la notion de liberté de conscience apparait une tension entre les religions et la philosophie. La liste est longue du rejet de la raison philosophique au nom d’une foi inconditionnelle. Nous pouvons citer quelques exemples entre autres de philosophes condamnés par la foi : Descartes, Copernic, Spinoza, Averroès, Kant, Salman Rushdie, etc…
La philosophie nous aide à démêler les univers de la croyance et de la connaissance. Croire ou savoir ? Croire que l’on sait, ou savoir qu’on ne sait pas. Questions essentielles pour clarifier ce qui se passe dans la conscience humaine.
Denis DIDEROT
La philosophie des Lumières
Au XVIIIème siècle qu’on appelle le siècle des Lumières, les philosophes, dans le prolongement des idées héritées de la Renaissance, ont combattu l’obscurantisme, la superstition et l’irrationnel des siècles passés. Ils ont renouvelé les connaissances et l’éthique de leur temps.
Les Lumières sont à l’origine de deux formes de société. L’une qui se fonde sur le religieux, l’inné et l’autorité garantie par la véracité divine. L’autre qui au contraire proclame le libre arbitre, l’acquis et le progrès. Le mouvement des Lumières, c’est un ensemble de philosophies qui changent selon les nations en fonction de leurs pratiques culturelles.
Mais leur force commune, c’est une pensée non figée, une pensée qui se meut, qui échange, qui discute, qui évolue et qui reflète l’homme dans son besoin de se confronter à l’autre pour avancer. C’est une conception de l’homme qui a conquis sa liberté, le refus de tout dogmatisme, une pensée libre pour chaque homme sans messianisme religieux ou politique.
Emmanuel KANT
Pour illustrer cette approche citons la maxime d’Emmanuel Kant : « Sapere aude », pense par toi-même. Le projet des Lumières est un projet humaniste et universel.
Liberté de conscience et émancipation
La Déclaration des droits de l’homme adoptée en 1948 par les Nations Unies mais qui n’a pas de portée contraignante, définit la liberté de conscience et de religion dans son article 18 : «Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction seule ou en commun, tant en public qu’en privé, par l’enseignement, les pratiques, le culte et l’accomplissement des rites. » Elle définit la Liberté comme ce qui consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. Elle garantit l’expression du pluralisme des opinions et la liberté de conscience.
Aujourd’hui la liberté de conscience c’est la liberté de l’esprit : émancipation à l’égard de tous les dogmes ; droit de croire ou de ne pas croire en une divinité qui dirige le monde ; autonomie de la pensée vis-à-vis des contraintes religieuses, politiques, économiques ; affranchissement des modes de vie par rapport aux tabous, aux idées dominantes et aux règles dogmatiques.
La Laïcité est un principe consubstantiel à la République
La laïcité est un principe fondamental qui vise à séparer les institutions publiques des institutions religieuses et à garantir la neutralité de l’État en matière de religion. Ce concept est particulièrement important en France, où il est inscrit dans la Constitution et joue un rôle central dans l’organisation de la société.
L’article 2 de la constitution actuelle de la France indique que « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. » La laïcité est un principe consubstantiel à la République qui va au-delà du rapport de l’État et des Églises. C’est sans doute ce qui poussent certains à parler de conception française de la laïcité même si le principe de laïcité porte en lui-même sa force indépendamment du support constitutionnel.
Une pensée philosophique humaniste et universaliste
La Laïcité est avant tout une construction juridique fondée sur une exigence de la raison : l’égalité en droit de tous les êtres humains. Le principe de Laïcité est la convergence d’une évolution législative de plusieurs siècles aboutissant à la séparation des Églises et de l’État et une pensée philosophique humaniste et universaliste assurant à chacun la liberté de conscience et le primat de l’intérêt général, du bien commun à tous.
La séparation des Églises et de l’État est la pierre angulaire de la laïcisation de la société. Si l’État garantit la totale liberté des cultes comme de l’expression et de la diffusion de la pensée, il n’en favorise aucun, ni aucune communauté, pas plus financièrement que politiquement.
La loi ne saurait reconnaître le délit de blasphème ou de sacrilège qui déboucherait inévitablement sur l’institutionnalisation de la censure. La première manifestation du caractère laïque d’un pays est l’indépendance de l’État et de tous les services publics vis-à-vis des institutions ou influences religieuses.
Victor Hugo
La formule clé de l’idéal laïque nous est donnée par Victor Hugo : « L’Église chez elle, et l’État chez lui ».
Un idéal d’émancipation
L’humanisme laïque repose sur le principe de la liberté de conscience. La laïcité est un idéal qui permet à tous, croyants et athées, de vivre au sein de la société sans que les uns ou les autres soient stigmatisés en raison de leurs convictions particulières. Elle impose que soient donnés aux hommes et aux femmes, sans distinction de classe, d’origine, de confession, les moyens d’être eux-mêmes, libres de leurs engagements, responsables de leur épanouissement et maîtres de leur destin.
L’État laïque incarne la promotion simultanée de la liberté de conscience, de l’égalité, de la culture émancipatrice et du choix sans entrave de l’éthique de vie personnelle. La laïcité vise à libérer l’enfant et l’adulte de tout ce qui aliène ou pervertit la pensée, notamment les croyances ataviques, les préjugés, les idées préconçues, les dogmes, les idéologies opprimantes, les pressions d’ordre culturel, économique, social, politique ou religieux.
La laïcité est un idéal d’émancipation qui permet à tous, croyants, athées, et agnostiques, de vivre au sein de la société sans que les uns ou les autres soient stigmatisés en raison de leurs convictions particulières. L’État laïque incarne la promotion simultanée de la liberté de conscience et de l’égalité, de la culture émancipatrice et du choix sans entrave de l’éthique de vie personnelle.
École et Laïcité
L’école publique laïque, pour contribuer à cette émancipation, doit tenir à distance la société civile et ses fausses urgences. La laïcité c’est le fait de refuser aux puissances de conditionnement d’entrer dans les classes, d’ouvrir à chaque esprit la chance de penser sans tutelle, sans emprises. L’enseignement public doit être affranchi de tout prosélytisme religieux ou idéologique. L’école est un moyen de transmission du savoir mais c’est aussi le moyen de fabriquer une communauté nationale de citoyens.
Laïcité et religion
Laïque signifie indépendant de la religion. La Laïcité implique l’égalité des droits sans distinction de convictions personnelles. Laïque ne s’oppose pas à religieux mais à clérical. L’esprit clérical, c’est la prétention des clercs à dominer au nom d’une religion.
La Laïcité ne se confond pas avec l’athéisme et ne se réduit pas au combat anticlérical. Admettre que chacun puisse à titre individuel ne pas croire ou pratiquer le culte de son choix sans que la société n’en impose aucun est un principe qui consiste à laisser chacun libre de ses choix selon ses propres règles morales avec pour seule limite de ne pas nuire à autrui sans subir celles que lui imposerait la religion ou n’importe quelle idéologie totalitaire d’État.
Une vision confuse
Certains croyants considèrent que les laïques ont pour seul objectif de lutter contre leur religion. Comme ils ne se sentent pas respectés cela entraine chez eux un raidissement compréhensible. D’autres reprochent aux partisans de la laïcité d’être dépourvu de tout spiritualisme et ignorent le spiritualisme laïque qui est en rapport avec l’esprit et dépourvu de toute relation avec une quelconque divinité.
Par ailleurs certains laïques, sans doute insuffisamment informés, font preuve d’intolérance par rapport aux croyants et oublient que la laïcité garantie la liberté de conscience et donc la liberté de culte. C’est un peu un renversement des rôles par rapport à la période où les non-croyants étaient persécutés par les fanatiques religieux. C’est face à cette attitude discriminante que la laïcité s’est affirmée contre l’intolérance de certains croyants et surtout du clergé qui se sentait menacé par la laïcité.
Il ne faut pas non plus ignorer l’attitude de certaines forces politiques qui instrumentalisent la laïcité pour lutter contre certaines religions notamment la religion musulmane en l’assimilant à l’islamisme politique qui veut imposer la loi de Dieu à la place de la loi des hommes.
Conclusion
La laïcité n’est pas une notion passéiste mais au contraire une idée de progrès. Elle est action et volonté. Elle implique la plénitude de l’égalité de traitement par l’État, des athées et des croyants. Cette égalité est la condition d’une véritable fraternité, dans la référence au bien commun.
Les humanistes laïques et universalistes, au-delà de toute règle constitutionnelle, héritiers des philosophes du siècle des Lumières, ont une conception de l’homme qui a conquis sa liberté, qui promeut une pensée libre pour chacun sans messianisme religieux ou politique. Ils sont partisans d’une laïcisation de la société c’est-à-dire d’un État indépendant de tout dogmatisme qui adopte le principe de laïcité, idéal d’émancipation, de liberté, d’égalité, de fraternité et de solidarité humaine qui garantit la liberté de conscience pour tous.
