Information ou désinformation ?

La publicité utilise souvent l’expression « vu à la télévision » pour convaincre que le produit présenté est un bon produit. C’est sans doute pourquoi les milliardaires sont friands de contrôler les médias quelle qu’en soit la forme, presse quotidienne, radios, télévisions classiques ou d’information continue. Nous pouvons nous interroger sur les raisons de cet engouement pour les médias des grandes fortunes de ce pays. J’ai ma réponse mais elle pourrait vous paraître très subjective donc je me contenterai de vous donner quelques exemples vécus qui sont certainement fortuits (sic).

Trouver 44 milliards d’économie pour le budget 2026

Dans une chaîne d’information continue privée, lors d’une émission de grande écoute, à propos de la nécessité de réagir à l’endettement de la France, il est question du rapport de la commission sénatoriale sur l’utilité des aides publiques aux entreprises. Cette commission est présidée par un sénateur « Les républicains » et le rapporteur est un sénateur du « Parti communiste Français ». Elle évalue le montant de ces aides à 211 milliards d’euros en 2023.

Est-ce qu’il ne faut pas se tourner vers les entreprises pour alimenter les 44 milliards d’économie que veut faire le gouvernement ? demande l’animateur. Le débat s’engage et le rapport sénatorial, selon tous les journalistes présents sur le plateau, devient la position du sénateur communiste qui mélange des pommes et des poires et qui instrumentalise des chiffres pour des objectifs politiciens. En fait ces 211 milliards sont au mieux à réduire à 112 milliards. Le débat se termine sur l’affirmation qu’il faut cesser de s’attaquer aux entreprises qui sont sources de richesse et si l’on continue à stigmatiser les riches, les grandes fortunes quitteront le pays…

Il n’est dit à aucun moment que la commission a dû évaluer elle-même le montant des aides car aucun service de l’État n’a été capable de le faire. Aussi paradoxale que cela paraît le ministère de l’économie ne comptabilise pas ces aides car elles sont trop diverses. Le rapport du Sénat précise qu’il additionne aides directes, allègements fiscaux, allègements de cotisations sociales mais en excluant les aides des collectivités locales et les aides européennes. Donc le montant est probablement plus élevé. Non seulement l’État est incapable d’en chiffrer précisément le montant mais ces aides ne font l’objet d’aucun suivi. Le rapport du Sénat fait une série de propositions pour améliorer la situation. Sur le plateau aucun des participants ne trouve intéressant d’en parler. Ils oublient aussi de préciser que le rapport a été voté à l’unanimité des membres de la commission composée de membres appartenant à tous les partis politiques représentés au Sénat.

Mensonges par omission et dérives idéologiques caractérisent cette séquence.

Savez-vous que les dealers touchent des aides sociales ?

Autre exemple sur la même chaîne quelques jours auparavant. L’animateur, différent du précédent, interpelle le plateau « savez-vous que les dealers touchent des aides sociales ? » Tous les participants sont dubitatifs mais le débat s’installe et l’animateur insiste. Les dealers gagnent beaucoup d’argent non déclaré, donc ils peuvent bénéficier d’aides sociales. D’ailleurs un maire du sud vient de lancer une alerte et prendre des dispositions pour trouver une solution à cette anomalie. Là il ne s’agit pas d’une infox mais simplement de la manière de présenter les choses. Cette présentation est faite au milieu d’un débat sur l’importance des aides sociales en France. Le message implicite est que ces aides sont bien trop généreuses et sont à l’origine du déficit budgétaire auquel la France doit faire face. L’animateur pouvait simplement annoncer qu’on vient de s’apercevoir qu’il est possible d’avoir des aides sociales quand on a des revenus non déclarés ce qui est le cas notamment des dealers, ce que vient de dénoncer à juste titre un maire. Il n’est pas précisé au cours de l’émission l’importance relative de cette fraude ni si elle est quantitativement significative.

Une présentation sous forme de provocation qui permet de stigmatiser l’importance des aides sociales.

Les jeunes salariés se voient prélevés de 37% pour financer les retraites

Autre exemple, toujours sur la même chaîne qui débat de la dernière sortie du premier ministre accusant les « boomers » de léguer à leurs enfants et petit enfants la charge du remboursement de la dette. Cette fois-ci le plateau n’est pas unanime et estime globalement que les choses ne sont pas aussi simples. Difficile de mettre en cause les personnes âgées et de leur faire supporter des années d’erreurs collectives. Mais une journaliste s’enflamme et prétend que les jeunes salariés aujourd’hui, tout cumulé, se voient prélevés de 37% de leur salaire brut pour financer les retraites des « boomeurs ». Elle affirme la hauteur du prélèvement sans jamais apporter de détail sur ce calcul. Aucun des participants n’a posé une question relative à ce chiffrage qui ne me parait pas refléter la réalité. Aller dans le sens du chef du gouvernement et argumenter sans preuve pour opposer les français les uns contre les autres ne me semble pas très professionnel pour une journaliste. Le débat débouche sur la nécessité de réformer le système de retraite qui comme tous « les exorbitants avantages sociaux » sont à l’origine de la dette. C’est bien connu le déficit budgétaire sert principalement à payer les retraites. Des tableaux sont publiés pour le démontrer.  On oublie de préciser que le système de retraite du secteur privé est quasi équilibré et que les chiffres avancés par le gouvernement intègrent les retraites du secteur public qui pèsent directement sur le budget.

Pour le coup il est possible de se demander qui utilise des chiffrages non étayés pour justifier des objectifs politiciens ?

Pour conclure …

Ces quelques exemples n’ont pas la prétention de démontrer que toute l’information dans le pays est biaisée. J’aurais pu évoquer les médias du groupe Bolloré qui, en se prétendant presse d’opinion, prennent ouvertement faits et causes pour les thèses des partis d’extrême droite. Il s’agit simplement d’inviter nos concitoyens à réfléchir sur le fait que si c’est dit à la télé ou dans le journal, ce n’est pas forcément vrai. Il vaut mieux multiplier ses sources d’information avant de se faire une opinion. Malheureusement cela n’est pas possible pour tout le monde. Cela fait partie des nombreuses inégalités de notre monde.

Après Anchorage et Washington

Vous trouverez ci-dessous la réaction de l’association « Pour l’Ukraine »

L’Ukraine refuse le « Munich » glacial d’Anchorage.
Après le sommet de Washington, l’Europe doit faire bien plus pour défendre l’Ukraine. 
Le tapis rouge a remplacé la ligne rouge 
Quand Donald Trump accueillait Vladimir Poutine à la base aérienne d’Elmendorf avec tous les honneurs dus à un chef d’État respectable, il franchissait bien plus qu’un protocole diplomatique.
La ligne rouge des sanctions contre les pays achetant du pétrole russe s’est muée en tapis rouge pour un criminel de guerre.Dans cette mise en scène soigneusement orchestrée – limousine présidentielle, flatteries retrouvées, rituels du pouvoir – s’esquissait un processus de réhabilitation qui transforme les bourreaux en partenaires de négociation.
  Un criminel de guerre ne peut devenir un « partenaire respectable ». En traitant Poutine comme un interlocuteur légitime dans son spectacle arctique, Trump a franchi un seuil moral : celui qui sépare la reconnaissance des rapports de force de la banalisation du Mal.
Les crimes de guerre deviennent soudain des « différends » à résoudre, la déportation d’enfants un « problème humanitaire » à gérer, l’agression territoriale un « conflit » à pacifier. Cette alchimie sémantique, qui transmute la barbarie en sujet diplomatique, dessine les contours d’un ordre international et d’une réalpolitique où la violence organisée devient négociable – pourvu qu’elle dispose d’une force suffisante pour s’imposer. 

Le retour des 19 546 enfants déportés, dont seulement 1500 ont été rapatriés  : Voilà la 1ère ligne rouge absolue.Mais il y a aussi des centaines de milliers d’autres russifiés dans les territoires occupés. Ces chiffres résument à eux seuls l’ampleur d’un génocide culturel en cours, planifié dès avant février 2022.

Face à cette réalité, un point d’espoir émerge du sommet de Washington : Ursula Von der Leyen, Zelensky et Merz ont tous évoqué le sort des enfants.
L’initiative « People First » d’Oleksandra Matviichuk, Prix Nobel de la Paix et le combat qu’ensemble nous menons depuis l’été 2022 ont émergé  à Washington et rallient même des soutiens inattendus, y compris  Melania Trump et du bout des lèvres de son époux.

Les enfants ne peuvent être une « monnaie d’échange » dans des négociations. Leur retour doit être une condition non-négociable de tout accord avec la Russie, car il touche l’essence même de ce que l’Europe défend : la dignité humaine contre la raison d’État.
L’Ukraine refuse la capitulation munichoise.
Les négociations sont vouées à l’échec.  

Zelensky ne signera aucun document donnant à la Russie la souveraineté sur les territoires qu’elle revendique. Il ne renoncera pas non plus à une région que Poutine aurait exigé de voir capituler : La portion du Donbass qui reste hors du contrôle russe   contient certaines des lignes défensives les plus solides d’Ukraine. L’abandonner serait l’équivalent moderne des Accords de Munich que la Tchécoslovaquie fut contrainte de signer en 1938, par lesquels elle acceptait de céder ses régions frontalières critiques et ses défenses à l’Allemagne nazie. 

Poutine, de son côté, ne peut reculer sans mettre en cause l’essence même de son régime totalitaire.Cette guerre est existentielle pour les deux parties. Un régime néo-totalitaire est condamné à la guerre permanente par sa nature même. Un cessez-le-feu ne peut être établi que par un rapport de force favorable à l’Ukraine. Quant à Poutine il pourrait accepter une « pause » mais seulement sur la base d’une victoire militaire lui permettant de préparer la suite.  

La Coalition des Pays Volontaires : Enfin, mais insuffisante.
Le sommet de Washington a vu naître timidement ce que nous appelions de nos vœux depuis un an, une coalition des pays volontaires pour soutenir l’Ukraine . France, Allemagne, Royaume-Uni, Italie rejoints par les Baltes, la Pologne, le Danemark, la Suède, la Finlande, la Norvège, les Pays-Bas, la Tchéquie, la Roumanie, le Canada, les Baltes – cette force représente un potentiel considérable. Mais la réalité demeure cruelle : cette coalition reste supplétive d’une Amérique défaillante. Elle ne s’impose ni face à Trump ni dans les négociations. Malgré tout, un pas positif a été franchi qu’il faut saluer et amplifier d’urgence.
Car nous attendons bien plus de cette coalition :
L’appui déterminé au refus de toute cession territoriale
Confiscation immédiate des 200 milliards d’euros russes gelés en Europe. Les pays de la coalition qui détiennent plus de 120Md€ peuvent le faire conjointement et  sans l’accord de l’Union Européenne
Strangulation maritime : blocage de la flotte fantôme de tankers russes via le contrôle des détroits de la Baltique, de Gibraltar et de la Manche. Livraisons d’armes massives à l’Ukraine, prélevées sur les arsenaux européens ou achetées aux États-Unis.
Exigence publique du retour des enfants et de tous les prisonniers, civils ou militaires.
L’armée ukrainienne défend l’Europe. Alors que la Russie prépare de nouvelles agressions contre notre continent, cette évidence doit guider l’action. Dans ce moment historique, l’Europe doit choisir. Non entre paix et guerre – fausse alternative quand l’agresseur ne reconnaît que la force – mais entre existence et effacement. 
Agissez avec nous. Vous trouverez en pièce jointe une lettre type à adresser à votre député à partir de nos  tribunes publiées en juillet dans Libération et Ouest-France, toujours accessibles sur notre site avec leurs milliers de signataires 
Entre cynisme américain et attentisme européen, l’Ukraine face à un été meurtrier
L’été qui peut changer l’Europe
Signez notre appel Pour l’Ukraine

Pour en savoir plus, allez sur le site de l’association : pourlukraine.com

Est-il si difficile de trouver 44 milliards d’économie budgétaire ?


Selon le gouvernement « tout le monde devra participer à l’effort » pour participer à son plan de désendettement de la France. En théorie tout le monde passera à la caisse. Mais dans les faits le fardeau sera-t-il réparti entre tous les citoyens en raison de leurs facultés comme l’indique l’article 13 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ? Pour apporter des éléments de réponse à cette question voyons d’abord quelle est la situation de départ.

Le sénat et les aides publiques aux entreprises

La commission d’enquête sénatoriale sur l’utilité des aides publiques aux entreprises a rendu son rapport, mardi 8 juillet 2025. Cette commission était présidée par un sénateur « les Républicains » (LR) et son rapporteur était un sénateur communiste (PCF). Elle poursuivait trois objectifs :

  • établir le coût des aides publiques aux entreprises,
  • déterminer si elles sont correctement contrôlées et évaluées,
  • réfléchir à leur conditionnalité.

