Faire face à la montée des extrêmes

Afin de déterminer le rôle que devraient assumer les humanistes universalistes face à la montée des extrêmes, nous allons présenter dans un premier temps le contexte actuel du monde et de l’Europe. Dans un deuxième temps nous examinerons les valeurs sur lesquelles repose l’humanisme universaliste. Pour terminer nous aborderons le rôle qu’il peut tenir dans la bataille des idées.

Le contexte actuel du monde et de l’Europe

L’énoncé des évènements de ces dernières années ne poussent pas naturellement à l’optimisme. La pandémie du Covid 19, le changement climatique, le recul de la biodiversité, le bouleversement de l’ordre du monde, la guerre en Ukraine, le risque d’un retour de la guerre en Europe et de la menace atomique, la guerre au proche orient, la résurgence des totalitarismes, le retour des attentats, la forte concentration des richesses, l’accroissement des inégalités, le développement de l’insécurité sociale… et cette énumération n’est malheureusement pas exhaustive. Le monde se transforme à très grande vitesse. Les bouleversements sont multiples à tous les niveaux. Les défis auxquels la planète se trouve confrontée sont d’ordre climatique, économique, politique, et technologique. Les problèmes sont universels et les réponses sont fragmentées. Aucun pays seul ne peut faire face à chacun de ces défis.

L’année 2024 a vu se dérouler plusieurs dizaines d’élections en Europe et dans le monde. Le parlement de l’Union Européenne a connu une forte poussée des extrêmes en même temps que des changements de majorité allant dans le même sens dans les pays membres. La nouvelle administration américaine met en application ce que le nouveau président avait annoncé durant la campagne électorale. La politique d’alliance en vigueur depuis la fin de la deuxième guerre mondiale est remise en question. « L’América first » et le « Make América Great Again » remettent en cause tous les équilibres que l’on croyait acquis. Après une longue période de paix nous vivons une période d’instabilité dont il est difficile de voir l’aboutissement. Les États Unis et la Chine ne séparent pas intérêts économiques et intérêts géostratégiques. La Russie ne rêve que de reconstituer son empire passé. Les européens, s’ils veulent éviter la vassalisation et vivre dans un monde façonné par d’autres, doivent faire de la souveraineté européenne et son autonomie stratégique une priorité incontournable.

La montée des extrêmes, qu’ils soient politiques, religieux ou idéologiques, constitue l’un des défis majeurs auxquels l’Europe est confrontée aujourd’hui. Les extrêmes se caractérisent souvent par un rejet de la complexité du monde, un refus du dialogue et une tentation de simplifier les enjeux sociétaux. L’antisémitisme et le racisme antimusulman sont utilisés comme un moyen de mobiliser la colère et justifier des actions radicales.

Comme disent certains, nous pouvons constater qu’il règne aujourd’hui « une atmosphère » de populisme. L’ère du temps est marquée par l’effacement des vieux partis devant de nouveaux mouvements politiques formés dans le sillage d’une personnalité dont ils accompagnent l’ascension. Le désenchantement démocratique contemporain s’inscrit dans la culture politique diffuse du populisme. De grands thèmes populistes comme l’appel au développement des référendums et la philosophie nationale-protectionniste imprègnent beaucoup plus qu’avant des sociétés en panne de projets de solidarités. Les différentes passions populistes irriguent les esprits dans les démocraties fragilisées du XXIème siècle, cela évite de se confronter à la complexité du monde réel.

C’est devant cette complexité du monde que se trouve confrontée l’humaniste universaliste.

Les valeurs humanistes universalistes

Les humanistes universalistes, héritiers de la culture des Lumières, porteurs des valeurs humanistes, sont au cœur des débats sur la démocratie, la tolérance et la liberté. Depuis leur émergence au XVIIIème siècle ils ont toujours été des acteurs engagés dans la promotion des valeurs de raison, de fraternité et de progrès social. Ils ont pour principe la liberté de conscience. Ils considèrent la morale comme indépendante de toute religion ou conception métaphysique et estiment que les conceptions métaphysiques relèvent du domaine exclusif de l’appréciation individuelle de chacun. Ils se refusent à toute affirmation dogmatique. Chacun doit se libérer de tout préjugé et apprendre à penser, à juger, à décider par lui-même en appliquant la maxime d’Emmanuel Kant : « Sapere Aude », pense par toi-même.