Dès l’annonce de l’échec de la liste Renaissance aux élections européennes du début juin 2024, le Président de la république annonce la dissolution de l’assemblée nationale. Il décide ainsi de donner la parole au peuple dans la perspective de provoquer une clarification de la situation. Il convoque les élections législatives dans un délai très court avec un deuxième tour le 7 juillet alors que l’extrême droite réalise une poussée notable.
La gauche émiettée réussit en quatre jours à reconstruire son unité en créant le Nouveau Front Populaire (NFP) avec un contrat de législature basé sur un programme économique et social assez développé. Le parti « Les Républicains » explosent avec le ralliement au Rassemblement national (RN) de son président partisan de l’Union des droites. Le parti du Président (Renaissance) se prononce pour le non aux extrêmes de droite comme de gauche. La campagne est courte et très tendue.
Une poussée inquiétante de l’extrême droite
A l’issue du premier tour le RN est en tête avec le plus grand nombre d’élus mais voit se constituer un front républicain sans condition à gauche et avec quelques hésitations chez Ensemble pour la république ( EPR – le nouveau nom de Renaissance) où l’aile droite maintient le « ni-ni ».
Au soir du 7 juillet le rêve de la majorité absolue pour le RN s’effondre. Le désistement de la gauche et d’EPR pour faire barrage au RN relègue ce dernier en troisième position avec un NFP en première position sans atteindre la majorité absolue. EPR s’en tire bien en arrivant à être le deuxième groupe de l’assemblée.
Une assemblée nationale sans majorité
Au sein de l’assemblée nationale, le NFP, le RN et EPR, sont les groupes les plus importants mais aucun n’atteint la majorité absolue nécessaire pour gouverner. La logique institutionnelle aurait dû amener le Président de la république à nommer un premier ministre issu du NFP quitte à ce que celui-ci constitue un gouvernement minoritaire.
Mais le Président de la république a profité de l’organisation des Jeux Olympiques à Paris pour laisser passer le temps. Il permet que se constitue une minorité plus nombreuse alliant EPR et Les Républicains. Le nouveau premier ministre, issu de LR, constitue son gouvernement minoritaire à l’Assemblée avec la neutralité bienveillante du RN qui impose certaines conditions et le tient comme la corde tient le pendu.
Un déni démocratique
En résumé, le président a voulu sortir son camp d’une minorité à l’assemblée et provoquer une clarification de la situation. Le résultat des élections marque un désaveu de la politique menée par le gouvernement sortant. Le président nomme un nouveau gouvernement avec une minorité encore plus faible que la précédente regroupant les perdants des élections législatives, un déni démocratique.
Une situation financière alarmante
La situation financière s’avère encore plus catastrophique que celle annoncée précédemment et oblige le gouvernement à préparer un budget de crise. Le nouveau premier ministre s’efforce de changer de méthode mais sur le fond pas grand-chose de nouveau. Au niveau économique les ministres concernés sont issus des défenseurs de la politique précédente. IIs veulent continuer la politique néolibérale poursuivie depuis plusieurs années, qui a été rejetée massivement et qui nous a mené dans le mur.
La dette publique s’élève à plus de 3000 milliards d’euros. Après un déficit de 5,5% du PIB (Produit Intérieur Brut) en 2023, la tendance actuelle prévoit 6% cette année et encore plus l’an prochain.
Plus de justice fiscale ?
Certes le premier ministre annonce qu’il faut plus de justice fiscale et veut abandonner le dogme du « pas de nouveaux impôts » soutenu par le président. C’est d’ailleurs une obligation car ce qui est à l’origine de ce déficit, de l’avis de nombreux économistes, c’est le manque de recettes. La croissance qui devait résulter de la politique de l’offre c’est-à-dire, pour aller vite, de l’allègement des charges des entreprises n’est pas au rendez-vous.
Les économistes de l’OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques) estiment que la croissance française serait divisée par deux en 2025 si le budget déposé par le gouvernement Barnier était adopté en l’état.
Changer de politique
Changer de politique pour répondre aux besoins des français est le seul moyen d’éviter de nous retrouver dans une impasse dans quelques mois. Le NFP défend une autre stratégie budgétaire et propose de lever de nouvelles recettes. Grâce à ces mesures fiscales, la France serait en mesure de réduire le déficit tout en augmentant immédiatement les investissements dans les services publics et les secteurs d’avenir.
La philosophie est très différente de celle du gouvernement Barnier, qui est centrée sur la simple réduction du déficit, au prix d’effets récessifs significatifs c’est-à-dire réduire la croissance de moitié. Le programme du Nouveau Front populaire propose une stratégie budgétaire qui augmente les dépenses publiques, stimule l’activité économique et permet de dégager des recettes supplémentaires.
A l’Assemblée nationale les différents partis du NFP montrent leur convergence de vue dans le domaine économique et social. L’unité affichée lors du débat budgétaire ne doit pas nous faire oublier que sur l’international, les institutions ou le régalien les positions ne sont pas alignées.
Trouver la voie de l’Union
En France l’histoire nous montre que la gauche a toujours été diverse. Les partis de gauche n’ont pu accéder au pouvoir que lorsqu’ils ont trouvé la voie de l’union. C’est pourquoi les électeurs de gauche, quelque soit leur sensibilité, poussent leurs représentants à faire l’union. Les points d’accord sont bien plus importants que les points de divergence. Chacun doit avoir le souci de respecter ses partenaires et leurs différences.
Au-delà de la guérilla parlementaire qui se déroule à propos du budget 2025, où la Gauche a pu montrer son unité, il faut que chaque composante de la gauche ait en tête l’avenir et recherche les compromis indispensables pour élaborer une politique de long terme qui lierait réforme économique, réforme de l’État et réforme écologique.
Répondre aux défis de ce premier quart de siècle
Ce projet politique doit répondre aux défis auxquels nous sommes confrontés en ce premier quart de XXIème siècle.
Le défi économique et social avec la mise en place d’une alternative au néolibéralisme et la baisse des inégalités.
Le défi climatique avec la lutte contre le réchauffement de la planète et le recul de la biodiversité.
Le défi technologique avec la confrontation de l’humanité au progrès technologique.
Le défi politique avec l’affrontement larvé entre les États Unis et la Chine pour la domination du monde et l’agression de l’Ukraine par la Russie qui veut reconstituer l’empire russe.
Le défi démocratique en rejetant la verticalité du pouvoir et en favorisant une plus grande participation des citoyens.
Ce sont les réponses à ces défis et les grands choix sociétaux à faire qui détermineront avec un minimum de cohérence les mesures qui devront être prises par les gouvernants sous le contrôle des citoyens. C’est en sollicitant les citoyens sur ces grands choix que l’on pourra revivifier notre système démocratique et les faire se prononcer sur ce qui influencera vraiment leur vie à venir.
Élaborer un projet politique de long terme et répondre à ces défis sont les conditions pour que la gauche redevienne un parti de gouvernement de transformation démocratique et sociale.
Après des élections européennes, une dissolution de l’Assemblée Nationale, des élections législatives et deux mois de réflexion et d’hésitation nous voilà nantis d’un gouvernement. Mais nous pouvons légitimement nous interroger sur la politique qu’il va pouvoir mener.
Qui perd gagne !
Le résultat des élections européennes de juin 2024 est sans appel. Il marque un désaveu de la politique menée par le Président de la république et son gouvernement. Suscitant l’effroi de ses partisans, le Président a décidé de dissoudre l’Assemblée Nationale pour provoquer une « clarification de la situation » avec l’espoir sans doute de sortir son camp de la majorité relative à l’assemblée. Le résultat est pire que mieux ! Nous nous retrouvons avec une majorité relative encore moins importante que la précédente puisqu’aucun des groupes politiques importants, le Nouveau Front Populaire (NFP), le groupe Ensemble Pour la République (EPR), l’extrême droite, ne dispose d’une majorité suffisante pour gouverner.
Un gouvernement minoritaire
Le président de la république, contrairement à la pratique constitutionnelle a refusé de nommer un premier ministre issu du NFP, groupe arrivé en tête, au prétexte qu’il sera l’objet d’une motion de censure à la première occasion comme annoncé par les autres groupes. Après avoir imposé une longue période de réflexion, il charge un nouveau premier ministre de mettre en place un gouvernement composé des perdants de la période électorale c’est-à-dire « Ensemble pour la République » et « Les Républicains ». A l’assemblée Nationale les élus susceptibles de soutenir ce gouvernement sont environ 230, donc loin d’atteindre la majorité qui nécessite 289 députés. Ce nouveau gouvernement dirigé par un homme issu des rangs « Les Républicains » est composé en majorité des soutiens du Président. Il est minoritaire mais bénéficie, pour l’immédiat, d’une neutralité de l’extrême droite qui ne souhaite pas le censurer tout de suite.