Les sénateurs ont notamment auditionné sous serment une trentaine de représentants des plus grandes entreprises françaises, d’une dizaine de services de l’État et d’institutions publiques.

évaluation du montant des aides publiques

La première constatation a été que le ministère de l’économie et des finances a été dans l’incapacité technique de répondre à une question aussi simple que celle du montant des aides publiques reçues par les entreprises. La commission a donc décidé d’évaluer elle-même ce montant. Il est évalué à 211 milliards d’euros en 2023 en additionnant aides directes, allègements fiscaux, allègements de cotisations sociales mais en excluant les aides des collectivités territoriales et les aides européennes.

établir un tableau des aides publiques aux entreprises

Le rapport préconise un « choc de transparence » en proposant la création par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) d’un tableau des aides publiques aux entreprises en fonction de leur taille reprenant à côté du chiffre d’affaires, du bénéfice net, du montant des dividendes, de la masse salariale, le montant total des aides perçues et l’impôt payé, ainsi que les diverses taxes acquittées.

réduire le nombre et rationaliser

La commission d’enquête est aussi favorable à un « choc de rationalisation » en créant un guichet unique afin de donner de la visibilité et conditionner les aides dès leur création.  Aujourd’hui les aides sont distribuées sans aucune condition. L’équivalent d’environ 7% du Produit intérieur brut (PIB) s’évanouit dans la nature et personne ne sait vraiment où va l’argent. Il faudrait s’assurer de l’efficacité de ces aides. Ces dernières poursuivent en effet des objectifs de politique publique – encourager la recherche, l’emploi des moins qualifiés, etc. – mais les servent-elles vraiment ? Difficile de le dire sans une procédure d’évaluation. Il existe près de 2200 dispositifs distincts. Il faudrait commencer par diviser leur nombre par trois d’ici 2030.

responsabiliser les entreprises

Les sénateurs suggèrent enfin un « choc de responsabilisation des entreprises ». Il faudrait, selon eux, interdire les aides et imposer le remboursement de celles-ci aux entreprises condamnées de manière définitive pour une infraction grave (fraude fiscale, travail dissimulé). Une entreprise qui délocalise devrait également rembourser les aides perçues durant les deux années précédentes. Enfin le montant des aides publiques (hors exonération de cotisations) devrait être déduit des bénéfices distribuables en dividendes.  

Les conclusions de la commission ont été adoptées à l’unanimité en dépit des camps politiques différents de ses membres. Elles ouvrent la voie à une évolution salutaire et consensuelle.

Les inégalités s’envolent

Les dernières statistiques publiées par l’Institut national de la statistique publique (INSEE) montrent un accroissement record des écarts de richesse. Sont en cause, les effets de l’inflation et des politiques publiques anti-redistributives du gouvernement.

un taux de pauvreté au plus haut

La pauvreté en 2023 n’a jamais été aussi importante en France depuis qu’on la mesure de cette façon, c’est-à-dire depuis 1996. Le taux de pauvreté a culminé cette année-là à 15,4% soit un pourcent de plus que 2022. Jamais la pauvreté n’a progressé aussi vite d’une année sur l’autre, y compris entre 2020 et 2021, en pleine crise sanitaire, ou entre 2008 et 2009, dans l’œil du cyclone de la crise financière. En 2023, 9,8 millions de personnes vivaient sous le seuil de pauvreté, à savoir 1 288 euros par mois pour une personne seule. C’est 650 000 personnes de plus qu’en 2022. Jamais le nombre de personnes pauvres n’avait été aussi élevé et jamais autant de personnes n’avaient basculé dans la pauvreté en un an. Et ces chiffres sont sous-estimés car les habitants des départements d’outre-mer, les ménages d’étudiants, les personnes sans domicile fixe ou encore ceux qui vivent en caravane ou en maison de retraite passent sous les radars. Ce qui veut dire qu’en 2023, le nombre total de pauvres est sans doute proche de 12 millions de personnes.

En 2023, les mesures exceptionnelles qui avaient été mises en place en 2022 pour protéger le pouvoir d’achat des ménages face à l’inflation n’ont pas été reconduites. Ce qui a tiré le taux de pauvreté à la hausse. Le taux de pauvreté des inactifs non retraités atteint 37,3 %. Les chômeurs ont vu leur durée d’indemnisation réduite de 25%, ils ont subi les effets de la réforme de l’assurance chômage entrée en vigueur le 1er février 2023. Leur taux de pauvreté augmente de 0,8 point et s’élève à 36,1%. Les familles monoparentales voient leur taux de pauvreté augmenter de 2,9 points, il est de 34,3%.

un français sur six en situation de pauvreté

Pour le Conseil national de lutte contre la pauvreté (CNLE) « un seuil d’alerte a été franchi. Nous ne sommes plus sur une stabilisation de la pauvreté à un niveau élevé, mais dans une dynamique de hausse ». Le collectif Alerte, qui rassemble 37 associations nationales de solidarité, constate que « le constat est dramatique et insupportable, avec près d’un français sur six en situation de pauvreté en 2023. »

les riches ne connaissent pas la crise

A l’inverse les riches ne connaissent pas la crise. Le niveau de vie plancher des 10 % les plus riches a augmenté de 2,1 %, et celui des 20 % les plus riches de 1,1 %, en euros constants. En 2023, les 20 % les plus modestes ont perçu 8,5 % de la somme des niveaux de vie et les 20 % les plus aisés 38,5 %, soit 4,5 fois plus. Si l’analyse porte sur l’évolution de ces indicateurs depuis 2017, le taux de pauvreté est passé en 6 ans de 13,7% de la population à 15,4% tandis que le niveau de vie plancher des 10% les plus riches s’est accru de 4,4%.

S’assurer que les plus fortunés ne se soustraient pas à l’impôt

A l’heure de la dérive des comptes publics et de l’explosion de l’extrême richesse sept prix Nobel d’économie, dans une tribune publiée dans « Le Monde », plaide pour la taxe ZUCMAN, c’est-à-dire pour la création d’un impôt plancher sur les patrimoines des milliardaires.

le taux d’imposition des plus fortunés est plus faible que le taux moyen

Les ultrariches ont des taux d’imposition plus faibles que ceux du contribuable moyen. Ils paient en France environ 0,1% de leur patrimoine en impôt individuel sur le revenu. En tenant compte de tous les autres prélèvements obligatoires et exprimés en pourcentage du revenu, leurs taux d’imposition sont plus bas que ceux des classes moyennes ou des cadres supérieurs.

Les grandes fortunes peuvent structurer leur patrimoine afin d’échapper à l’impôt sur le revenu notamment par la création de holdings familiales dans lesquelles les dividendes s’accumulent à l’abri du fisc. Cette situation est le produit de décisions humaines et de choix politiques.

plus de justice fiscale

Pour ces prix Nobel d’économie la proposition d’instaurer un impôt plancher pour les ultrariches, exprimé en pourcentage de leur patrimoine est efficace, car elle s’attaque à toutes les formes d’optimisation fiscale quelle qu’en soit la nature. Ce dispositif est nécessaire car il est difficile de demander des efforts à quelque catégorie sociale que ce soit avant de s’être assuré que les plus fortunés ne se soustraient pas à l’impôt.

En France, les députés ont voté, en février, en faveur de la création d’un impôt plancher de 2% sur les patrimoines supérieurs à 100 millions d’euros. Ce dispositif permettrait de s’assurer que les ultrariches contribuent aux charges communes dans les mêmes proportions que les français moyens. Les milliardaires français sont particulièrement prospères, ils possèdent en patrimoine l’équivalent de 30% du Produit intérieur brut (PIB) hexagonal. Même si les sénateurs ont fait obstacle à cette avancée, ce projet va dans le sens de l’histoire.

faire face au risque d’exil fiscal

Pour faire face au risque d’exil fiscal évoqué par certains, le texte voté par l’Assemblée nationale prévoit que les contribuables continueraient à être soumis à l’impôt plancher durant cinq années après leur départ. Ce délai pourrait être étendu à dix ans pour réduire encore davantage les risques d’expatriation.

Conclusion

Nous voyons que les pistes ne manquent pas pour trouver les 44 milliards d’économie budgétaire prévus par le gouvernement. Cet article ne prétend pas avoir fait le tour de la question mais simplement montrer par quelques exemples que la situation est le résultat de la politique menée depuis plusieurs années. Cette politique est le fruit de choix idéologiques, présentée comme la seule possible pour faire face à la situation du pays. Il n’est pas possible de continuer à imposer un discours incontestable dans ses présupposés comme dans ses conséquences, imposant ses décisions dans tous les domaines de la vie économique et sociale, et dans le même temps prétendre agir dans l’intérêt général et pour le bien être du plus grand nombre. Cette lecture idéologique présentée comme une « vérité » ne pourra que conduire la France à reproduire les mêmes erreurs qui se traduiront par une austérité qui sera non seulement injuste socialement, mais aussi contre-productive économiquement avec le risque de ne pas parvenir à réduire le déficit public autant qu’escompté.


État de droit et Démocratie

Plusieurs facteurs fragilisent les fondements de la notion d’État de droit, notion qui est intimement liée à celle de démocratie. Nous pouvons citer parmi d’autres la crise de confiance envers les dirigeants, l’influence des réseaux sociaux, les crises d’identité, le désengagement de l’État social, les inégalités croissantes, les restrictions de libertés individuelles au prétexte de l’équilibre sécurité/liberté, l’impact de l’intelligence artificielle… Chacun de ces éléments est l’occasion de remettre en cause l’État de droit et fait planer des menaces sur la démocratie.
 

Démocratie

Le mot vient du grec ancien, démos le peuple et kratos le pouvoir. C’est un régime politique où le gouvernement est assumé par le peuple et pour le peuple. Le pouvoir peut s’exercer directement ou par l’intermédiaire de représentants élus. Le terme désigne aujourd’hui tout système politique dans lequel le peuple est souverain. Il existe différents régimes qui se revendiquent de la démocratie et différentes conceptions de l’exercice de la souveraineté populaire. La démocratie repose sur deux piliers : un contrat social et la séparation des pouvoirs.

Le contrat social est l’accord implicite passé entre l’ensemble des citoyens et ceux qui exercent le pouvoir au sommet de l’État. Les citoyens consentent à céder une part de leur liberté en acceptant de se soumettre aux règles adoptées par leurs représentants régulièrement désignés. En contrepartie ces représentants s’engagent à exercer ce pouvoir dans l’intérêt de la société et dans le respect de règles qui définissent leurs compétences.

L’autre condition de la démocratie est la séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. Le législatif élabore les lois, l’exécutif est responsable de leur mise en œuvre, et le judiciaire en assure la bonne application. Chacun des trois pouvoirs doit être indépendant sans qu’aucun ne prédomine. Toute atteinte à la séparation et à l’équilibre des pouvoirs est une atteinte à la démocratie.

Le dénominateur commun des démocraties est l’existence d’institutions et de lois qui visent à protéger la population des dérives tyranniques ou dictatoriales que peut exercer une personne ou un groupe quelconque, y compris la majorité. Toute démocratie doit disposer de lois permettant aux citoyens de changer de gouvernement ou de projets politiques légalement, c’est-à-dire sans avoir besoin de recourir à la violence et en respectant les procédures définies par les lois.

L’État de droit

Comme dit Patrice SPINOSI, en introduction de son livre « Menace sur l’État de droit » publié en 2025 chez Allary Editions, l’État de droit n’est pas facile à définir. C’est un principe fondamental dans les systèmes démocratiques qui repose sur plusieurs éléments clés :

  • La primauté du droit : personne, y compris les gouvernants, n’est au-dessus de la loi.
  • La hiérarchie des lois : une norme inférieure doit toujours être conforme à celle qui lui est supérieure. Par exemple en France, un arrêté pris par un ministre ne peut contredire un décret pris par le Premier ministre, qui lui-même doit respecter la loi votée par le Parlement, laquelle ne saurait être en contradiction avec la Constitution.
  • La séparation des pouvoirs pour éviter une trop grande concentration du pouvoir.
  • La protection des droits fondamentaux : les droits et libertés des individus sont protégés par la loi, et toute violation de ces droits peut être contestée devant les tribunaux.
  • L’accès à la justice : tout individu doit avoir accès à un système judiciaire indépendant pour faire valoir ses droits.
  • Transparence et responsabilité : les gouvernants et les institutions doivent rendre des comptes pour leurs actions.
  • L’égalité devant la loi : tous les individus sont égaux devant la loi sans discrimination fondée sur l’origine, le sexe, la religion ou toute autre caractéristique.