Les humanistes universalistes sont redevables aux Lumières pour les plus belles de leurs valeurs, celles qui les incitent à s’améliorer et à améliorer le monde qui les entoure, la tolérance religieuse, une vision égalitaire des êtres humains et de tous les peuples.

La philosophie humaniste considère que l’humanité est source de toute valeur et que tous les êtres humains ont une valeur égale. L’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Les dissemblances individuelles, les appartenances diverses, les langues, les différences sociales ne doivent pas être un obstacle à rassembler dans une perspective émancipatrice. L’universel n’est pas l’ignorance de la pluralité humaine. Le projet humaniste est de dépasser les singularités par la mobilisation de tous pour œuvrer à la construction d’une humanité plus éclairée.

La société est le fruit d’un travail guidé par la loi que les humains se donnent. Cette loi évolue dans le temps, elle peut être abolie, modifiée, remplacée. L’avenir n’est jamais écrit de manière définitive. C’est sur base de ces valeurs et dans la perspective de la construction d’une société plus éclairée que les humanistes universalistes doivent envisager leur action.

Participer à la bataille des idées

Dans ce début de XXIème siècle marqué par un horizon menacé par la tempête, l’on assiste à ce qui semble être le triomphe des obscurantismes, du relativisme culturel, du tribalisme, de l’ethnicisme et de la réhabilitation de la notion de « race », la montée des extrêmes, le développement du populisme, le bouleversement de l’ordre du monde, le retour des empires et de la loi du plus fort. Face à cette évolution, il est indispensable d’accompagner toutes les pensées qui résistent à la résignation par une volonté d’action.

Les humanistes universalistes doivent promouvoir les principes auxquels ils sont attachés pour dépasser l’inquiétude suscitée par l’évolution du monde. Nous devons nous mobiliser quotidiennement pour RESISTER :

  • Résister aux atteintes à la liberté de conscience en restant fermes face à la radicalité et l’extrémisme religieux
  • Résister en combattant l’ignorance et le fanatisme
  • Résister en luttant contre toutes les discriminations, la xénophobie, l’antisémitisme et toutes les formes de racisme
  • Résister aux périls identitaires par la promotion de l’universalisme dans le respect de la diversité humaine et le refus de tout communautarisme.
  • Résister aux mises en cause de la démocratie
  • Résister à ceux qui restent sourds au changement climatique et à la destruction de la biodiversité
  • Résister au développement des inégalités

En un mot résister pour défendre l’émancipation de l’être humain dans une société démocratique, laïque et sociale, plus juste et plus éclairée. Une société qui concrétise notre devise républicaine : « Liberté, Égalité, Fraternité ». Une société qui respecte la Laïcité comme principe fondamental et qui place la loi des humains devant toute éventuelle loi divine. Une société qui garantit la liberté de conscience pour tous.

C’est par cette action de résistance pour promouvoir un monde meilleur que nous pouvons dépasser l’inquiétude que ne manque pas de susciter l’évolution du monde. Nous ne pouvons pas nous contenter de n’être qu’une philosophie de l’incantation. Nous ne nous résignons pas, nous ne croyons pas en la fatalité du monde. Nous nous devons d’être une philosophie de réflexion critique, de l’engagement, de l’émancipation et du souci du bien commun.

Auteur/autrice : Maurice

Retraité, diplômé en sciences économiques, j'ai été enseignant, chercheur en sciences sociales, syndicaliste, mutualiste militant, chef d'entreprise d’économie sociale. Depuis mes études je suis intéressé par l'épistémologie en sciences sociales et la pluridisciplinarité. J'ai créé ce blog pour m'exprimer et échanger avec ceux qui le souhaitent.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.