Une situation financière préoccupante
Mais un gouvernement pour faire quelle politique ? La sempiternelle rengaine de la dette publique est chantée sur tous les tons par tous les tenants du néolibéralisme, amplifiés par les médias. Il faut vite préparer les esprits à la mise en œuvre de l’austérité ! Il ne s’agit pas de nier l’évidence, la dette publique de plus de 3000 milliards est préoccupante mais ceux qui le crie le plus fort sont ceux qui l’ont généré pendant de nombreuses années. Les dernières données fournies par Bercy sont inquiétantes. Après un déficit de 5,5% du PIB en 2023, la tendance actuelle prévoit 5,6% cette année et 6,2% l’an prochain. Mais y-a-il trop de dépenses publiques en France ?
Le défi du déficit public
Selon le Fonds monétaire international (FMI), la France a consacré pour ses dépenses publiques l’équivalent de 58,3% de son produit intérieur brut, assez loin devant l’Italie (56,7%), la Belgique (53,5%), l’Allemagne (52,5%) ou encore le Danemark (44,9%). Pour la droite c’est un triste record qui rend indispensable la mise au régime la puissance publique. Ce diagnostic mérite d’être pris avec précautions. En effet le ratio « dépenses publiques /produit intérieur brut » présente des défauts. Il suffit d’une baisse radicale du PIB pour faire grimper le ratio. De plus il fait dire à certains que l’État accapare plus de la moitié des richesses crées ce qui est factuellement faux. En fait l’État prélève 53,5% des richesses en 2022 et redistribue 58,3% sous forme directe en prestations sociales ou sous forme indirecte en services. C’est l’écart entre les deux qui représente le déficit public. L’utilisation de ce chiffre laisse penser que l’État dépense trop. En fait ces dépenses se partagent entre l’administration centrale, la sécurité sociale et les collectivités locales. C’est la protection sociale qui pèse le plus lourd. Enfin ce ratio compare des périmètres très variés. Par exemple les retraites en France sont très largement socialisées alors que dans d’autres pays elles sont davantage privées. Et ce n’est qu’un exemple, il y en a bien d’autres notamment dans le domaine social. Comparer des pays aux fonctionnements très différents c’est comparer des pommes et des poires.
Réduire les dépenses et/ou augmenter les recettes
En 2023 la France a bouclé son budget avec un déficit de 154 milliards d’euros. L’État en a été le principal responsable loin devant les collectivités locales. La sécurité sociale était en excédent. Donc pour réduire le déficit il faut tailler dans les dépenses publiques et /ou augmenter les recettes. Le déficit de 154 milliards d’euros représente la moitié du montant des retraites versé chaque année, c’est presque deux fois le budget de l’Éducation nationale, et presque quatre fois celui de la transition écologique. Il est toujours possible de gratter quelques milliards sur les chômeurs ou les futurs retraités comme cela a été fait ces dernières années, mais on voit bien que les besoins économiques et sociaux sont tels qu’il est illusoire de penser que la France peut retrouver une situation équilibrée budgétairement sans augmenter les recettes.
Des baisses d’impôts coûteuses
Sur la période 2017-2023, il y a eu d’importantes baisses d’impôts dont l’accumulation commence à coûter cher. Selon la Cour des comptes le manque à gagner annuel est de 62 milliards. Qui a bénéficié de ces cadeaux fiscaux ?
Les entreprises, au nom de la compétitivité, ont été particulièrement bien servies. Les impôts de production ont été réduits via différentes mesures. Ce sont principalement les grandes entreprises qui ont profité de ces réductions dont elles n’avaient pas forcément besoin. La facture est de 11,8 milliards d’euros par an. Le taux d’imposition sur les sociétés est passé de 33,3% en 2017 à 25% en 2022. Le manque à gagner annuel pour l’État est de 11,1 milliards d’euros. Selon l’Institut des politiques publiques (IPP) ces mesures ont profité aux entreprises de taille intermédiaire et aux grandes entreprises indépendamment de l’amélioration de leur productivité car le niveau de fiscalité n’est pas le déterminant principal de la compétitivité des entreprises.
Les ménages ont aussi bénéficié de baisses d’impôts. En 2018 un prélèvement forfaitaire unique, flat taxe, de 30% sur les revenus financiers a remplacé un barème progressif. Les très riches sont moins taxés qu’avant. L’impôt sur la fortune a été remplacé par l’impôt sur la fortune immobilière, 3 milliards de manque à gagner. L’Institut des politiques publiques révèle que le niveau de vie du top O,1% de la population a augmenté de 2,1% du fait de la suppression de l’ISF et de 3,8% du fait de l’instauration de la flat taxe. La suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales a profité là aussi aux français les plus aisés. L’impôt sur le revenu a été allégé en milieu de barème après la crise des gilets jaunes. Cela a permis une hausse du revenu disponible de 50% des ménages les plus aisés.
Dans l’ensemble, ce sont les entreprises, les classes moyennes et les plus riches qui ont profité des mesures fiscales mises en œuvre ces dernières années. Les choix budgétaires de ces dernières années ont rendu les impôts de plus en plus injustes.
Il faudrait plus de justice fiscale
L’impôt sur le revenu, l’impôt sur la fortune immobilière et les droits de mutation sont des impôts progressifs. Ils sont en principe plus justes puisque le prélèvement s’accroit avec le revenu. A eux trois ils représentent moins de 10% du montant récolté par l’ensemble des prélèvements obligatoires. De plus ils sont grignotés par de nombreuses niches fiscales.
Les cotisations sociales, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et la contribution sociale généralisée (CSG) sont des prélèvements proportionnels et pèsent bien plus lourd que l’impôt sur le revenu. Les cotisations sociales sont légèrement progressives sur les bas salaires et dégressives sur les plus hauts salaires. La TVA pèse proportionnellement davantage sur les revenus des ménages les moins favorisés puisqu’une plus large part de leurs revenus sont consommés. La CSG créée en 1990 pour financer la protection sociale est devenue l’un des principaux impôts en France aujourd’hui. Entre 2017 et 2023 les sommes récoltées par la TVA ont augmenté de 26%, celles de la CSG de 49%, celles de l’impôt sur le revenu de 21% alors que celles de l’impôt sur la fortune ont chuté de 55%. Globalement les impôts contribuent à augmenter les inégalités même si par ailleurs ils servent à financer les services publics et la protection sociale. Les recettes laissent à désirer mais les dépenses changent la donne. 500 milliards d’euros nets par an transitent via la redistribution, des ménages contributeurs nets vers les ménages bénéficiaires nets par le biais des prestations sociales, des retraites ou de l’accès aux services publics.
La protection sociale, responsable du déficit ?
Entre 2017 et 2023 le déficit s’est dégradé de 2,1 points de produit intérieur brut (PIB). Or les recettes de prélèvements obligatoires ont baissé d’à peu près autant sur la même période. Ce qui est dû en partie à des baisse de taux de prélèvement et en partie à des recettes plus faibles qu’attendu en raison de la conjoncture. Les prestations sociales et autres transferts ont, eux, diminué de 0,7 point de PIB, ce qui a contribué à réduire le déficit public.
Ce qui est à l’origine du creusement du déficit c’est la franche diminution des recettes fiscales depuis 2017. La stratégie du dernier gouvernement a consisté à baisser les prélèvements obligatoires, ce qui vide les caisses, en espérant, en retour, de la croissance, ce qui est censé remplir les caisses, et compléter cette politique par une baisse des dépenses publiques afin d’atteindre l’équilibre. Mais le résultat espéré n’est pas là. Le gouvernement sortant a créé les conditions d’apparition d’un déficit et dramatise pour pousser un agenda de réformes qui visent à baisser les dépenses publiques et voir la politique sociale comme une source d’économie pour redresser les finances publiques.
Reste maintenant à savoir ce que va faire le nouveau gouvernement !
Après la dissolution de l’assemblée nationale par le président de la République et les élections législatives qui s’en sont suivies, la France se trouve dans une situation plus difficile qu’avant. En effet la gauche unie dans le Nouveau Front populaire (NFP) est arrivée en tête mais sans avoir une majorité à l’assemblée nationale. Toutes les autres forces politiques estiment que son programme est irréaliste. Ces forces revendiquent leur subordination aux lois de l’économie et de la gestion érigées en science. Elles présentent la rigueur comme une antidote aux dérives démagogiques et populistes sans s’interroger sur l’acceptabilité de ce discours voire la violence symbolique ou réelle qu’il véhicule.