L’action de l’État est soumise aux règles de droit et l’État lui-même est soumis à l’autorité des juges. Dans cet équilibre démocratique le juge est le garant institutionnel de l’État de droit qui protège d’éventuelles dérives d’instrumentalisation d’une majorité ponctuelle et veille au respect des valeurs fondamentales constituant le socle de la démocratie. L’État de droit restreint la puissance de l’État et garantit le respect des intérêts du corps social.

« Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution. » Cette idée qu’il y a non seulement des droits qu’on proclame mais qu’il faut des dispositifs pour les garantir est fondamentale, elle remonte à la Déclaration des droits de l’homme de 1789.

Après la seconde guerre mondiale, tirant les leçons de la montée du fascisme au XXème siècle, s’est développé en occident une culture démocratique qui a été construite sur l’idée que les gouvernants devaient respecter des valeurs et des principes supérieurs aux particularités nationales. Ces dernières années l’État de droit est devenu une cible dans un grand nombre de démocratie y compris en Europe.
 

Les attaques contre l’État de droit

Les critiques se sont multipliées chaque fois qu’intervient une décision de justice sensible en matière pénale, de droit des étrangers, de politique environnementale et même jusqu’à la régulation des fréquences de télévision. L’État de droit est une contrainte pour les policiers et certains magistrats confrontés au narcotrafic ou au terrorisme qui réclament des outils plus efficaces, pour des politiques qui veulent expulser des migrants plus facilement, pour des mouvements qui souhaitent réduire les protections des minorités … Les règles de l’État de droit sont perçues comme des obstacles placés devant la puissance publique et son efficacité immédiate.

Quand on commence à toucher aux droits fondamentaux de certains, cela concerne en fait les droits de toute la population. Au lieu de conforter nos principes, ils sont désignés comme responsables des troubles qui touchent la société dans le but de satisfaire une opinion légitimement inquiète.

L’État de droit est un bouclier pour nos libertés. Ce sont des règles qui fondent notre démocratie et que l’on s’oblige à respecter. Des règles légitimes fixées par la Constitution adoptée par le peuple souverain. Le respect des normes supérieures est la garantie d’une société démocratique.

L’État de droit c’est le respect de droits fondamentaux substantiels qui peuvent être aussi opposés à la volonté momentanée de la majorité. Cela implique l’adhésion aux droits fondamentaux et aux valeurs de la démocratie et l’instauration de mécanismes de garanties qui reposent sur le contrôle du juge constitutionnel. C’est le rôle du juge et de l’autorité judiciaire d’être un contre-pouvoir. Lorsqu’on met en cause la légitimité du juge, on fragilise l’ensemble du système et l’on risque la mise en cause des différents piliers de la démocratie.

La souveraineté du peuple

Selon Valéry « Le mot peuple désigne tantôt la totalité indistincte et jamais présente nulle part ; tantôt le plus grand nombre, opposé au nombre restreint des individus plus fortunés ou plus cultivés. » Ainsi le peuple est un ensemble d’individus qui sont soumis aux mêmes lois et vivant en société sur un territoire donné ayant en commun un certain nombre de coutumes et d’institutions. Mais cet ensemble n’est pas un bloc homogène, il est composé de différentes couches et catégories sociales.

L’État de droit est le plus souvent critiqué par des mouvements populistes. Ces attaques reposent sur une certaine conception de la souveraineté populaire. Les populistes exaltent la figure d’un « peuple-un » opprimé par les élites dont ils s’autoproclament les représentants authentiques. Ils privilégient la légitimité des urnes au respect de l’État de droit. Pour eux en cas de conflit entre la politique et le droit, c’est le peuple et donc l’élu qui doit l’emporter.

Pour les défenseurs de l’État de droit, le juge est le gardien des droits de l’individu. Il n’est pas élu mais il défend les droits des citoyens et assure ainsi une fonction structurellement démocratique. La souveraineté du peuple ne peut se réduire à une procédure électorale fondée sur le principe majoritaire (sans parler du nombre des abstentionnistes). Une société se définit aussi par les valeurs et les principes qui l’organisent. Les magistrats rendent la justice au nom du peuple parce qu’ils sont les gardiens d’une souveraineté populaire définie par les valeurs fondatrices du contrat social. Les juges incarnent, tout autant que les élus, le principe démocratique de la souveraineté du peuple.

Il ne faut pas confondre l’État de droit, un socle de règles intangibles, dont la séparation des pouvoirs ou l’égalité devant la loi, et l’état du droit que les parlementaires peuvent faire évoluer. Pour changer l’État de droit il faut, à la demande du peuple, remettre en chantier le contrat social qui a servi de base à la construction de la société et faire approuver le nouveau contrat par la plus large majorité du peuple. C’est une tâche de long terme qui n’est pas à la portée d’une majorité parlementaire momentanée et qui aurait la prétention de s’auto-instituer constituante.

Références bibliographiques :

« Le siècle du populisme » – Pierre ROSANVALLON – seuil 2020

« Menace sur l’État de droit » – Patrice SPINOSI – ALLARY EDITIONS 2025 

« Les ingénieurs du chaos » – Giuliano da Empoli – Folio 2024

Politique industrielle et Démocratie

Au-delà du chaos politique qui se déroule à l’assemblée nationale sans majorité politique claire, conséquence de la dissolution de l’assemblée nationale par le Président de la République le 9 juin 2024, le gouvernement français semble condamné à faire du sur-place. Les élections européennes ont donné des ailes aux différents groupements politiques d’extrême droite ou i-libéraux.

La situation internationale avec la victoire de Donald Trump aux élections états-uniennes est suspendue aux décisions erratiques du nouveau président de la première puissance mondiale. L’invasion de l’Ukraine par la Russie du président Poutine et la guerre au Proche-Orient ne diminuent pas l’incertitude du lendemain. Le monde mis en place au lendemain de la deuxième guerre mondiale, basé sur le droit international et le respect des frontières est progressivement remplacé par un monde basé sur les rapports de force.


Le déclin industriel

L’activité économique mondiale est considérablement ralentie. La mondialisation des rapports économiques est en pleine mutation. L’Europe n’échappe pas à ce phénomène et notamment la France.

Les fragilités de l’industrie française ne sont pas nouvelles et le contexte général dans une économie ouverte n’améliore pas les choses. Les annonces de fermetures d’entreprises et de suppressions de postes se multiplient. Le chômage remonte, les compétences et le savoir-faire se perdent. Les sous-traitants et les services de proximité subissent les conséquences. Même si la France est particulièrement touchée, le déclin industriel touche plusieurs pays européens. Les pays développés ont massivement externalisé leur production vers les pays où les salaires étaient faibles, les normes environnementales peu contraignantes et la fiscalité avantageuse. Les prix ont été poussés à la baisse pour les consommateurs. Les producteurs qui ne suivaient pas le mouvement étaient vite dépassés. Cette logique implacable est encore à l’œuvre aujourd’hui. Même l’industrie allemande, bien plus solide que la nôtre, vacille sous les assauts de la concurrence mondiale.

Les milliards d’euros d’argent public investis pour sauver le tissu industriel pendant la pandémie de la Covid-19 et la crise énergétique provoquée par la guerre en Ukraine, les plans de sauvetage européens décidés cet hiver, les concessions aux exigences des industriels qui sapent les normes environnementales, sociales et fiscales, ne permettent pas d’obtenir des résultats satisfaisants. Les réponses habituelles tournent autour de la compétitivité et l’emploi. Elles n’intègrent pas le nouveau contexte international où les rivalités géostratégiques, les objectifs de compétitivité et de sécurité prennent le pas sur la transition écologique et la cohésion de nos sociétés.

Le débat sur les finalités de la politique industrielle concerne toute la société et pas seulement les industriels. Si, comme l’a dit le PDG de LVMH, la gestion d’une entreprise est l’affaire de son dirigeant, le cadre dans lequel s’exerce cette entreprise est l’affaire de la collectivité dans le respect de l’intérêt général et du bien commun

Le décrochage

Enrico Letta, ancien président du conseil des ministres d’Italie et actuellement président de l’institut Jacques-Delors, dans un rapport présenté à l’Union Européenne, estime que l’économie européenne est en décrochage et que l’on ne peut plus attendre. Les puissantes forces de changement, qui couvrent la démographie, la technologie, l’économie et les relations internationales, exigent des réponses politiques innovantes et efficaces. Il propose des recommandations pour l’avenir qui devraient être mises en œuvre à la fois au niveau des institutions européennes, des États membres, des partenaires sociaux et des citoyens.

Mario Draghi, ancien président de la Banque centrale européenne, dans un rapport qui a aussi eu de larges échos, a esquissé une stratégie sur la base d’une analyse du positionnement international des entreprises européennes. L’économie européenne est condamnée à « une lente agonie » si elle ne change pas. Il plaide pour une politique européenne commune alors que les politiques industrielles restent nationales et peu coordonnées. La consolidation de l’appareil industriel européen et le développement de nouvelles filières rendent indispensable une coordination à l’échelle européenne. La rivalité pour les emplois et les subventions publiques risquent de générer des surcapacités et de conduire à des pertes financières et environnementales.

Ces deux rapports, même si nous pouvons en discuter certains aspects, vont dans le bon sens et ont l’immense mérite de tordre le coup au dogme de l’austérité budgétaire. Ils s’accordent sur le fait que l’Europe doit investir massivement si l’on ne veut pas devenir dépendants des États Unis et de la Chine. Reste à discuter des différentes visions sur le modèle de développement et des indicateurs de bien-être que l’on souhaite mettre en avant. Comme le propose par exemple Thomas Piketty « l’Europe doit au contraire saisir l’occasion pour développer d’autres modes de gouvernance et éviter de donner, une fois de plus, les pleins pouvoirs aux grands groupes capitalistes privés pour gérer nos données, nos sources d’énergie ou nos réseaux de transport. » Cela fait partie du débat démocratique.

Le déni du personnel politique et des économistes

Incapables de sortir des habitudes du passé une part de plus en plus importante du personnel politique semble s’éloigner des dangers que représentent la crise climatique et l’effondrement de la biodiversité. La transition écologique est repoussée à plus tard. Sont à l’ordre du jour les excès de normes, l’écologie punitive, les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur, la ré-autorisation d’insecticides dangereux, la croyance aveugle que les progrès technologiques nous permettront de surmonter les difficultés…

Les climatologues et biologistes ont beau avoir alerté la planète, pendant des décennies, qu’une catastrophe est en cours, et avoir répété qu’elle est forcément dévastatrice pour l’activité humaine, la science économique a continué à caresser ses modèles de croissance comme si de rien n’était. Les économistes hétérodoxes qui remettent en cause le système capitaliste, sont persona non grata dans la plupart des facultés d’économie, sans parler des grandes revues scientifiques. Le grand paradoxe, c’est qu’à l’origine la nature était au cœur de l’analyse économique. Au XVIIIe siècle, les premiers économistes étaient appelés les « physiocrates » pour qui toute richesse venait de la terre. Il est grand temps aujourd’hui pour la science économique d’opérer un retour aux sources, de proposer une compréhension synthétique et cohérente des différents enjeux écologiques dans la pensée économique et de travailler de façon pluridisciplinaire.

La réindustrialisation

Avec l’augmentation des tensions géopolitiques le fait de produire sur son sol les biens essentiels est un gage d’autonomie et protège les acquis économiques et sociaux. Dans un monde aussi interdépendant, la réindustrialisation présente des synergies et des contradictions. Produire plus ? Quoi et comment ? Assouplir les normes ? réduire les délais liés aux expertises environnementales ?

Une politique industrielle dirigée vers la transition écologique peut permettre de produire sur le sol français ou européen les biens indispensables avec des standards plus élevés. La réindustrialisation respectueuse des limites physiques de la planète suppose une planification démocratique des besoins, des arbitrages, et une politique industrielle mise au service d’un projet de société écologique.

L’industrie peut être un levier stratégique puissant si elle est pensée à la hauteur des défis du XXIème siècle. Pour cela il faut un cap clair orienté vers la transition écologique et la sobriété, des mécanismes de financement et de commandes publiques à la hauteur, une gouvernance démocratique qui associe les territoires et les parties prenantes et une Europe capable d’articuler concurrence et coopération entre États membres. Plutôt que de répliquer les logiques du passé, il s’agit de faire de la réindustrialisation un vecteur de transformation de nos systèmes productifs.

Penser que nous resterons compétitifs en demeurant totalement ouverts est une illusion. Par exemple dans le domaine des technologies de décarbonation, les producteurs chinois pratiquent des prix de dumping du fait d’une surproduction. Comment les entreprises françaises pourraient émerger et rester concurrentielles sans changer notre approche ? Sans la mise en place d’une politique anti-dumping nous peinerons à faire apparaître de nouvelles activités en Europe.

L’État subventionne les entreprises afin de soutenir l’activité, l’innovation et l’emploi. Ces aides sont insuffisantes pour orienter vers une économie durable et plus inclusive. La plupart des allègements fiscaux et sociaux sont accordés automatiquement et ne permettent pas de s’assurer que les incitations produisent les effets escomptés. Les subventions doivent permettre un meilleur ciblage des projets et être directement liées aux objectifs définis par la puissance publique. Les entreprises doivent contribuer activement aux objectifs collectifs de croissance durable et inclusive.

L’économie n’est pas une science neutre

Pour conclure nous voyons bien que l’économie n’est pas une science exacte ni une science neutre. Elle fait partie des sciences humaines. Elle nous aide à comprendre et agir sur le monde pour le progrès de l’humanité. L’histoire de la science économique est un balancement entre connaissance et action.

Les indicateurs que nous choisissons de privilégier, production, emploi, satisfaction des besoins sociaux, soutenabilité écologique, sont toujours porteurs d’une vision du monde et d’un projet de société. Il n’est pas possible pour les économistes orthodoxes de continuer à imposer un discours de nature transcendante, incontestable dans ses présupposés comme dans ses conséquences, imposant ses décisions dans presque tous les domaines de la vie sociale. Et dans le même temps, prétendre agir en fonction de principes fondamentalement humanistes sur le plan individuel et démocratiques sur le plan collectif.

La réaffirmation de l’humanisme passe donc inévitablement par une réflexion critique sur la question économique. Depuis plus d’un siècle, on veut enfermer l’homme dans des schémas économiques théoriques, transformant l’humain en capital, voire en matériel. Retrouver tout le sens de l’humain est un enjeu majeur pour dépasser un siècle d’aliénation.

Pour René PASSET, professeur émérite d’économie à l’université de Paris, quand l’économie se trouve confrontée aux questions du « trop » et des inégalités de répartition, la question des finalités fait surface. Lorsque le « plus » cesse de constituer le critère du « mieux », on voit surgir la question du « pourquoi », c’est-à-dire des finalités.

Références bibliographiques :

  • Revue HUMANISME n° 291 Février 2011 – dossier « L’économie contre l’humanisme »
  • René PASSET – « les grandes représentations du monde et de l’économie à travers l’histoire » – éditions les liens qui libèrent – 2010
  • « Comprendre et agir sur le monde pour le progrès de l’humanité » Maurice Abitbol – blog citoyen- changer de monde -2020
  • « Des idées nouvelles pour l’Europe », Enrico Letta – Odile Jacob – 2024
  • « Les nouvelles règles du jeu », Georges Papaconstantinou et Jean Pisani-Ferry – Seuil – 2024
  • « Le monde confisqué » Arnaud Orain – Flamarion – 2025
  • « Le capitalisme de l’apocalypse » Quinn Slobodian – Seuil – 2025
  • La revue trimestrielle « L’Économie politique », co-édité par « Alternatives Économiques » et « l’Institut Veblen pour les réformes économiques », numéro 106 de mai 2025 « Réindustrialiser pour quoi faire ? ».
  • Divers articles sur la réindustrialisation en France et en Europe du journal « Le Monde », de la Revue « Le Grand continent » et de la revue « Alternatives économiques ».


 
 

Faire face à la montée des extrêmes

Afin de déterminer le rôle que devraient assumer les humanistes universalistes face à la montée des extrêmes, nous allons présenter dans un premier temps le contexte actuel du monde et de l’Europe. Dans un deuxième temps nous examinerons les valeurs sur lesquelles repose l’humanisme universaliste. Pour terminer nous aborderons le rôle qu’il peut tenir dans la bataille des idées.

Le contexte actuel du monde et de l’Europe

L’énoncé des évènements de ces dernières années ne poussent pas naturellement à l’optimisme. La pandémie du Covid 19, le changement climatique, le recul de la biodiversité, le bouleversement de l’ordre du monde, la guerre en Ukraine, le risque d’un retour de la guerre en Europe et de la menace atomique, la guerre au proche orient, la résurgence des totalitarismes, le retour des attentats, la forte concentration des richesses, l’accroissement des inégalités, le développement de l’insécurité sociale… et cette énumération n’est malheureusement pas exhaustive. Le monde se transforme à très grande vitesse. Les bouleversements sont multiples à tous les niveaux. Les défis auxquels la planète se trouve confrontée sont d’ordre climatique, économique, politique, et technologique. Les problèmes sont universels et les réponses sont fragmentées. Aucun pays seul ne peut faire face à chacun de ces défis.

L’année 2024 a vu se dérouler plusieurs dizaines d’élections en Europe et dans le monde. Le parlement de l’Union Européenne a connu une forte poussée des extrêmes en même temps que des changements de majorité allant dans le même sens dans les pays membres. La nouvelle administration américaine met en application ce que le nouveau président avait annoncé durant la campagne électorale. La politique d’alliance en vigueur depuis la fin de la deuxième guerre mondiale est remise en question. « L’América first » et le « Make América Great Again » remettent en cause tous les équilibres que l’on croyait acquis. Après une longue période de paix nous vivons une période d’instabilité dont il est difficile de voir l’aboutissement. Les États Unis et la Chine ne séparent pas intérêts économiques et intérêts géostratégiques. La Russie ne rêve que de reconstituer son empire passé. Les européens, s’ils veulent éviter la vassalisation et vivre dans un monde façonné par d’autres, doivent faire de la souveraineté européenne et son autonomie stratégique une priorité incontournable.

La montée des extrêmes, qu’ils soient politiques, religieux ou idéologiques, constitue l’un des défis majeurs auxquels l’Europe est confrontée aujourd’hui. Les extrêmes se caractérisent souvent par un rejet de la complexité du monde, un refus du dialogue et une tentation de simplifier les enjeux sociétaux. L’antisémitisme et le racisme antimusulman sont utilisés comme un moyen de mobiliser la colère et justifier des actions radicales.

Comme disent certains, nous pouvons constater qu’il règne aujourd’hui « une atmosphère » de populisme. L’ère du temps est marquée par l’effacement des vieux partis devant de nouveaux mouvements politiques formés dans le sillage d’une personnalité dont ils accompagnent l’ascension. Le désenchantement démocratique contemporain s’inscrit dans la culture politique diffuse du populisme. De grands thèmes populistes comme l’appel au développement des référendums et la philosophie nationale-protectionniste imprègnent beaucoup plus qu’avant des sociétés en panne de projets de solidarités. Les différentes passions populistes irriguent les esprits dans les démocraties fragilisées du XXIème siècle, cela évite de se confronter à la complexité du monde réel.

C’est devant cette complexité du monde que se trouve confrontée l’humaniste universaliste.

Les valeurs humanistes universalistes

Les humanistes universalistes, héritiers de la culture des Lumières, porteurs des valeurs humanistes, sont au cœur des débats sur la démocratie, la tolérance et la liberté. Depuis leur émergence au XVIIIème siècle ils ont toujours été des acteurs engagés dans la promotion des valeurs de raison, de fraternité et de progrès social. Ils ont pour principe la liberté de conscience. Ils considèrent la morale comme indépendante de toute religion ou conception métaphysique et estiment que les conceptions métaphysiques relèvent du domaine exclusif de l’appréciation individuelle de chacun. Ils se refusent à toute affirmation dogmatique. Chacun doit se libérer de tout préjugé et apprendre à penser, à juger, à décider par lui-même en appliquant la maxime d’Emmanuel Kant : « Sapere Aude », pense par toi-même.

Les humanistes universalistes sont redevables aux Lumières pour les plus belles de leurs valeurs, celles qui les incitent à s’améliorer et à améliorer le monde qui les entoure, la tolérance religieuse, une vision égalitaire des êtres humains et de tous les peuples.

La philosophie humaniste considère que l’humanité est source de toute valeur et que tous les êtres humains ont une valeur égale. L’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Les dissemblances individuelles, les appartenances diverses, les langues, les différences sociales ne doivent pas être un obstacle à rassembler dans une perspective émancipatrice. L’universel n’est pas l’ignorance de la pluralité humaine. Le projet humaniste est de dépasser les singularités par la mobilisation de tous pour œuvrer à la construction d’une humanité plus éclairée.

La société est le fruit d’un travail guidé par la loi que les humains se donnent. Cette loi évolue dans le temps, elle peut être abolie, modifiée, remplacée. L’avenir n’est jamais écrit de manière définitive. C’est sur base de ces valeurs et dans la perspective de la construction d’une société plus éclairée que les humanistes universalistes doivent envisager leur action.

Participer à la bataille des idées

Dans ce début de XXIème siècle marqué par un horizon menacé par la tempête, l’on assiste à ce qui semble être le triomphe des obscurantismes, du relativisme culturel, du tribalisme, de l’ethnicisme et de la réhabilitation de la notion de « race », la montée des extrêmes, le développement du populisme, le bouleversement de l’ordre du monde, le retour des empires et de la loi du plus fort. Face à cette évolution, il est indispensable d’accompagner toutes les pensées qui résistent à la résignation par une volonté d’action.

Les humanistes universalistes doivent promouvoir les principes auxquels ils sont attachés pour dépasser l’inquiétude suscitée par l’évolution du monde. Nous devons nous mobiliser quotidiennement pour RESISTER :

  • Résister aux atteintes à la liberté de conscience en restant fermes face à la radicalité et l’extrémisme religieux
  • Résister en combattant l’ignorance et le fanatisme
  • Résister en luttant contre toutes les discriminations, la xénophobie, l’antisémitisme et toutes les formes de racisme
  • Résister aux périls identitaires par la promotion de l’universalisme dans le respect de la diversité humaine et le refus de tout communautarisme.
  • Résister aux mises en cause de la démocratie
  • Résister à ceux qui restent sourds au changement climatique et à la destruction de la biodiversité
  • Résister au développement des inégalités

En un mot résister pour défendre l’émancipation de l’être humain dans une société démocratique, laïque et sociale, plus juste et plus éclairée. Une société qui concrétise notre devise républicaine : « Liberté, Égalité, Fraternité ». Une société qui respecte la Laïcité comme principe fondamental et qui place la loi des humains devant toute éventuelle loi divine. Une société qui garantit la liberté de conscience pour tous.

C’est par cette action de résistance pour promouvoir un monde meilleur que nous pouvons dépasser l’inquiétude que ne manque pas de susciter l’évolution du monde. Nous ne pouvons pas nous contenter de n’être qu’une philosophie de l’incantation. Nous ne nous résignons pas, nous ne croyons pas en la fatalité du monde. Nous nous devons d’être une philosophie de réflexion critique, de l’engagement, de l’émancipation et du souci du bien commun.

Notre République laïque en berne

Cet article m’a été communiqué par Bénédicte DUPONT. Elle en est l’autrice et a autorisé sa publication. Partageant son analyse, je m’y associe pleinement.

Dans les moments de deuil national ou international, il est courant de voir les drapeaux tricolores mis en berne en signe de respect et de solidarité. Cependant, il est important de se demander si chaque hommage rendu est aligné avec les valeurs fondamentales de notre République laïque.

Récemment, le premier ministre a décidé de mettre les drapeaux tricolores en berne en hommage au pape. Ce geste hautement symbolique soulève des questions importantes sur ce que nous choisissons, d’honorer et de respecter et pourquoi.

Il est essentiel de rappeler que ce monarque était connu pour ses positions traditionnelles anti-IVG « Un avortement est un homicide. Les médecins qui font cela (…) sont des tueurs à gages », homophobe et pour avoir trouvé des excuses aux auteurs des attentats contre nos amis et camarades de Charlie Hebdo « On ne peut provoquer, on ne peut insulter la foi des autres. On ne peut pas la tourner en dérision ! ». Le progressisme apparent de l’Église sous son pontificat cache en réalité un piège rhétorique, où l’ouverture vise finalement à consolider un ordre moral traditionnel. Son héritage sera celui d’un conservatisme déguisé en modernité. L’idéologie traditionaliste demeure inchangée et rigide, dissimulée sous le masque trompeur d’une Église feignant d’évoluer, mais qui ne s’est toujours pas complètement débarrassée de ses membres amateurs du port de la soutane entre les dents.

Néanmoins, dresser le bilan de ce pontificat est l’affaire des catholiques. En qualité de citoyenne de la République française, cette décision de l’État invitant à porter le deuil d’un chef religieux me heurte. Notre pays, fondé sur les principes de liberté, d’égalité et de fraternité ne devrait pas honorer ceux qui vont à l’encontre de ces valeurs. La laïcité, pierre angulaire de notre société, nous protège de toute contrainte religieuse ou idéologique.