La raison économique
Les sciences économiques dans leur version orthodoxe s’accordent sur un point : la maximisation du profit ou de la valeur actionnariale qui gouverne les choix d’investissement dans un cadre concurrentiel, n’ont d’autre vocation que d’instaurer une juste rémunération de tous les facteurs et d’accroître l’efficacité du système productif pour majorer le gâteau à partager au bénéfice de tous. Et là où le marché est défaillant, il revient à l’État de suppléer par une intervention correctrice sociale ou environnementale.
Ce propos raisonnable ne nous dit rien des rapports de force qui se nouent entre les différentes parties prenantes, notamment entre les détenteurs du capital et du travail. Au sommet de la chaîne de décision économique ce sont les grands fonds d’investissement et les banques d’affaires qui règnent en maître sur les choix d’investissement, la performance exigée du capital, la configuration de nos usages et l’avenir de la planète.
Ces décideurs économiques négligent le bien commun pour engranger des plus-values immédiates au profit des gros patrimoines financiers soit une infime portion de la société. Ainsi le contrôle économique se concentre et produit des mastodontes au pouvoir de marché et d’acquisition exorbitant. Cette finance patrimoniale ne se préoccupe pas de savoir que derrière les transactions financières il y a des organisations humaines, des traumatismes à chaque cession, une pression sur la performance, tout cela au bénéfice d’un tout petit nombre et au détriment d’un développement harmonieux et soutenable des entreprises, des territoires et des hommes.
Les sciences de gestion fournissent une caution à cette violence larvée et consacrent un déséquilibre de plus en plus poussé dans le rapport entre le capital et le travail, et entre le capital financier et le capital réel. Les États et les banques centrales, se détournant de leur mission première (régalienne, sociale, infrastructurelle) deviennent les grands serviteurs de cette domination économique.
Les dérives oligarchiques du capitalisme n’ont rien de nouveau et ont pour premier effet de miner la démocratie. Il faut prendre conscience de la violence du logiciel de ceux qui prétendent être au centre du jeu et dont la raison flirte avec la déraison. (voir l’article d’Olivier PASSET – Directeur d’études chez Xerfi, société privée d’études et d’analyses – publié le « juillet 2024 sur XERFI Canal).
Financiarisation de l’économie
Nous venons de vivre ces dernières années une grande transformation qui a conduit au capitalisme financier. C’est ce que l’on a appelé la financiarisation de l’économie. Le pouvoir économique a été capté par une minorité d’acteurs de la finance et de firmes multinationales sous la coupe de grands actionnaires qui sont parvenus à imposer leurs vues aux politiques. Ils ont imposé la dérégulation, le libre-échange, les paradis fiscaux, les niches fiscales, la forte réduction de la progressivité de l’impôt, les privatisations des services publics, la réduction de l’intervention de l’État dans l’économie donc la baisse des dépenses publiques, etc…
Nous vivons, disait Jean GADREY, professeur émérite à l’Université de Lille, une crise systémique profonde où crise financière et économique, crise sociale, crise écologique, crise démocratique et crise du pouvoir économique sont interdépendantes. Pour s’en sortir il faut s’attaquer à l’ensemble des causes de chacune de ces crises et à leurs interactions.
Hégémonie culturelle du néolibéralisme
Le néolibéralisme amène les dominés à adopter la vision du monde des dominants et à l’accepter comme « allant de soi ». Cette hégémonie se constitue et se développe à travers la diffusion de valeurs qui peu à peu dominent les esprits et permettent d’atteindre le consentement du plus grand nombre. Ces valeurs sont l’affirmation de l’universalité des logiques de concurrence, de propriété privée, de profit, de fongibilité monétaire, de rareté.
Karl Polanyl (1886-1964) dans son livre « the Great Transformation » pense que, contrairement à la lecture contemporaine superficielle du néolibéralisme considéré comme anti-étatiste, l’État joue un rôle central dans son émergence. Il a été mis au service d’une soumission très forte à une logique de concurrence. Celle-ci n’est pas un ordre naturel et son application nécessite une puissante pression politique et idéologique des institutions publiques pour soumettre la société à cette logique. Pour en sortir, il s’agit de penser l’économie en dehors de l’échange marchand.
Économie et humanisme
L’économie a toujours été une activité multidimensionnelle mettant en relation l’individu, la société et la nature. Elle est condamnée à retrouver sa vraie nature d’activité finalisée par la satisfaction des besoins humains et transformant aussi efficacement que possible, à cette fin, les milieux physiques ou vivants sur lesquels se développe la vie des hommes. Gérer rationnellement les ressources utiles et rares de ce monde, afin de satisfaire au mieux et au moindre coût les aspirations humaines, ne constitue qu’une partie des activités des hommes. Il y a aussi ce qui s’étend à l’esthétique, à la gratuité, aux valeurs socioculturelles qui donnent un sens à la vie et à la mort et finalisent les comportements. La sphère de l’économique est un sous-ensemble de celle des activités humaines et socioculturelles.
Amartya SEN, économiste humaniste, prix Nobel en 1998, a conçu l’indice de développement humain des Nations Unies. Cet instrument de mesure inédit qui prend en compte, non seulement les tonnes d’acier et les milliards de dollars d’exportation mais aussi des paramètres concrets pour les citoyens comme l’espérance de vie, la mortalité infantile, le niveau d’éducation, la santé et même les droits politiques. SEN estime que les politiques publiques doivent donner à chacun la «capabilité» de vivre une vie digne de ses attentes. C’est une magnifique ambition de vouloir toujours replacer au centre des dispositifs chaque homme et chaque femme à la fois dans son humanité défendue dans le cadre éthique des droits de l’homme et dans sa qualité d’acteur et d’être humain dont il faut respecter et renforcer la liberté de mener la vie qu’il ou qu’elle souhaite mener et pas seulement comme réceptacle d’objets divers de confort.
Pour conclure
La mise en cause de l’État providence et l’aggravation des inégalités a donné naissance à une forte demande de justice sociale. Il n’est pas possible de continuer à imposer un discours de nature transcendante, incontestable dans ses présupposés comme dans ses conséquences, imposant ses décisions dans presque tous les domaines de la vie sociale et, dans le même temps, prétendre agir en fonction de principes fondamentalement humanistes sur le plan individuel et démocratiques sur le plan collectif (voir l’article d’André BELLON dans la revue « Humanisme » n°291 de février 2011).
Le dénouement de la crise que nous vivons dépend in fine de la sortie du dogmatisme des sciences économiques version orthodoxe pour adopter une version des sciences économiques au service des hommes et des femmes, de la satisfaction de leurs besoins dans le respect des droits humains, au service de tous et pas d’une minorité. Pour cela les pouvoirs publics doivent retrouver leur mission première. Ils ont l’obligation d’investir dans l’avenir, prioriser la santé, la formation, la recherche, les infrastructures de transport, la production d’énergie, la lutte contre le réchauffement climatique, la préservation de la biodiversité, etc…
Ces investissements sont indispensables, ils sont au bénéfice de toutes et de tous. Ils vont nécessairement fortement augmenter face à la dégradation de la situation. Pour les financer soit on refuse par idéologie toute hausse fiscale et l’on se met dans les mains des financements privés, synonymes d’inégalités d’accès et d’une efficacité collective plus que douteuse comme le démontrent les dernières décennies. Soit on assume l’entrée dans un nouveau cycle de socialisation croissante alimentée par une réforme profonde de la fiscalité plus progressive où chacun, citoyen ou entreprise, contribuera en fonction de ses capacités.
Comme le dit Edgar Morin (voir mon article du 30 juin « une voie nouvelle ») il s’agit de « bâtir une nouvelle conception du monde, de l’homme, de l’histoire… »
Après les élections européennes et la dissolution de l’assemblée nationale par le président de la République nous sortons (provisoirement !) d’une période pleine d’incertitudes mais néanmoins riche en enseignements. Essayons de faire le point.
Les élections européennes de juin 2024
La participation est de 51,5%, légèrement supérieure aux précédents scrutins européens. Les résultats sont sans appel. C’est un net recul de la liste Renaissance avec un taux de 14,6% qui marque un désaveu de la politique menée par le président de la république et son gouvernement même si ce vote ne concernait pas en principe la politique intérieure. Le Rassemblement national réalise un score de 31,4%, la liste Parti socialiste-Place publique 13,8%, la France insoumise 9,9%, les Républicains 7,3%, les écologistes 5,5% et Reconquête 5,5%.
Dissolution de l’assemblée nationale
Dès les résultats annoncés le Président de la république annonce la dissolution de l’assemblée alors que rien ne l’y obligeait. Il décide ainsi de donner la parole au peuple dans la perspective de provoquer une clarification de la situation. Plusieurs commentateurs ont jugé cette décision très risquée à un moment où l’extrême droite réalise une poussée notable. Sans parler de l’incompréhension et l’effroi ressentis par les élus Renaissance de l’assemblée y compris par le nouveau premier ministre.