Mettre les drapeaux en berne pour un tel personnage et pour le symbole qu’il représente est un coup porté à toutes celles et tous ceux qui se battent à travers le monde pour les droits humains, pour la liberté d’expression et pour l’égalité. La France n’est plus la fille aînée de l’Eglise depuis la Révolution française. Il faut que nos gouvernants et nos élus le comprennent, quelles que soient leurs convictions personnelles. Puisse notre République en être un phare de liberté.

Laissons flotter au vent de la liberté les drapeaux tricolores aux frontons des édifices publics ! 

Ne laissons pas un nouveau « Munich » décider du sort de l’Ukraine !

Le 24 février prochain marquera le triste anniversaire de la 2e invasion russe de l’Ukraine. Depuis trois ans, le peuple ukrainien résiste héroïquement face à une agression d’une violence inouïe. Malgré les destructions systématiques de ses infrastructures vitales et le coût humain dramatique, l’Ukraine continue de se battre pour sa liberté – et pour la nôtre. Aujourd’hui plus que jamais, c’est l’heure de l’Europe. Face au désengagement américain et au risque d’un nouveau Munich, l‘Union Européenne doit prendre ses responsabilités historiques. Notre continent ne peut plus se contenter de demi-mesures : il doit apporter à l’Ukraine l’aide décisive qui lui permettra de vaincre.

Nous appelons à une mobilisation urgente pour :
La confiscation et le transfert à l’Ukraine des 200 milliards d’euros d’avoirs russes gelés en Europe
La protection effective du ciel ukrainien par la fourniture massive de systèmes de défense anti-aérienne
Le déploiement d’une force européenne pour sécuriser la frontière avec le Bélarus.
Le retour impératif des enfants ukrainiens déportés en Russie, condition non négociable de tout accord futur (Signez notre appel)  

Pour échanger sur ces enjeux cruciaux et coordonner nos actions, je vous invite à nous rejoindre :
– Le 21 février à 18h pour une réunion en ligne sur Zoom « Riposte au nouveau Munich » avec Sylvie Rollet (Présidente de Pour l’Ukraine…) Olivier Védrine, Alexandre Melnik et plusieurs orateurs. Pré-inscrivez-vous.
– Le 23 février à 14h à Paris, Place de la République, pour une grande manifestation de soutien. Retrouvons pour défiler avec l’association- Le 24 février pour des rassemblements dans toute la France
– Le 27 février 18h à Sc-Po Rennes pour une conférence sur les déportations d’enfants ukrainiens avec Me Gabriel Sebbah et Pierre Raiman  

L’Ukraine peut gagner cette guerre avec notre aide. Ne la décevons pas. Ne nous décevons pas.

Bien cordialement,   Pierre Raiman cofondateur de Pour l’Ukraine, pour leur liberté et la nôtre !  

C’est une communication de l’association « Pour l’Ukraine, pour leur liberté et la nôtre » que je me fais un devoir de publier. Notre solidarité et notre soutien est la seule réponse à la capitulation que veut imposer le nouveau pouvoir des États Unis d’Amérique.

Les inégalités se creusent

La direction générale des finances publiques (DGFiP) vient de publier une étude sur les revenus et le patrimoine des foyers les plus aisés. Cette étude confirme que les ultra-riches deviennent d’année en année encore plus riches et que les inégalités se creusent.

Étude portant sur les revenus les plus élevés

L’étude porte sur les 40700 foyers fiscaux qui disposent des revenus les plus élevés. En 2022, pour faire partie de ce groupe, il fallait avoir déclaré un revenu annuel d’au moins 463 000 euros. En moyenne ces foyers avaient déclaré un revenu d’un peu plus de 1 million d’euros à comparer aux 32 000 euros gagnés en moyenne par les autres foyers, soit trente fois plus.

L’écart se creuse

Entre 2003 et 2022, le revenu moyen de ce groupe, un dixième du décile supérieur de la population (10 % des revenus les plus élevés), a augmenté de 119% soit plus que doublé.  Les neuf dixième suivant du décile supérieur ont vu aussi augmenter leurs revenus de 79%. Pour le reste de la population, neuf foyers sur dix, les revenus n’ont pas augmenté de plus de 39% sur la même période.

L’étude montre que depuis 2003 le revenu des ultra-riches a augmenté de 3% par an hors inflation et celui des autres français a progressé de 0,5%. L’écart se creuse. Même à l’intérieur des foyers aisés cet écart se creuse.

D’où viennent ces revenus ?

Pour le groupe des plus aisés, les traitements et salaires représentent 35,5% du total. Les dividendes et les plus-values tirés des capitaux dont ils sont propriétaires constituent 47% et les bénéfices des entreprises qu’ils détiennent 10,5%. Leur patrimoine foncier n’intervient que pour 3%.

Pour le reste des contribuables les revenus des capitaux mobiliers pèsent très peu (2%). Ce sont les traitements et salaires qui constituent l’essentiel des revenus (63%).

Accroissement des inégalités

Selon les auteurs de l’étude, en 2022, les 10% de ménages les plus aisés reçoivent ensemble 34,1% des revenus de tous les français, contre 32,4% en 2003. C’est l’enrichissement des 10% des foyers les mieux dotés qui explique l’accentuation des inégalités.

Le patrimoine immobilier des foyers les plus aisés a augmenté de 18% entre 2017 et 2022. Ces foyers sont très majoritairement propriétaires de leur habitation principale.

La fiscalité est là pour corriger cette situation. Mais sur les années étudiées, le taux réel d’imposition s’est alourdi pour les 50% les plus pauvres de même que pour les 9,9% les plus aisés. Pour les autres il a au contraire baissé. C’est le cas notamment des 0,1% les plus riches dont le taux moyen a été ramené de 29,3% à 25,7%.

Pour conclure

Que peut-on déduire de cette note du Ministère de l’économie et des finances ?

  • Les revenus des très riches s’envolent
  • Il y a enrichissement des riches et appauvrissement des pauvres
  • Les inégalités se sont creusées en 20 ans
  • Pour le patrimoine c’est le grand écart entre le « top 0,1% » et les autres

Avec un tel constat, la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, prévue dans le projet de budget, est bien la moindre des choses.

Quand on annonce dans la presse le même jour que 10 millions de français ont des problèmes pour terminer la fin du mois et que les entreprises du CAC 40 distribuent 98 milliards de dividendes au titre de l’exercice 2023, il y a de quoi s’interroger sur le respect de notre devise républicaine qui orne les frontons de nos mairies : Liberté, Égalité, Fraternité.

La réaction du français le plus riche de France qui s’indigne de l’augmentation des impôts sur les sociétés, est pour le moins indécente. Il préfèrerait sans doute que le coût de la crise budgétaire soit supporté par les plus pauvres ?

Comme le dit la directrice générale de l’ONG Oxfam France, dans une tribune dans le journal « Le Monde », la milliardocratie, c’est-à-dire le pouvoir des milliardaires, constitue la menace ultime contre la démocratie.

Une situation paradoxale

Il est devenu banal de dire que le monde se transforme à très grande vitesse. Les bouleversements sont multiples à tous les niveaux. Les défis auxquels la planète se trouve confrontée sont d’ordre climatique, économique, politique, et technologique. Les problèmes sont universels et les réponses sont fragmentées. Aucun pays seul ne peut faire face à chacun de ces défis.

Le défi climatique

La biosphère est un vaste système complexe autorégulé et autoreproducteur de régulations interdépendantes, dans la reproduction duquel la vie, et par conséquent l’espèce humaine, joue un rôle primordial. Nous constatons chaque jour que la biodiversité est compromise.

Les effets du changement climatique sont incontestables. Quels que soient les chiffres ou les courbes que l’on regarde, les indicateurs sont tous au rouge. L’année 2024 est la plus chaude jamais enregistrée à l’échelle mondiale depuis le début des relevés.

Le dérèglement climatique est causé par la hausse continue des émissions de gaz à effet de serre liées à la combustion d’énergies fossiles, charbon, pétrole et gaz. Les prévisions publiées par l’Organisation météorologique mondiale confirment qu’il est probable que la température moyenne annuelle du globe franchisse le seuil de 1,5°C de réchauffement, maximum fixé par l’accord de Paris.

La rupture de l’équilibre entre la planète et les humains qui l’habitent fait ressortir notre immense responsabilité mais crée aussi l’opportunité de redéfinir notre rapport à la terre. Force est de constater que ce défi n’est pas considéré comme une priorité au niveau de la planète.

Le défi économique et social

Dans les démocraties les inégalités culminent à des niveaux historiquement élevés. Les disparités de patrimoine sont plus fortes que celles de revenus. Les politiques néolibérales sont devenues culturellement dominantes et ont bouleversé le panorama des inégalités.

La promesse néolibérale de dynamisation de la croissance par la baisse de la fiscalité des plus riches n’a pas marché. La théorie du ruissellement n’a pas généré la prospérité pour tous. Le recul des politiques de redistribution par la fiscalité a eu pour conséquence d’augmenter les écarts de revenus et de patrimoine au bénéfice des plus riches par rapport aux catégories sociales moyennes sans pour autant sortir du marasme les catégories les plus défavorisées.

L’objectif premier de toute société démocratique est d’améliorer le sort de tous. Si les pouvoirs publics continuent de laisser le 1% de la population s’accaparer l’essentiel des richesses et mettre à contribution les classes moyennes et populaires, il laisse se développer une désespérance qui ne peut que nuire à la démocratie. Cette réalité sévit à l’intérieur des pays comme entre les pays. L’écart entre les pays riches et les pays pauvres ne cesse de s’accroitre.

Le défi politique

L’affrontement « monde capitaliste » contre « monde socialiste » disparait progressivement et laisse la place à l’affrontement entre démocraties et autocraties. Les dirigeants chinois et russes ne cachent pas leur mépris du système démocratique qui est faible et incapable d’assumer des risques importants. Ils louent ensemble l’efficacité de leur système autocratique. Une bonne partie des pays émergents semblent de plus en plus se rallier à cette vision.

L’utilisation de l’arme nucléaire est aujourd’hui brandie comme possible. Depuis le début de l’offensive en Ukraine, le Président russe agite la menace nucléaire. Il a averti les pays qui s’opposeraient à son intervention qu’ils s’exposeraient à des conséquences « comme ils n’en ont jamais vu ».

L’Union Européenne doit prendre conscience qu’elle doit d’abord compter sur elle-même pour sa défense devant les orientations futures de la puissance américaine en direction de l’Asie. La guerre en Ukraine aide à cette prise de conscience qu’il n’est plus possible devant ce nouvel ordre du monde, s’il ne l’a jamais été, d’être uniquement dépendant des États-Unis.

Après la crise sanitaire et maintenant la guerre à ses portes qui ont mis en évidence les faiblesses de l’Union Européenne et ses dépendances stratégiques, la souveraineté européenne et son autonomie stratégique sont une priorité incontournable.

Le défi technologique

La confiance aveugle envers les sciences et les techniques est une erreur, la défiance systématique en est une autre. Ce n’est pas la technique qui est en soit bénéfique ou maléfique, mais les usages qu’on choisit d’en faire. Nous devons rester vigilants quant aux possibles dérives, aux possibles mauvais usages des découvertes scientifiques. Aidons le plus grand nombre à comprendre, à avoir accès aux connaissances, pour que chacun ait les moyens d’un jugement approprié.

L’idée que l’humain peut détruire le monde terrestre et ainsi se détruire lui-même émerge et pose le problème des limites de l’activité humaine et de sa responsabilité vis-à-vis de la nature. L’humain est une partie d’un tout qui a la particularité d’être responsable de la conservation de ce tout. Nous devons prendre conscience de nos limites et développer un humanisme différent, un humanisme de la diversité. Plus que jamais l’homme a besoin des principes éthiques des Lumières pour mettre les sciences et les technologies au service de l’humanité et non l’inverse.

Le paradoxe

Nous devons affronter la contradiction entre l’universalité des problèmes et la fragmentation des réponses à apporter. L’envergure mondiale des différents défis auxquels nous sommes confrontés rend nécessaire, même si cela apparait complètement utopique, au moins une concertation de l’ensemble des pays de la planète.

Après l’élection confortable du président des États unis pour un deuxième mandat, la montée des extrêmes droites dans les démocraties, la guerre en Ukraine, le clivage entre les pays du Nord et du sud sur le climat, cette perspective de concertation semble s’éloigner. Nous risquons de voir le chaos s’installer.

La réforme en profondeur du seul embryon de gouvernance mondiale existant aujourd’hui, l’ONU, semble indispensable. Il reste la seule institution légitime malgré ses faiblesses pour établir un véritable dialogue et affronter les problèmes qui se posent au monde dans un cadre universel, démocratique et rénové.