Les élections législatives
Dans la foulée de la dissolution le président décide de convoquer les élections législatives dans un délai très court avec un deuxième tour le 7 juillet pour que tout soit terminé avant les Jeux Olympiques qui sont prévus pour la mi-juillet. Le Rassemblement national (RN) est ravi. Il se voit déjà en majorité absolue et désigne son candidat premier ministre.
La gauche émiettée réussit en quatre jours à reconstruire son unité en créant le Nouveau Front Populaire (NFP) avec un contrat de législature basé sur un programme économique et social assez développé. Les Républicains explosent avec le ralliement au RN de son président partisan de l’Union des droites. Reconquête se divise et voit sa tête de liste, théoricienne de l’Union des droites, rejoindre le RN. Le premier ministre chef de la majorité relative sortante se prononce pour le ni-ni : ni RN ni La France insoumise (LFI), non aux extrêmes. La campagne est courte et très tendue. Les noms d’oiseaux volent dans tous les sens.
A l’issue du premier tour le RN est en tête avec le plus grand nombre d’élus mais voit se constituer un front républicain sans condition à gauche et avec quelques hésitations chez Ensemble (le nouveau nom de la majorité relative sortante) où l’aile droite maintien le ni-ni. Au soir du 7 juillet le rêve de la majorité absolue pour le RN s’effondre. Le désistement de la gauche et d’Ensemble pour faire barrage au RN relègue ce dernier en troisième position avec un NFP en première position sans atteindre la majorité absolue. Ensemble s’en tire bien en arrivant à être le deuxième groupe de l’assemblée.
Quelles leçons tirées de ces élections ?
La première leçon que l’on peut déduire de ces élections est que la poussée du RN a pour origine plusieurs éléments. D’abord un rejet du pouvoir Jupitérien, méprisant et autoritaire. La stratégie du « moi ou le chaos » est un lamentable échec. C’est devenu, chez beaucoup de français, « Jupiter ça suffit ». Mais cette poussée est due aussi à une inquiétude face à l’immigration non régulée et l’insécurité exploitées à volonté par l’extrême droite. Enfin la politique de banalisation du RN a sans doute donné quelques résultats et laissé croire à certains que ce parti était devenu un parti respectable comme les autres.
La deuxième leçon de ce scrutin c’est que le Front Républicain, que tous les commentateurs disaient disparu, vient de montrer son efficacité. Deux tiers des français estiment que le RN n’a pas changé et que c’est un parti dangereux pour la démocratie, l’image de la France, la République et ses fondamentaux de Liberté, d’Égalité, de Fraternité, de Laïcité et de Solidarité. Ce parti populiste et illibéral qui n’a pour partenaires que les régimes autoritaires en Europe qui a modifié plusieurs fois ses positions en une semaine de campagne, n’est pas fiable et n’est pas majoritaire en France même s’il a su utiliser habilement les erreurs des dirigeants français de ces dernières décennies.
La troisième leçon concerne la gauche française. Elle a à nouveau montré que lorsqu’elle est capable de s’unir malgré sa diversité, elle fait la démonstration qu’avec un programme économique, social et environnemental orienté sur la lutte contre les inégalités et pour la justice sociale, elle est encore capable de provoquer l’enthousiasme du peuple de gauche. Contrairement à l’idée reçue, rabâchée à longueur de journée dans la presse bien-pensante aux mains des milliardaires, la gauche reste vivante en France même si elle n’atteint pas la majorité à l’assemblée.
Pour quel résultat ?
Au moment où j’écris ces quelques lignes nous ne connaissons pas encore les résultats définitifs et la configuration finale de la répartition des sièges au sein de l’assemblée. Mais il est déjà certain qu’aucun des groupes politiques importants ne dispose d’une majorité suffisante pour gouverner. L’objectif de clarification poursuivi par le président ne semble pas être atteint. Il fallait sortir d’une majorité relative menacée de blocage au vote du prochain budget. Nous nous retrouvons avec une assemblée qui ne peut donner qu’une majorité relative encore moins importante que la précédente.
Certains se mettent à phosphorer pour imaginer une coalition très large mais pour faire quoi ? Continuer la politique néolibérale poursuivie depuis au moins sept ans qui a été rejetée massivement et qui nous a mené dans le mur ?
Changer de politique pour répondre aux besoins des français est le seul moyen d’éviter de nous retrouver dans une impasse dans quelques mois. Le changement d’orientation est celui proposé par le NFP mais il n’est pas majoritaire.
Il n’est pas possible de dissoudre à nouveau l’assemblée avant un an soit pas avant le 8 juillet 2025.
Ne pas trouver le moyen de sortir du blocage probable risque de précipiter encore plus de citoyens dans les bras du RN lors des prochaines échéances électorales. Nous en saurons certainement plus dans les prochains jours ou les prochaines semaines !
Edgar Morin est sociologue et philosophe, directeur de recherche émérite au CNRS, docteur honoris causa de vingt universités à travers le monde. Ancien résistant et créateur du concept de « pensée complexe », il aura 103 ans en juillet. A l’occasion des élections législatives déclenchées par le président de la république, il vient de publier une tribune dans le journal le Nouvel Obs, afin de nous donner son analyse de la situation.
Une nouvelle configuration politique
Il estime que le président a pris des risques considérables avec la dissolution de l’assemblée nationale mais, paradoxalement, cela a suscité une sortie de léthargie, une revitalisation politique et une nouvelle configuration. En plein émiettement la gauche a pu constituer un Nouveau Front Populaire (NFP). A droite la crise des Républicains et de Reconquête a provoqué la polarisation autour du Rassemblement National (RN). Ces deux blocs écrasent le centre macronien.
Le RN issu du très antisémite Front National, dans sa nouvelle présentation, est devenu philosémite et pro-israélien. Sur l’Europe, le RN a évolué dans le sens de la modération en se déclarant respectueux des règles démocratiques. Il fait campagne sur le pouvoir d’achat mais reste ferme sur ses bases ultra-droitières : rejet de l’immigration et préférence nationale. Ses alliances européennes sont celles des pouvoirs autoritaires.
L’émiettement de la gauche a été surmonté dans le NFP mais essentiellement sur un « contre » (le RN et le macronisme) et non sur un « pour ». L’absence d’une pensée novatrice pèse sur l’avenir de la gauche. Il s’agit de « bâtir une nouvelle conception du monde, de l’homme, de l’histoire, qui viendrait renouveler celle de Karl Marx et combler un vide. Ce travail doit s’accompagner d’un renouveau générationnel et d’une réelle équité homme-femme permettant une réelle féminisation de la politique ». L’auteur de cette tribune dit attendre « la formulation d’une voie nouvelle qui lierait indissolublement réforme économique, réforme de l’État et réforme écologique. » C’est pour lui la condition indispensable pour que la gauche devienne un parti de gouvernement et de transformation. Néanmoins, malgré ses carences et ses fragilités, le NFP a sa sympathie critique et son soutien pour l’importance qu’il attribue à la lutte contre les inégalités et la reprise de l’initiative écologique.
Combattre l’antisémitisme
La guerre à Gaza a suscité un anti-israélisme accompagné d’un confusionnisme généralisé. La dénonciation du carnage de Gaza et du colonialisme israélien ne doit pas être considéré comme de l’antisémitisme. La critique d’Israél par le NFP n’est pas la négation de l’existence d’Israél et de son peuple. « L’oppression des Palestiniens sert aussi de prétexte à un nouvel antisémitisme qui doit être combattu. »
Le stupéfiant projudaïsme du RN, héritier du Front National (FN), ne peut que laisser sceptique même s’il a convaincu Serge Klarsfeld le chasseur de nazis. Il faut rappeler que le RN démocrate camoufle un FN autocrate. Il affiche sa proximité avec les régimes autoritaires et seul l’opportunisme lui a fait prendre ses distances avec le régime de Poutine.
Esprit de Résistance
La crise française de la démocratie fait partie d’une crise mondiale qui a généré divers régimes néo-autoritaires. Pour faire obstacle au RN il faut avoir un grand dessein d’où la nécessité d’une nouvelle pensée fondatrice, d’une nouvelle voie d’avenir, économique, sociale, écologique et d’une politique de réforme de l’État.
L’hégémonie mondiale du profit a provoqué la crise écologique planétaire. La guerre en Ukraine, la guerre israélienne, les potentiels conflits en Corée et à Taïwan font peser la menace d’une troisième guerre mondiale. Les périls intérieurs ne doivent pas nous rendre aveugles sur les périls extérieurs. Gardons notre lucidité face aux propagandes et hystéries collectives. « L’esprit de résistance nécessite la résistance de l’esprit ».