Éviter le chaos

Devant la faible probabilité de voir l’ONU jouer son rôle au niveau de la gouvernance mondiale, deux économistes, Jean Pisani-Ferry et Georges Papaconstentinou dans un livre publié aux éditions du Seuil en fin 2024, « Nouvelles règles du jeu – Comment éviter le chaos planétaire », se sont essayés à faire des propositions pour faire face à ce paradoxe.

Ils examinent neuf champs de coopération internationale : le climat, la santé publique, le numérique, le commerce international, la stabilité financière, les migrations, la concurrence, la règlementation bancaire et la fiscalité. Selon eux, l’analyse permet de montrer ce qui marche et ce qui ne marche pas dans les organisations actuelles de coopération internationales. Tirer les leçons des échecs et des succès des différents mode de gouvernance leur permet d’aboutir à des prescriptions sur la façon d’organiser la coopération dans un monde non coopératif. Le monde a changé, il faut en tenir compte et adopter de nouvelles règles si l’on veut éviter le chaos. Ces nouvelles règles du jeu n’éviteront pas de laisser plus de place aux pays émergents et aux pays du sud, parties prenantes indispensables à la gestion des biens communs mondiaux.

La paix par la force

Ces propositions ont au moins l’intérêt de vouloir faire face à nos défis par la concertation entre les pays et l’engagement volontaire de chacun. Mais l’arrivée du nouveau président des États-Unis ne manque pas d’interroger. La politique annoncée de ce dernier ne semble pas laisser beaucoup de place à la concertation. La vision « América first » relève plus du racket et de la pratique de la mafia : non-respect des règles sauf celles imposées par les États Unis et si vous voulez être des alliés et être protégés, il faut payer. Un mélange confus d’isolationnisme et d’impérialisme où la transaction est le maître mot. Les déclarations à propos du changement climatique, de l’Ukraine, du Canal de Panama, du Canada et du Groenland sont édifiantes. C’est sans doute ce que certains appellent la paix par la force.

Quel avenir ?

Les États Unis et la Chine ne séparent pas intérêts économiques et intérêts géostratégiques. Les États-Unis ont adopté une approche fondée sur la sécurité nationale et identifie la Chine comme un rival géopolitique. La Chine affirme sa propre vision du monde et sa volonté de réécrire les règles conformément à ses intérêts. L’Union Européenne dans ce monde conflictuel est la seule puissance qui peut essayer d’influer sur l’ordre du monde dans un sens plus coopératif. En a-t-elle encore la capacité ?

Les européens, s’ils veulent éviter la vassalisation et vivre dans un monde façonné par d’autres, doivent faire de la souveraineté européenne et son autonomie stratégique une priorité incontournable. Ils doivent œuvrer à promouvoir la place des pays émergents et en développement dans le concert des nations. L’ordre mondial doit préférer la coopération à la force et la puissance. L’objectif est d’améliorer le sort de tous. L’humanisme universaliste issu de la philosophie des Lumières doit être la référence pour construire une humanité plus éclairée, moins inégalitaire, plus fraternelle en respectant la diversité humaine et en préservant la planète qui constitue notre cadre commun de vie.

La droite tech a pris le pouvoir aux Etats Unis ?

Avec la réélection de Donald Trump à la présidence des États Unis nous assistons à l’augmentation de l’influence d’un courant idéologique faisant la liaison entre les utopies libertariennes et les valeurs conservatrices. Un article du journal « Le Monde » signé par Valentine Faure en fait une analyse détaillée. Je vous en livre l’essentiel.

Des pouvoirs sans précédent

En 2020 Elon Musk était démocrate mais en 2024 c’est avec zèle qu’il s’est employé à la réélection de Trump. Il a investi plus de cent millions de dollars sur quelques mois dans la campagne et mis à disposition du candidat républicain son réseau d’information. Il a fait un bon investissement puisqu’une semaine après l’élection sa fortune personnelle avait déjà augmenté de 70 milliards de dollars.

La mue de l’homme le plus riche du monde n’est pas la seule. D’anciens donateurs du Parti Démocrate ont suivi la même trajectoire que Musk, notamment Peter Thiel qui a cofondé avec lui Pay Pal et qui est devenu très riche avec son investissement dans Facebook. Une partie des dirigeants de la Silicon Valley ont basculé vers le soutien au Parti Républicain. Sur les 70 milliardaires que compte la Silicon Valley, ils sont une vingtaine à soutenir le 47ème président des États Unis. « Mais ces vingt personnes ont un accès direct à l’espace public médiatique mondial qu’ils ont eux-mêmes composé. La concentration des pouvoirs qu’ils ont entre leurs mains, l’accès aux technologies et leur capacité à mettre en pratique ce en quoi ils croient est sans précédent » dit Olivier Alexandre, sociologue, chercheur au CNRS.
 

Un ennemi commun

Selon un rapport de l’ONG Public Citizen l’industrie des cryptomonnaies représente près de la moitié de l’argent versé par les entreprises aux comités d’action politique en 2024. Le Parti Républicain soutenu par ces donateurs reviendra sur les mesures qui entravent le développement des technologies nouvelles.

La bureaucratie est l’ennemi général dans la Silicon Valley. L’État n’est pas efficace, il impose un tas de réglementations idiotes qui font perdre du temps et des talents. Il faut gérer l’État comme une entreprise. Le progrès technologique doit être poursuivi sans relâche, sans se préoccuper des coûts potentiels ou des dangers pour la société. La bureaucratie doit céder la place à un « CAO(PDG) national » dit Curtis Yarvin, qui pense que les différences génétiques font que certains groupes sont « plus aptes à la maîtrise », tandis que d’autres sont « plus aptes à l’esclavage ». Ce penseur de la droite radicale a contribué à populariser un tournant de la droite américaine contre la démocratie et les valeurs conservatrices traditionnelles, tout en aidant à normaliser des vues racialistes autrefois absentes du conservatisme américain. C’est un exemple des nouvelles tendances importantes dans la pensée et l’activisme de l’extrême droite radicale.

La droite tech s’estime muselée par la gauche libérale. Elle considère que l’argent ne doit pas être dépensé pour réduire les inégalités, mais pour financer les progrès technologiques. Elle rejette la discrimination positive et la « diversité ». Un commentateur d’extrême droite, Richard Hanania, estime que : « bien qu’il y ait des différences avec le conservatisme américain, il n’y a aucune raison pour que les deux parties (conservateurs et droite tech) ne puissent travailler ensemble dans un avenir prévisible. La forme de notre politique et de notre culture dans les décennies à venir dépendra de la mesure dans laquelle ils le feront ».
 

Trouver un terrain d’entente

Le nouveau vice-président des États-Unis, J.D. Vance, ancien sénateur anti élite passé par l’université de Yale, est le visage de cette « nouvelle droite » qui tente de donner une orientation encore plus radicale (en matière de nationalisme, de politique anti-immigration, d’opposition à l’interventionnisme américain) à la révolution idéologique commencée par Trump. Cette ligne s’incarne dans le « Projet 2025 » rédigé par la Fondation Héritage, très puissant cercle de réflexion de la droite conservatrice.

The Héritage fondation, leadership for América

Dans un débat sur « la tech et la république américaine », Kevin Roberts, le président de Héritage s’interrogeait : « Comment le conservatisme et la technologie peuvent-ils trouver un terrain d’entente pour stimuler l’innovation tout en protégeant la liberté d’expression, les libertés individuelles et l’autogouvernance ? ». Il y précisait que « les conservateurs et les (gens de la tech) ne doivent pas seulement collaborer, ils sont en réalité des esprits frères » et l’IA représente « un des plus grands espoirs pour protéger la souveraineté de l’être humain ».

La droite tech a son « CAO national » !

Après l’élection du 5 novembre, les félicitations de l’élite technologique à Trump sont arrivées promptement. Elon Musk est remercié par une nomination à la tête de l’efficacité gouvernementale où il prévoit une coupe de deux billions de dollars. L’Amérique a le « CAO national » dont la droite tech rêvait.


Amazon, propriété de Jeff Bezos, et Meta propriété de Mark Zukerberg, ont annoncé donner chacune un million de dollars au fonds d’investiture de Donald Trump. Ces deux patrons de la tech étaient historiquement considérés comme des opposants au futur président. Ces donations témoignent de la volonté qu’ils ont de se rapprocher du président élu.

Comment résoudre la contradiction ?

Comment résoudre la contradiction d’une alliance entre le parti de la tradition qui tient le langage de la nostalgie d’une Amérique perdue (Make América Great Again) et qui défend un retour à une économie pré-New deal, protectionniste et isolationniste, avec une industrie aux intérêts supranationaux qui promet au monde les bouleversements les plus violents et les plus incertains ?

Restons attentif à ce qui risque de se passer aux USA et dans le monde après le mois de janvier 2025  !

Le sens de l’Histoire

Quand on évoque le sens de l’Histoire, de quoi parle-t-on ? cette expression peut s’interpréter de plusieurs façons selon la polysémie du mot sens. Ce mot nous renvoie à différentes interprétations.

Si le mot sens est pris comme orientation, s’interroger sur le sens de l’Histoire nous conduit à nous demander dans quelle direction chemine l’Histoire ? Celle-ci a-t-elle une direction déterminée ?

Si sens est traduit par valeur objective, s’interroger sur le sens de l’Histoire nous conduit à nous demander quelle est la signification des évènements historiques ?

Une direction unique

Depuis des siècles les religions ont cru ou croient encore que l’histoire ne peut progresser que vers le triomphe de leur culte. La direction de l’Histoire est unique et bien déterminée.

Hegel, pour qui l’univers évolue selon un processus continuel de dépassement, pose les principes d’une approche dialectique de l’Histoire. Il confère à l’idée, ou à l’esprit le rôle de moteur premier dans le déroulement du processus dialectique. Il affirme qu’il convient de considérer les choses, non dans leur état, mais dans leur mouvement. L’esprit est la contradiction suprême qui met le monde en mouvement et transforme le réel.

Marx conteste l’idéalisme de la vision d’Hegel, il estime que la dialectique hégélienne « marche sur la tête », c’est la vie qui détermine la conscience et non la conscience qui détermine la vie. Mais il souligne la portée révolutionnaire de la conception dialectique de Hegel et voit en celle-ci le mécanisme annonciateur de la disparition du capitalisme dans son dépassement par une autre forme de société issue de ses contradictions.

Pour Marx, le matérialisme historique est l’étude des formations sociales, c’est-à-dire l’analyse du processus complexe par lequel une formation sociale se produit et se reproduit comme unité, comme un tout structuré. Il permet de penser l’ensemble de la société et de prévoir son évolution. L’Histoire chemine dans une direction donnée, elle est mue par un moteur unique, la lutte des classes.

Les dirigeants des dictatures idéologiques du XXème siècle étaient aussi persuadés que leur victoire inéluctable entraînerait la fin de l’Histoire par l’avènement d’un monde incontesté.

Le progrès scientifique et technique

Au XVIIIème siècle, appelé « siècle des Lumières », philosophes et scientifiques s’affranchissent des interdits religieux, idéologiques et politiques de l’époque. Ils promeuvent des conceptions nouvelles, rationnelles et humanistes. Le progrès scientifique et technique a indéniablement influencé l’évolution de la société. La foi dans le progrès s’accompagne de la foi en l’homme, en sa créativité et sa raison.

De nos jours encore, les nouvelles technologies de l’information et de la communication, Internet, les réseaux sociaux, l’Intelligence artificielle, le transhumanisme et l’illusion de la vie éternelle ont des conséquences considérables sur les rapports entre les hommes, les nations, les peuples, les économies, l’échange des idées… et donc sur l’Histoire.

Mais cette foi dans le progrès scientifique et technique est aussi porteur de craintes et d’angoisses accentuées par le changement climatique, la pollution, les manipulations génétiques. La notion du progrès comme moteur de l’Histoire est ainsi contrariée comme le furent les religions et les totalitarismes. L’idée que l’Histoire est mue par un moteur constant, unique ou au moins principal, et qu’elle progresse dans une direction donnée est peut-être une illusion.

La signification des évènements historiques

Il est possible aussi de s’interroger sur la signification des faits historiques. Quel sens donner à l’enchainement des nombreux épisodes d’aventures, de passions, de créations, de contradictions, de sentiments, d’interactions et de conflits humains. C’est depuis toujours la question que se posent les historiens. A chaque époque la recherche de la signification des faits historiques se perfectionne, devient plus rigoureuse, plus complète pour aboutir à une interprétation plus argumentée.