Je crois avoir été fidèle à l’analyse d’Edgar Morin que je trouve très pertinente en cette période d’inquiétude pour ne pas dire d’angoisse. Cette tribune est en accès libre sur le site du journal, je vous en ai livré l’essentiel pour vous donner envie de la lire intégralement. Bien s’informer c’est le début de la résistance.
En réfléchissant à cet article j’ai longtemps hésité sur le titre, plus précisément sur l’utilisation du mot ambiguïté ou du mot dissimulation. J’ai finalement décidé de les cumuler. Mon objectif est de parler d’un parti qualifié d’extrême droite par la majorité de la classe politique mais qui s’en défend.
L’habit ne fait pas le moine
Depuis plusieurs années la direction de ce parti a mis tout en œuvre pour démontrer sa normalisation. Sa volonté est d’être un parti comme les autres, respectueux de l’ordre républicain et se qualifiant d’être ni de gauche ni de droite, slogan qui a tant profité à l’actuel Président de la République. Les dernières élections législatives de 2022 ont permis à ce parti d’être représenté par un groupe de presque une centaine de députés. Ce groupe s’est appliqué à avoir une présence remarquable de modération dans le comportement verbal et vestimentaire.
Mais, comme le dit le vieux dicton populaire, l’habit ne fait pas le moine. Comme le défend l’éditorial du journal « Le Monde » du 23 et 24 juin 2024, « Aucune des manœuvres destinées à « dédiaboliser » ce parti ne peut faire oublier les racines antisémites et les obsessions raciales d’une mouvance dont le prétendu philosémitisme n’est que le paravent de la haine envers les musulmans. » Le point central du programme de ce parti est la xénophobie au travers de « la priorité nationale » qui contrevient au principe constitutionnel d’égalité de notre république et à la déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
Un évènement significatif
Lors de l’émission « envoyé spécial » un couple blanc, sympathisants de ce parti, a un comportement agressif à l’encontre de leur voisine, une aide-soignante noire. « Te voilà encore toi ? on t’a invitée ? non ! Tu dégages ! j’ai quitté les HLM à cause de gens comme toi » vocifère la femme. « On fait ce qu’on veut, va à la niche ! » La candidate à sa réélection dans la 11ème circonscription du Pas-de-Calais, ancienne présidente de ce parti et ancienne candidate à la présidence de la République, interrogée par « La Voix du Nord » estime que ce ne sont pas des propos racistes mais un simple conflit de voisinage. « La question est de savoir si “va dans ta niche” n’est pas une expression populaire de gens qui se détestent », « Est-ce que c’est raciste ? Moi-même, je peux le dire à l’égard de mes amis ! C’est vous qui tirez la conclusion que c’est raciste du fait de la couleur de peau de la victime. Ça, c’est scandaleux ! répond l’ancienne présidente du parti et met en cause une émission ultra politisée à l’extrême gauche. Si ce parti devait arriver au pouvoir, il est fort à craindre que ces comportements agressifs et racistes se multiplieront avec la certitude de ne pas faire l’objet de poursuite judiciaire. Faut-il rappeler que le racisme est un délit dans notre société civilisée ?
La politique et le droit
Ce parti met en cause l’état de droit en contestant les organes qui le garantissent comme le conseil constitutionnel, le conseil d’état, et l’indépendance de la justice en conspuant le gouvernement des juges. Il pense que la volonté de la majorité peut s’exonérer des grands principes de droit de la constitution et des droits de l’homme. Il s’attaque à la liberté de la presse et propose de privatiser l’audio-visuel public seul garant d’une information pluraliste et indépendante des grands groupes financiers qui contrôlent l’essentiel de la presse et de la télévision. S’il accède au pouvoir il fera supprimer le droit du sol. Il détruira ainsi un principe installé dans notre droit français depuis 1515. Même le gouvernement de Vichy n’avait pas voulu le remettre en cause. Son fond de commerce est l’immigration. Pour ce parti il suffit de bloquer l’entrée des migrants et mettre dehors tous les étrangers qui sont sur notre territoire pour régler tous les problèmes d’emploi et de sécurité. Si c’était si simple il y a bien longtemps que cela serait réglé en France mais aussi dans les pays voisins.
Qui sont ses alliés ?
Autre dicton populaire, « dis-moi qui tu fréquentes, je te dirais qui tu es ». Qui sont au niveau européen les mouvances que côtoie ce parti ? Observez ses alliances en Europe et dans le monde. Il se retrouve toujours avec les partisans d’un pouvoir autoritaire, de l’illibéralisme et même de nostalgiques du fascisme. Il fait preuve de complaisance avec les régimes autoritaires à commencer par la Russie poutinienne. Ce parti est un adepte du pouvoir autoritaire et comme tous ses homologues, une fois en place, il sera quasi impossible de le déloger démocratiquement. Après avoir prôné la sortie de l’Union Européenne et le départ du commandement intégré de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), vu l’expérience désastreuse du Brexit et la menace que fait peser la Russie sur la paix en Europe, ce parti a fait apparemment marche arrière. Mais cela ne l’empêche pas de prévoir des mesures contraires aux engagements de la France en Europe et de cultiver l’ambiguïté dans la guerre que mène la Russie contre l’Ukraine.
Des investitures qui contredisent sa normalisation
Enfin nombre d’investitures de ce parti à l’occasion des prochaines élections législatives contredisent sa normalisation. Nous pouvons trouver parmi ces candidats des gens qui s’intéressent de près à la France de Vichy, des coutumiers de l’usage de slogans antisémites, des amateurs de blagues racistes, de nombreux soutiens du Kremlin, des adeptes de théories du complot, des climatosceptiques, des militants ayant un passé au sein de groupes violents et identitaires, etc… Pour plus de détails il suffit de se reporter à la presse quotidienne de tout bord politique.
Un parti attrape tout
Ce parti d’extrême droite, à tout le moins populiste et souverainiste de droite radicale, proche des régimes illibéraux en Europe, dirigé par un clan familial depuis des décennies, est un parti attrape tout. Il fait des promesses tout azimut même si elles sont irréalisables et parfois contradictoires les unes par rapport aux autres. Avec un mouvement de va et vient où chaque jour de la campagne électorale voit des mesures adoptées ou retirées, modifiées ou reportées. L’important est d’attirer ses supposées clientèles électorales. Il a beau se déclarer prêt à gouverner, il est difficile de voir dans quelle direction tant à court terme qu’à long terme. Plus l’échéance électorale se rapproche plus les hésitations se multiplient. Sans parler des thèmes absents du programme de ce parti : le défi climatique et le recul de la biodiversité, le défi économique et social avec le développement des inégalités et l’hégémonie culturelle du néolibéralisme, le défi technologique avec la nécessité de mettre les technologies au service de l’humanité, le défi politique avec le retour de l’arme nucléaire, la souveraineté stratégique de l’Europe et la nécessité d’une gouvernance mondiale pour éviter le chaos géopolitique. Comment ne pas voir que dans le bouleversement du monde qui est en cours, l’isolement de la France sans l’Europe face aux puissances constituées par les États Unis et La Chine ne peut que nous affaiblir pour résister à leurs hégémonies.
Refuser de bouleverser l’équilibre démocratique
Nous vivons dans un pays démocratique quels que soient ses imperfections. Nous avons la chance de pouvoir donner notre avis sur la direction que doit prendre notre pays pour les cinq prochaines années, ce que beaucoup de pays nous envient. Même si le vote ne suffit pas à garantir la démocratie, il en est une composante indispensable. Ardent défenseur des droits humains, humaniste et universaliste, républicain et démocrate, partisan d’une république démocratique, fraternelle, sociale, laïque et solidaire, convaincu que l’égalité de toutes les femmes et tous les hommes reste un objectif fondamental de l’humanité, je vous invite à voter en conscience et ne pas contribuer par votre vote à porter au pouvoir un parti qui va bouleverser l’équilibre démocratique de notre pays et détruire les principes sur lesquels se fonde notre République.
A la veille des élections européennes les sondages prévoient une très forte abstention qui avoisine les 50%. Même si institutionnellement cela ne remet pas en cause la légitimité des élus, cela ne peut manquer d’inquiéter les démocrates.
Vote et démocratie
Quelle que soit l’élection, quand on sait combien de personnes ont risqué leur vie pour avoir le droit de voter et donner leur avis sur l’organisation de la société, il est indispensable de faire l’effort de se déplacer et d’aller participer à l’élection. C’est ce qu’on appelle faire son devoir de citoyen. En effet c’est un devoir par respect pour tous ceux qui nous ont précédés et qui se sont battus pour ce droit. Le vote est indissociable de la démocratie. L’organisation régulière d’élections est une condition nécessaire pour que l’on puisse parler de démocratie. Cette condition est nécessaire mais, certes, elle n’est pas suffisante. Il existe nombre de pays où le vote se déroule après que les opposants sont empêchés de se présenter au suffrage. Parfois le vote lui-même est entaché de fraudes avec le bourrage d’urnes et le non contrôle des listes électorales ou autre. Il est difficile, dans le cadre de cet article, de citer tous les vices de forme possibles, la liste serait trop longue.