Dans la première moitié du XXe siècle, le grand historien Marc BLOCH a œuvré dans ce sens. Au sein d’un courant intellectuel novateur, l’École des annales, il prend à contre-pied la conception dominante de l’histoire qui est essentiellement événementielle et chronologique. Il fait de l’histoire un outil permettant de comprendre le fonctionnement des sociétés et celui de ses mécanismes d’évolution. C’est un courant qui a renouvelé en profondeur l’étude de l’histoire en France et dans le monde. Les faits économiques et sociaux, l’organisation du travail et de la vie des gens sont aussi indispensables que les faits politiques, diplomatiques et religieux de chaque époque, pour la compréhension de l’Histoire.

L’Histoire a des moteurs multiples

L’Histoire est mue par de nombreux moteurs : politiques, culturels, économiques et sociaux. L’interdisciplinarité est essentielle pour comprendre le monde contemporain. L’histoire est une science sociale au coté d’autres disciplines (la géographie, la sociologie, l’anthropologie…) pour contribuer à cette compréhension.

L’Histoire ne progresse pas invariablement dans la même direction mais souvent de manière contradictoire. Les directions prises varient avec le temps. Aucun bouleversement ne peut provoquer la fin de l’Histoire ou son évolution unidirectionnelle. La complexité de la vie et les caractéristiques humaines engendrent la complexité de la science historique qui, elle, cherche à établir et comprendre cette évolution et ses nombreuses inflexions.

Le travail de l’historien est une démarche humaniste. Mieux comprendre le fonctionnement de la société et son évolution permet aux hommes et aux femmes, à leurs dirigeants politiques d’œuvrer à l’amélioration de cette société. L’histoire est une discipline engagée au service de la société et de la démocratie.

NE TRAHISSONS PAS L’UKRAINE

Poutine n’a pas encore gagné. L’Ukraine se bat !

Je vous transmets le message de l’association « POUR L’UKRAINE, POUR LEUR LIBERTÉ ET LA NOTRE ». Notre solidarité ne doit pas faiblir surtout maintenant.

C’est l’heure de l’Europe :

Ne trahissons pas l’Ukraine !

Appel à une mobilisation des citoyens européens

Rencontre et mobilisation Jeudi  5 décembre à 18h30 sur Zoom

Le 5 décembre à 18h30 rejoignez nous sur Zoom pour vous informer, débattre et agir en soutenant notre Appel à une mobilisation des citoyens européens (en pj). avec :  ➡ Nicolas Tenzer, géopolitiste, enseignant à Sciences Po Paris, ➡ André Gattolin, universitaire, ancien sénateur ➡ Alexandre Melnik, professeur de géopolitique à l’ICN Business School. Quelle est la situation sur le front ?Pourquoi l’Europe doit-elle intervenir ?Avec quels moyens Peut-elle le faireUne coalition de pays volontaires pour protéger l’Ukraine est-elle souhaitable et possible ?Comment empêcher un nouveau Munich et agir en tant que citoyens Européens ? Rencontre animée par Melodie Combot, universitaire, Florence Hartmann, journaliste et essayiste, Pierre Raiman, historien, co-fondateur de l’association Pour l’Ukraine, pour leur liberté et la nôtre !
Rencontre sur Zoom. Entrée gratuite sur inscription. Jeudi 5 décembre à 18H30 sur :
bit.ly/pour-lukraine-5-12-24 Partagez l’invitation à vos amis ou le flashcode ci-dessous

APPEL

L’Ukraine vit des heures angoissantes. L’armée russe, forte d’un budget militaire de 106 Md€ qu’elle veut porter à 135 Md€ en 2025, poursuit son invasion au prix de dizaines de milliers de morts et de la destruction systématique des infrastructures vitales de l’Ukraine : ses centrales énergétiques, ses hôpitaux, ses usines. Malgré la résistance héroïque des Ukrainiens, elle gagne du terrain grâce aux demi-mesures et aux retards de l’aide apportée par leurs alliés, qui se gardent bien de désigner la seule issue admissible de cette guerre : le retrait de la Russie dans ses frontières.
Paralysés par le « chantage au nucléaire » de Vladimir Poutine, Joe Biden et les dirigeants occidentaux ont livré à contretemps des armements en quantité et de portée limitées, sans procurer à l’Ukraine les moyens de la victoire. Préoccupés avant tout par le souci de ne pas concourir à une « escalade », ils ont laissé le Kremlin franchir successivement toutes les étapes de la surenchère militaire, jusqu’à l’arrivée ces derniers jours de 10 000 soldats nord-coréens, couronnée par l’emploi de charges chimiques et d’un missile intercontinental.
Tétanisés par les rodomontades de Donald Trump, les gouvernements européens se préparent-ils mezza-voce à accepter, avec un lâche soulagement, que la nouvelle administration américaine négocie un accord de cessez-le-feu au détriment de la volonté ukrainienne ?
La trahison de l’Ukraine signerait l’arrêt de mort du projet européen : triomphant aujourd’hui, Poutine reprendrait dans deux, cinq ou sept ans ses guerres de conquête contre l’Ukraine, mais aussi la Géorgie, la Moldavie ou les Pays baltes. L’ensemble du continent glisserait vers l’abîme. Notre sécurité, nos libertés et nos valeurs sont directement menacées. Il faut donc agir, vite.
L’OTAN est suspendue au bon vouloir de la Maison blanche. L’Union européenne se heurte à l’indécision et la pusillanimité de certains chefs d’État et de gouvernement et au double jeu du premier ministre hongrois Viktor Orban. C’est pourquoi nous en appelons à la prompte mise en place d’une coalition des États européens volontaires ─ qu’ils soient ou non membres de l’UE (comme le Royaume-Uni et la Norvège).
Cette coalition pourrait très rapidement s’accorder sur un ensemble de mesures :

  1. Assurer le financement de l’armement nécessaire, réclamé par Kyiv, en
    confisquant et transférant à l’Ukraine les 200 Md€ d’avoirs de la Banque centrale de Russie actuellement bloqués en Europe. Compte tenu de l’ampleur des besoins du pays ruiné par la guerre d’agression (évalués par la Banque mondiale à 483 Md$ au 1er janvier 2024), non seulement le droit international le permet, mais l’urgence le justifie. Cela raffermirait aussi la souveraineté collective européenne sur la scène internationale.

2. Protéger le ciel et la frontière Nord de l’Ukraine :

    • En autorisant les Ukrainiens à frapper en Russie, avec les armes que nous leur
      procurons, les sites militaires d’où partent les attaques de Moscou ;
    • En fournissant une quantité significative de batteries et de vecteurs anti-aériens, afin d’arrêter la destruction des infrastructures civiles ;
    • En neutralisant avec le concours de nos forces aériennes et antiaériennes, depuis l’espace européen, les missiles et drones à moyenne et longue portée lancés contre les villes ukrainiennes ;
    • En envoyant un contingent, formé par la coalition des pays volontaires, pour
      protéger la frontière de l’Ukraine avec le Bélarus, afin de permettre aux troupes
      ukrainiennes immobilisées sur ces positions de rejoindre le front. Cette
      intervention défensive serait la meilleure réponse à l’implication aux côtés des
      forces russes de troupes du régime totalitaire de Kim Jong-un et le signe de notre détermination, susceptible de dissuader Poutine d’aller plus loin.

    3. Refuser tout accord de paix qui ne prenne pas en compte :

      • la dimension humaine (et pas seulement territoriale) de l’invasion russe : aucun Ukrainien ne doit être retenu contre son gré en Russie. Le retour en Ukraine des populations déportées par l’armée russe, dont des dizaines de milliers d’enfants kidnappés, n’est pas négociable ;
      • la sécurité de l’Ukraine : lui imposer le statut d’État démilitarisé ou neutre la
        mettrait en danger, alors qu’elle a, au contraire, vocation à entrer dans l’OTAN,
        seule garantie à long terme de l’inviolabilité de son territoire.
        Quoi qu’en dise la propagande du Kremlin, aucune de ces mesures n’implique d’entrer en guerre avec la Russie. Leur coût est limité. Elles sont vitales pour un pays qui défend sa liberté et protège les nôtres.
      • Premiers signataires :
        Sylvie Rollet, présidente de l’association Pour l’Ukraine, pour leur liberté et la nôtre
        Pierre Raiman, historien, co-fondateur de l’association Pour l’Ukraine, pour leur liberté et la nôtre
        Galia Ackerman, historienne, rédactrice en chef de « Desk Russie »
        Julien Bayou, avocat, ancien député
        André Gattolin, universitaire, ancien sénateur
        Emmanuel Wallon, professeur émérite de sociologie politique à l’université Paris-X.

      Pour signer cet appel

      Envoyez vos signatures à appelpourlukraine@gmail.com avec vos  prénoms, noms et fonctions ou titres.

      Liberté de conscience et Laïcité

      A l’approche de la fin de l’année il est traditionnel de se rappeler la revendication de faire du 9 décembre le jour de la fête de la Laïcité. C’est une occasion de revenir sur ces notions de Liberté de conscience et de Laïcité.

      Philosophie et religion

      La philosophie, du grecque philo sophia, c’est l’art de prendre soin de ses pensées, de s’affranchir des limites de l’expérience vécue, des premières illusions, des préjugés, des traditions, de l’idéologie qui présente comme naturel ce qui est social et historique. La notion de liberté de conscience est issue de la philosophie grecque.

      SOCRATE

      Pour Socrate, le sentiment de soi qui définit la conscience est délié de toute contrainte. Il a été condamné à mort, entre autres, pour irrespect supposé des dieux de la cité. Protagoras, l’auteur de « l’homme est la mesure de toute chose » a été banni pour agnosticisme. Les religions justifient leurs usages par des exigences divines.

      Baruch SPINOZA

      Dès l’apparition de la notion de liberté de conscience apparait une tension entre les religions et la philosophie. La liste est longue du rejet de la raison philosophique au nom d’une foi inconditionnelle. Nous pouvons citer quelques exemples entre autres de philosophes condamnés par la foi : Descartes, Copernic, Spinoza, Averroès, Kant, Salman Rushdie, etc…

      La philosophie nous aide à démêler les univers de la croyance et de la connaissance. Croire ou savoir ? Croire que l’on sait, ou savoir qu’on ne sait pas. Questions essentielles pour clarifier ce qui se passe dans la conscience humaine.

      Denis DIDEROT

      La philosophie des Lumières

      Au XVIIIème siècle qu’on appelle le siècle des Lumières, les philosophes, dans le prolongement des idées héritées de la Renaissance, ont combattu l’obscurantisme, la superstition et l’irrationnel des siècles passés. Ils ont renouvelé les connaissances et l’éthique de leur temps.

      Les Lumières sont à l’origine de deux formes de société. L’une qui se fonde sur le religieux, l’inné et l’autorité garantie par la véracité divine. L’autre qui au contraire proclame le libre arbitre, l’acquis et le progrès. Le mouvement des Lumières, c’est un ensemble de philosophies qui changent selon les nations en fonction de leurs pratiques culturelles.

      Mais leur force commune, c’est une pensée non figée, une pensée qui se meut, qui échange, qui discute, qui évolue et qui reflète l’homme dans son besoin de se confronter à l’autre pour avancer. C’est une conception de l’homme qui a conquis sa liberté, le refus de tout dogmatisme, une pensée libre pour chaque homme sans messianisme religieux ou politique.

      Emmanuel KANT

      Pour illustrer cette approche citons la maxime d’Emmanuel Kant : « Sapere aude », pense par toi-même. Le projet des Lumières est un projet humaniste et universel.

      Liberté de conscience et émancipation

      La Déclaration des droits de l’homme adoptée en 1948 par les Nations Unies mais qui n’a pas de portée contraignante, définit la liberté de conscience et de religion dans son article 18 : «Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction seule ou en commun, tant en public qu’en privé, par l’enseignement, les pratiques, le culte et l’accomplissement des rites. » Elle définit la Liberté comme ce qui consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. Elle garantit l’expression du pluralisme des opinions et la liberté de conscience.

      Aujourd’hui la liberté de conscience c’est la liberté de l’esprit : émancipation à l’égard de tous les dogmes ; droit de croire ou de ne pas croire en une divinité qui dirige le monde ; autonomie de la pensée vis-à-vis des contraintes religieuses, politiques, économiques ; affranchissement des modes de vie par rapport aux tabous, aux idées dominantes et aux règles dogmatiques.

      La Laïcité est un principe consubstantiel à la République

      La laïcité est un principe fondamental qui vise à séparer les institutions publiques des institutions religieuses et à garantir la neutralité de l’État en matière de religion. Ce concept est particulièrement important en France, où il est inscrit dans la Constitution et joue un rôle central dans l’organisation de la société.

      L’article 2 de la constitution actuelle de la France indique que « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. » La laïcité est un principe consubstantiel à la République qui va au-delà du rapport de l’État et des Églises. C’est sans doute ce qui poussent certains à parler de conception française de la laïcité même si le principe de laïcité porte en lui-même sa force indépendamment du support constitutionnel.