Pour que le vote contribue au développement de la démocratie, il faut aussi qu’il soit universel, ouvert à tous les citoyens, homme ou femme, ayant atteint l’âge de raison, fixé en général à la majorité légale. Il faut qu’il soit transparent et que chacun soit informé et conscient des enjeux. Cela passe donc par l’organisation de cette information de la manière la plus objective possible et accessible à tous. L’organisation de débats contradictoires permettant la confrontation des différentes propositions est aussi essentiel à la réalité de cet exercice démocratique.
L’organisation d’élections périodiques aux différents niveaux de la structuration politique de la société (communes, départements, régions, parlement, etc…) doit être complétée par la liberté de conscience, la liberté d’expression, la liberté politique, la liberté d’entreprendre, la liberté syndicale, la liberté d’association, l’égalité des droits et des devoirs, l’existence de contre-pouvoirs.
Le plein exercice de la démocratie exige aussi la séparation des pouvoirs, entre le législatif, l’exécutif et le judiciaire. Le respect de ces principes est indispensable à la démocratie mais tout ne se trouve pas réglé pour autant puisqu’il existe une infinité de variations dans la concrétisation de ces principes. C’est le débat démocratique qui permet de trancher entre ces différentes possibilités.
Les enjeux des prochaines élections européennes
Nous sommes à la veille d’élections européennes que tous les candidats s’accordent à dire que ce sont probablement les plus importantes depuis la création de l’Union Européenne à la lumière des défis auxquels elle se trouve confrontée. Il est donc doublement important d’aller voter. Ce qui doit nous intéresser comme citoyens européens c’est ce que proposent les candidats pour faire face aux défis européens que nous devons affronter pour les cinq prochaines années. Ces défis sont européens dans un monde instable et en plein bouleversement et non pas nationaux, même si les choses ne sont pas indépendantes. Je veux simplement dire qu’il ne faut pas se tromper de cible. Il ne s’agit pas d’infliger une défaite à l’exécutif national mais de donner son avis sur les défis auxquels l’Union Européenne devra faire face. Ces défis sont d’ordre climatique, économique, politique, et technologique
Le défi climatique
La biosphère est un vaste système complexe autorégulé et autoreproducteur de régulations interdépendantes, dans la reproduction duquel la vie, et par conséquent l’espèce humaine, joue un rôle primordial. La biodiversité est compromise.
Les effets du changement climatique sont incontestables. La crise environnementale, la crise du développement, et la crise de l’énergie ne font qu’un. Cette crise n’inclut pas seulement le changement climatique, le recul de la biodiversité mais aussi d’autres problèmes liés à la croissance de la population mondiale.
Il est impératif de respecter l’Accord de Paris sur le climat et de maintenir le réchauffement planétaire en dessous de 2°C. Quels que soient les chiffres ou les courbes que l’on regarde les indicateurs sont tous au rouge. Mai 2024 est le mois le plus chaud jamais enregistré à l’échelle mondiale depuis le début des relevés.
Le dérèglement climatique est causé par la hausse continue des émissions de gaz à effet de serre liées à la combustion d’énergies fossiles, charbon, pétrole et gaz. Les prévisions publiées par l’Organisation météorologique mondiale confirment qu’il est probable que la température moyenne annuelle du globe franchisse le seuil de 1,5°C de réchauffement.
La rupture de l’équilibre entre la planète et les humains qui l’habitent fait ressortir notre immense responsabilité mais crée aussi l’opportunité de redéfinir notre rapport à la terre.
Le défi économique et social
Les inégalités culminent à des niveaux historiquement élevés. En moyenne les 10% des adultes les plus riches de la planète captent 52% des revenus mondiaux, lorsque 50% des plus pauvres s’en partagent 8,5%. Les disparités de patrimoine sont plus fortes que celles de revenus. La moitié la plus pauvre de la population mondiale ne possède que 2% de la richesse des ménages tandis que les 10% les plus aisés en détiennent 76%.
Les politiques néolibérales sont devenues culturellement dominantes et ont bouleversé le panorama des inégalités. La promesse néolibérale de dynamisation de la croissance par la baisse de la fiscalité des plus riches n’a pas marché. La théorie du ruissellement n’a pas généré la prospérité pour tous. Le recul des politiques de redistribution par la fiscalité a eu pour conséquence d’augmenter les écarts de revenus et de patrimoine au bénéfice des plus riches par rapport aux catégories sociales moyennes sans pour autant sortir du marasme les catégories les plus défavorisées.
Sans un rééquilibrage des taux de croissance du capital et du travail et sans une politique volontariste de redistribution par la fiscalité et les prestations sociales, les inégalités ne pourront que continuer à se développer. L’objectif premier de toute société démocratique est d’améliorer le sort de tous. Si les pouvoirs publics continuent de laisser le 1% de la population s’accaparer l’essentiel des richesses et mettre à contribution les classes moyennes et populaires, il laisse se développer une désespérance qui ne peut que nuire à la démocratie.
Le défi politique
L’affrontement monde capitaliste contre monde socialiste disparait progressivement et laisse la place à l’affrontement entre démocraties et autocraties. Les dirigeants chinois et russes ne cachent pas leur mépris du système démocratique qui est faible et incapable d’assumer des risques importants. Ils louent ensemble l’efficacité de leur système autocratique.
L’utilisation de l’arme nucléaire est aujourd’hui brandie comme possible. Depuis le début de l’offensive en Ukraine, le Président russe agite la menace nucléaire. Il a averti les pays qui s’opposeraient à son intervention qu’ils s’exposeraient à des conséquences « comme ils n’en ont jamais vu ».
L’Union Européenne doit prendre conscience qu’elle doit d’abord compter sur elle-même pour sa défense devant les orientations futures de la puissance américaine en direction de l’Asie. La guerre en Ukraine aide à cette prise de conscience qu’il n’est plus possible devant ce nouvel ordre du monde, s’il ne l’a jamais été, d’être uniquement dépendant des Américains. Les chars russes en Ukraine et une agression à ses frontières par une puissance nucléaire ont réveillé l’Union Européenne.
Après la crise sanitaire et maintenant la guerre à ses portes qui ont mis en évidence les faiblesses de l’UE et ses dépendances stratégiques, la souveraineté européenne et son autonomie stratégique sont une priorité incontournable.
L’envergure mondiale des différentes crises auxquelles nous sommes confrontées rend nécessaire, même si cela apparait complètement utopique, au moins une concertation de l’ensemble des pays de la planète. La réforme en profondeur du seul embryon de gouvernance mondiale existant aujourd’hui, l’ONU, semble indispensable. Il reste la seule institution légitime malgré ses faiblesses pour établir un véritable dialogue et affronter les problèmes qui se posent au monde dans un cadre universel démocratique et rénové.
Le défi technologique
La confiance aveugle envers les sciences et les techniques est une erreur, la défiance systématique en est une autre. Ce n’est pas la technique qui est en soit bénéfique ou maléfique, mais les usages qu’on choisit d’en faire. Nous devons rester vigilants quant aux possibles dérives, aux possibles mauvais usages des découvertes scientifiques. Aidons le plus grand nombre à comprendre, à avoir accès aux connaissances, pour que chacun ait les moyens d’un jugement approprié.
L’idée que l’humain peut détruire le monde terrestre et ainsi se détruire lui-même émerge et pose le problème des limites de l’activité humaine et de sa responsabilité vis-à-vis de la nature. L’humain est une partie d’un tout qui a la particularité d’être responsable de la conservation de ce tout. Nous devons prendre conscience de nos limites et développer un humanisme différent, un humanisme de la diversité. Plus que jamais l’homme a besoin des principes éthiques des Lumières pour mettre les sciences et les technologies au service de l’humanité et non l’inverse.
Pour conclure
Il est souvent reproché aux hommes politiques leur vision à court terme. Comme électeurs européens veillons à orienter notre vote en déterminant comment les différents candidats comptent faire face à ces grands défis que nous venons d’énumérer et quel type de société ils comptent mettre en œuvre. Ce sont les réponses à ces défis et les grands choix sociétaux qui en découlent qui détermineront l’évolution de notre avenir.
Ce mémorandum est le résultat du travail mené d’octobre 2023 à mars 2024 par un collectif de soutien à l’Ukraine, « More Arms 4 Ukraine, » et des experts des questions de défense. Il a pour objectif d’alerter l’opinion et d’engager avec les élus et les pouvoirs publics un dialogue sur la nécessité de fournir davantage d’armes à l’Ukraine, afin d’assurer la sécurité de notre pays et de l’Europe. Le 31 janvier, un appel à nos concitoyens inspiré de ce mémorandum et signé par un collectif d’officiers supérieurs et de personnalités de la société civile a été publié dans Le Monde : Guerre en Ukraine : « Il nous faut augmenter considérablement la production et la livraison d’armes françaises ».
Un danger existentiel et une réponse encore inconséquente
L’agression russe : un défi et un danger pour la France et l’Europe Depuis deux ans l’Ukraine fait face à une guerre d’agression menée par Vladimir Poutine, dont l’armée pratique à vaste échelle les viols, les tortures, les meurtres délibérés de civils et les déportations d’enfants. Depuis deux ans, à la surprise du monde entier, l’Ukraine démocratique et son armée ont repoussé l’envahisseur et libéré de nombreuses villes et villages, malgré une infériorité numérique et matérielle. La nature de cette guerre n’est pas territoriale, susceptible d’être durablement résolue par une cession de territoires, mais négationniste. La Russie nie l’existence d’une identité et d’une nation ukrainiennes pour incorporer son territoire, son peuple et ses ressources dans sa fédération. Ce sont les valeurs et les institutions démocratiques de l’Ukraine que la Russie veut détruire et la volonté du peuple ukrainien de faire partie de l’Europe qu’elle entend briser. C’est un défi qui est adressé à l’Europe et à la France. Ce défi recèle un danger majeur. L’Europe démocratique est le voisin le plus proche de Moscou. Six pays, la Finlande, l’Estonie, la Lituanie, la Lettonie, la Pologne, la Moldavie (dont une province sécessionniste la Transnistrie dispose de troupes Russes), ont une frontière avec la Fédération de Russie ou son satellite la Biélorussie, sans compter la Géorgie, candidate à l’adhésion à l’Union Européenne.
Une victoire totale ou partielle par un cessez-le-feu qui consacrerait le contrôle de la Russie sur le Donbass et la Crimée augmenterait significativement la menace russe sur les pays frontaliers. La Russie triomphante, une fois ses stocks d’armes reconstitués et accrus d’une panoplie d’armes nouvelles, serait en situation de reprendre son offensive contre Kyiv ou d’autres pays, Baltes, Finlande, Géorgie, Moldavie. Le risque d’un conflit de haute intensité impliquant inévitablement l’ensemble de l’Europe ne pourrait être exclu. Même en l’absence d’une telle conflagration, l’Europe serait soumise aux assauts répétés d’une guerre hybride que la Fédération de Russie pratique déjà. Les piratages informatiques de nos centres vitaux, les perturbations de la vie démocratique, en usant des réseaux sociaux et en soutenant des candidats affidés à la Russie aux élections (comme en Serbie) sont les signes avant coureurs de l’offensive qui se déploierait pour disloquer l’Europe. Chaque signe de faiblesse ou d’apaisement ne fait qu’allonger la guerre et les souffrances et ne conduit qu’à de nouvelles agressions. Une paix durable, non seulement en Ukraine, mais en Europe, n’est réaliste qu’en reconnaissant le seul but de guerre qui la rend possible : une victoire décisive de l’Ukraine, assurant le départ des troupes russes hors de son territoire, dans le respect du droit international. Les Ukrainiens, leur liberté est la nôtre, la formule utilisée par le Président Macron au lendemain du 24 février 2022 prend tout son sens, une fois compris l’enjeu géopolitique auquel l’Europe doit faire face.
Une aide militaire réelle mais tardive et insuffisante Alors que le conflit va entrer dans sa troisième année, la France doit évaluer rigoureusement, la pertinence de la stratégie et des moyens mis en oeuvre. Les déclarations répétées « La Russie ne peut, ni ne doit gagner la guerre », « Nous serons avec l’Ukraine aussi longtemps qu’il le faudra » et le 25 février « La défaite de la Russie est indispensable à la sécurité et à la stabilité en Europe » témoignent d’une intention, mais les phrases, même justes, ne suffisent pas. La stratégie européenne reposait d’abord sur les sanctions économiques qui devaient mettre l’économie russe à terre, réduire son approvisionnement en armes et ramener Poutine à la raison. Elles n’ont pas eu les effets escomptés, du fait de divers facteurs. Les partenariats militaires que la Russie a trouvés avec ses alliés totalitaires Iran et Corée du Nord, les accords commerciaux avec la Turquie, l’Inde et l’Afrique du Sud ont limité les dommages à son économie et assuré son approvisionnement en armes.
L’aide militaire fournie ou promise par les Etats-Unis, comme par l’Europe, a été trop hésitante et modeste pour exploiter les victoires de l’été 2022, trop tardive et limitée pour percer les défenses russes l’été dernier. Les atermoiements successifs sur les livraisons de chars, d’avions ou de moyens anti-aériens n’ont pas limité le conflit, ils l’ont fait durer et ont permis à l’armée russe de renforcer ses positions. Ils n’ont pas évité une escalade mais la rendent plus dangereuse comme l’ont montré l’écocide commis par l’explosion du barrage sur le Dniepr ou l’installation d’armes nucléaires balistiques russes plus à l’Ouest en Biélorussie. Cet hiver la situation est aggravée et appelle une intervention urgente. Comment l’Ukraine peut-elle se défendre sans munitions ou presque ? Comment détruire les dizaines de drones et de missiles qui mettent les villes à feu, à froid et à sang sans une complète couverture anti-aérienne ? Comment repousser les assauts russes et mener une contre-offensive victorieuse sans une artillerie, des blindés et une aviation supérieure en nombre et en qualité ? Or, l’aide militaire commence à faire défaut. Celle des États-Unis comme celle de l’Europe, freinée par ses méandres bureaucratiques et la lenteur de la mise en œuvre des investissements nécessaires, paralysée par les hésitations des chefs d’État et de gouvernements.
Les récentes déclarations du Président de la République et du Ministre de la Défense sont une inflexion bienvenue, mais insuffisante en regard des besoins requis par la défense et la libération de l’Ukraine.
Établir un Dispositif de solidarité industrielle et économique avec l’Ukraine
Si l’Ukraine est en péril, l’Europe l’est également. Aussi, une aide militaire de plus grande ampleur s‘impose et avec elle des mesures qui impliquent des priorités nouvelles et une organisation de l’économie adaptée. Ces mesures constituent un ensemble cohérent sous la forme d’un Dispositif de solidarité industrielle et économique avec l’Ukraine afin d’agir au plus vite dans cinq directions complémentaires :
augmenter significativement la cession, la fabrication et les livraisons d’armes et de munitions ;
donner des garanties aux industriels de l’armement qui fournissent l’Ukraine ;
se doter, avec nos partenaires européens, d’un organisme de contrôle pour assurer un embargo strict sur l’exportation des technologies duales ;
encourager la mutualisation des outils de production, civils et militaires, au service de la défense ;
mobiliser de nouvelles ressources financières en faveur de l’aide à l’Ukraine.
Mesure n°1 : doubler le budget de l’aide militaire à l’Ukraine pour l’année 2024 et le porter à 0,25% de notre PIB pour 2025, afin d’assurer le financement des cessions et de la production des matériels à destination de l’Ukraine, ainsi que la formation de ses soldats. Mesure n°2 : l’Ukraine n’est pas un client étranger comme les autres. Elle doit devenir prioritaire dans la production d’armes comme dans les livraisons parce que sa défense contribue à celle de notre pays. Mesure n°3 : les entreprises françaises doivent, selon leurs investissements, obtenir une garantie de 5 à 10 ans sur le volume de leurs commandes au bénéfice de l’Ukraine ou de la défense nationale. Mesure n°4 : un pool bancaire avec présence de l’État doit être créé, pour assurer les crédits aux PME et start-ups du secteur de la défense, particulièrement à celles qui doivent répondre à des commandes en provenance directe d’Ukraine. Mesure n°5 : aucun établissement bancaire ne doit pouvoir opposer une charte d’éthique aux demandes de financement des entreprises ou des associations pour l’Ukraine. Mesure n°6 : un emprunt national sera lancé ainsi qu’un livret d’épargne réglementé d’aide à l’Ukraine, sur le mode du Livret de Développement Durable, qui sera proposé à nos concitoyens afin de contribuer à financer l’augmentation des investissements des entreprises de la BITD. Ce livret permettra à nos concitoyens de s’impliquer dans le soutien à la démocratie ukrainienne. Mesure n°7 : un organisme européen doit être créé avec nos partenaires européens afin de contrôler les exportations de technologies duales (c’est-à-dire à usage civil et militaire) et une revue de celles-ci doit être organisée au plus vite afin de mettre totalement fin aux ventes à la Russie et ses alliés de biens, équipements et technologies duales.
Ce mémorandum est diffusé par l’association « Pour l’Ukraine, pour leur liberté et la nôtre ! – association loi 1901 » – les illustrations sont de la responsabilité de l’auteur du blog.