      Une pensée philosophique humaniste et universaliste

      La Laïcité est avant tout une construction juridique fondée sur une exigence de la raison : l’égalité en droit de tous les êtres humains. Le principe de Laïcité est la convergence d’une évolution législative de plusieurs siècles aboutissant à la séparation des Églises et de l’État et une pensée philosophique humaniste et universaliste assurant à chacun la liberté de conscience et le primat de l’intérêt général, du bien commun à tous.

      La séparation des Églises et de l’État est la pierre angulaire de la laïcisation de la société. Si l’État garantit la totale liberté des cultes comme de l’expression et de la diffusion de la pensée, il n’en favorise aucun, ni aucune communauté, pas plus financièrement que politiquement.

      La loi ne saurait reconnaître le délit de blasphème ou de sacrilège qui déboucherait inévitablement sur l’institutionnalisation de la censure. La première manifestation du caractère laïque d’un pays est l’indépendance de l’État et de tous les services publics vis-à-vis des institutions ou influences religieuses.

      Victor Hugo

      La formule clé de l’idéal laïque nous est donnée par Victor Hugo : « L’Église chez elle, et l’État chez lui ».

      Un idéal d’émancipation

      L’humanisme laïque repose sur le principe de la liberté de conscience. La laïcité est un idéal qui permet à tous, croyants et athées, de vivre au sein de la société sans que les uns ou les autres soient stigmatisés en raison de leurs convictions particulières. Elle impose que soient donnés aux hommes et aux femmes, sans distinction de classe, d’origine, de confession, les moyens d’être eux-mêmes, libres de leurs engagements, responsables de leur épanouissement et maîtres de leur destin.

      L’État laïque incarne la promotion simultanée de la liberté de conscience, de l’égalité, de la culture émancipatrice et du choix sans entrave de l’éthique de vie personnelle. La laïcité vise à libérer l’enfant et l’adulte de tout ce qui aliène ou pervertit la pensée, notamment les croyances ataviques, les préjugés, les idées préconçues, les dogmes, les idéologies opprimantes, les pressions d’ordre culturel, économique, social, politique ou religieux.

      La laïcité est un idéal d’émancipation qui permet à tous, croyants, athées, et agnostiques, de vivre au sein de la société sans que les uns ou les autres soient stigmatisés en raison de leurs convictions particulières. L’État laïque incarne la promotion simultanée de la liberté de conscience et de l’égalité, de la culture émancipatrice et du choix sans entrave de l’éthique de vie personnelle.

      École et Laïcité

      L’école publique laïque, pour contribuer à cette émancipation, doit tenir à distance la société civile et ses fausses urgences. La laïcité c’est le fait de refuser aux puissances de conditionnement d’entrer dans les classes, d’ouvrir à chaque esprit la chance de penser sans tutelle, sans emprises. L’enseignement public doit être affranchi de tout prosélytisme religieux ou idéologique. L’école est un moyen de transmission du savoir mais c’est aussi le moyen de fabriquer une communauté nationale de citoyens.

      Laïcité et religion

      Laïque signifie indépendant de la religion. La Laïcité implique l’égalité des droits sans distinction de convictions personnelles. Laïque ne s’oppose pas à religieux mais à clérical. L’esprit clérical, c’est la prétention des clercs à dominer au nom d’une religion.

      La Laïcité ne se confond pas avec l’athéisme et ne se réduit pas au combat anticlérical. Admettre que chacun puisse à titre individuel ne pas croire ou pratiquer le culte de son choix sans que la société n’en impose aucun est un principe qui consiste à laisser chacun libre de ses choix selon ses propres règles morales avec pour seule limite de ne pas nuire à autrui sans subir celles que lui imposerait la religion ou n’importe quelle idéologie totalitaire d’État.

      Une vision confuse

      Certains croyants considèrent que les laïques ont pour seul objectif de lutter contre leur religion. Comme ils ne se sentent pas respectés cela entraine chez eux un raidissement compréhensible. D’autres reprochent aux partisans de la laïcité d’être dépourvu de tout spiritualisme et ignorent le spiritualisme laïque qui est en rapport avec l’esprit et dépourvu de toute relation avec une quelconque divinité. 

      Par ailleurs certains laïques, sans doute insuffisamment informés, font preuve d’intolérance par rapport aux croyants et oublient que la laïcité garantie la liberté de conscience et donc la liberté de culte. C’est un peu un renversement des rôles par rapport à la période où les non-croyants étaient persécutés par les fanatiques religieux. C’est face à cette attitude discriminante que la laïcité s’est affirmée contre l’intolérance de certains croyants et surtout du clergé qui se sentait menacé par la laïcité.

      Il ne faut pas non plus ignorer l’attitude de certaines forces politiques qui instrumentalisent la laïcité pour lutter contre certaines religions notamment la religion musulmane en l’assimilant à l’islamisme politique qui veut imposer la loi de Dieu à la place de la loi des hommes.

      Conclusion

      La laïcité n’est pas une notion passéiste mais au contraire une idée de progrès. Elle est action et volonté. Elle implique la plénitude de l’égalité de traitement par l’État, des athées et des croyants. Cette égalité est la condition d’une véritable fraternité, dans la référence au bien commun.

      Les humanistes laïques et universalistes, au-delà de toute règle constitutionnelle, héritiers des philosophes du siècle des Lumières, ont une conception de l’homme qui a conquis sa liberté, qui promeut une pensée libre pour chacun sans messianisme religieux ou politique. Ils sont partisans d’une laïcisation de la société c’est-à-dire d’un État indépendant de tout dogmatisme qui adopte le principe de laïcité, idéal d’émancipation, de liberté, d’égalité, de fraternité et de solidarité humaine qui garantit la liberté de conscience pour tous.

      L’alternative au chaos

      Une dissolution pour clarifier ?

      Dès l’annonce de l’échec de la liste Renaissance aux élections européennes du début juin 2024, le Président de la république annonce la dissolution de l’assemblée nationale. Il décide ainsi de donner la parole au peuple dans la perspective de provoquer une clarification de la situation. Il convoque les élections législatives dans un délai très court avec un deuxième tour le 7 juillet alors que l’extrême droite réalise une poussée notable.

      La gauche émiettée réussit en quatre jours à reconstruire son unité en créant le Nouveau Front Populaire (NFP) avec un contrat de législature basé sur un programme économique et social assez développé. Le parti « Les Républicains » explosent avec le ralliement au Rassemblement national (RN) de son président partisan de l’Union des droites. Le parti du Président (Renaissance) se prononce pour le non aux extrêmes de droite comme de gauche. La campagne est courte et très tendue.

      Une poussée inquiétante de l’extrême droite

      A l’issue du premier tour le RN est en tête avec le plus grand nombre d’élus mais voit se constituer un front républicain sans condition à gauche et avec quelques hésitations chez Ensemble pour la république ( EPR – le nouveau nom de Renaissance) où l’aile droite maintient le « ni-ni ».

      Au soir du 7 juillet le rêve de la majorité absolue pour le RN s’effondre. Le désistement de la gauche et d’EPR pour faire barrage au RN relègue ce dernier en troisième position avec un NFP en première position sans atteindre la majorité absolue. EPR s’en tire bien en arrivant à être le deuxième groupe de l’assemblée.

      Une assemblée nationale sans majorité

      Au sein de l’assemblée nationale, le NFP, le RN et EPR, sont les groupes les plus importants mais aucun n’atteint la majorité absolue nécessaire pour gouverner. La logique institutionnelle aurait dû amener le Président de la république à nommer un premier ministre issu du NFP quitte à ce que celui-ci constitue un gouvernement minoritaire.

      Mais le Président de la république a profité de l’organisation des Jeux Olympiques à Paris pour laisser passer le temps. Il permet que se constitue une minorité plus nombreuse alliant EPR et Les Républicains. Le nouveau premier ministre, issu de LR, constitue son gouvernement minoritaire à l’Assemblée avec la neutralité bienveillante du RN qui impose certaines conditions et le tient comme la corde tient le pendu.

      Un déni démocratique

      En résumé, le président a voulu sortir son camp d’une minorité à l’assemblée et provoquer une clarification de la situation. Le résultat des élections marque un désaveu de la politique menée par le gouvernement sortant. Le président nomme un nouveau gouvernement avec une minorité encore plus faible que la précédente regroupant les perdants des élections législatives, un déni démocratique.

      Une situation financière alarmante 

      La situation financière s’avère encore plus catastrophique que celle annoncée précédemment et oblige le gouvernement à préparer un budget de crise. Le nouveau premier ministre s’efforce de changer de méthode mais sur le fond pas grand-chose de nouveau. Au niveau économique les ministres concernés sont issus des défenseurs de la politique précédente. IIs veulent continuer la politique néolibérale poursuivie depuis plusieurs années, qui a été rejetée massivement et qui nous a mené dans le mur.

      La dette publique s’élève à plus de 3000 milliards d’euros. Après un déficit de 5,5% du PIB (Produit Intérieur Brut) en 2023, la tendance actuelle prévoit 6% cette année et encore plus l’an prochain.

      Plus de justice fiscale ?

      Certes le premier ministre annonce qu’il faut plus de justice fiscale et veut abandonner le dogme du « pas de nouveaux impôts » soutenu par le président. C’est d’ailleurs une obligation car ce qui est à l’origine de ce déficit, de l’avis de nombreux économistes, c’est le manque de recettes. La croissance qui devait résulter de la politique de l’offre c’est-à-dire, pour aller vite, de l’allègement des charges des entreprises n’est pas au rendez-vous.

      Les économistes de l’OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques) estiment que la croissance française serait divisée par deux en 2025 si le budget déposé par le gouvernement Barnier était adopté en l’état.

      Changer de politique

      Changer de politique pour répondre aux besoins des français est le seul moyen d’éviter de nous retrouver dans une impasse dans quelques mois. Le NFP défend une autre stratégie budgétaire et propose de lever de nouvelles recettes. Grâce à ces mesures fiscales, la France serait en mesure de réduire le déficit tout en augmentant immédiatement les investissements dans les services publics et les secteurs d’avenir.

      La philosophie est très différente de celle du gouvernement Barnier, qui est centrée sur la simple réduction du déficit, au prix d’effets récessifs significatifs c’est-à-dire réduire la croissance de moitié. Le programme du Nouveau Front populaire propose une stratégie budgétaire qui augmente les dépenses publiques, stimule l’activité économique et permet de dégager des recettes supplémentaires.

      A l’Assemblée nationale les différents partis du NFP montrent leur convergence de vue dans le domaine économique et social. L’unité affichée lors du débat budgétaire ne doit pas nous faire oublier que sur l’international, les institutions ou le régalien les positions ne sont pas alignées.

      Trouver la voie de l’Union

      En France l’histoire nous montre que la gauche a toujours été diverse. Les partis de gauche n’ont pu accéder au pouvoir que lorsqu’ils ont trouvé la voie de l’union. C’est pourquoi les électeurs de gauche, quelque soit leur sensibilité, poussent leurs représentants à faire l’union. Les points d’accord sont bien plus importants que les points de divergence. Chacun doit avoir le souci de respecter ses partenaires et leurs différences.

      Au-delà de la guérilla parlementaire qui se déroule à propos du budget 2025, où la Gauche a pu montrer son unité, il faut que chaque composante de la gauche ait en tête l’avenir et recherche les compromis indispensables pour élaborer une politique de long terme qui lierait réforme économique, réforme de l’État et réforme écologique.

      Répondre aux défis de ce premier quart de siècle

      Ce projet politique doit répondre aux défis auxquels nous sommes confrontés en ce premier quart de XXIème siècle.

      Le défi économique et social avec la mise en place d’une alternative au néolibéralisme et la baisse des inégalités.

      Le défi climatique avec la lutte contre le réchauffement de la planète et le recul de la biodiversité.

      Le défi technologique avec la confrontation de l’humanité au progrès technologique.

      Le défi politique avec l’affrontement larvé entre les États Unis et la Chine pour la domination du monde et l’agression de l’Ukraine par la Russie qui veut reconstituer l’empire russe.

      Le défi démocratique en rejetant la verticalité du pouvoir et en favorisant une plus grande participation des citoyens.

      Ce sont les réponses à ces défis et les grands choix sociétaux à faire qui détermineront avec un minimum de cohérence les mesures qui devront être prises par les gouvernants sous le contrôle des citoyens. C’est en sollicitant les citoyens sur ces grands choix que l’on pourra revivifier notre système démocratique et les faire se prononcer sur ce qui influencera vraiment leur vie à venir.

      Élaborer un projet politique de long terme et répondre à ces défis sont les conditions pour que la gauche redevienne un parti de gouvernement de transformation démocratique et sociale.