Extraordinaire, disons extrêmement différent de ce qu’on a l’habitude de lire dans le rapport annuel de la Cour des Comptes. Cette honorable institution dont les Conseillers maîtres sont l’élite de l’élite, leur recrutement se fait exclusivement parmi les élèves les mieux classés issus de l’École Nationale d’Administration, vient de nous livrer son rapport et il ne manque pas de nous surprendre.
La Cour des comptes
Cet organisme est une juridiction financière, chargée de contrôler le régularité des comptes publics, de l’État, de tous les établissements publics et des organismes privés bénéficiant d’une aide de l’État ou faisant appel à la générosité du public. Il informe le Parlement, le Gouvernement et l’opinion publique sur la régularité des comptes.
La page d’accueil de son site internet contient en exergue la phrase suivante : « S’assurer du bon emploi de l’argent public, en informer les citoyens ». Chaque année est publié un rapport public qui depuis de nombreuses années se distingue par son orthodoxie budgétaire. La trame de ces rapports s’apparente plus à la doxa néolibérale, met régulièrement le doigt sur les déficits budgétaires et rappelle systématiquement la nécessité impérieuse de réduire les dépenses publiques.
La crise sanitaire
A titre d’exemple, je ferais référence à mes articles du mois de mars 2020, intitulés « Pourquoi n’étions-nous pas prêts ? » et « le Covid 19 révèle les revers de la mondialisation ». A la suite de l’épidémie de grippe aviaire (H5N1) qui avait mis en évidence diverses faiblesses dans la réponse logistique de l’État, le gouvernement de l’époque avait créé un établissement public de préparation et de réponses aux urgences sanitaires. Sa mission principale était l’acquisition, la fabrication, le stockage, la distribution et l’exportation des produits nécessaires à la protection de la population face aux mesures sanitaires graves. Cet établissement a eu les moyens d’acheter des millions de vaccins, d’aiguilles, d’embouts et pipettes, de traitements antibiotiques, et antiviraux, des masques de filtration et chirurgicaux, des tonnes de substances actives en cas de pandémie grippale, des tenues de protections, des équipements de laboratoires et des extracteurs ADN/ARN.
Lors de la crise du H1N1 de 2008-2009, la haute administration a eu le sentiment d’en avoir trop fait et d’avoir surestimé la crise. L’État s’est ainsi convaincu qu’une réduction de la voilure était nécessaire. La Cour des comptes a estimé que des fonds publics ont été gaspillés inutilement.
La vision néolibérale de la société s’est introduite à l’hôpital. Gérer les établissements sanitaires comme des entreprises est devenu l’objectif prioritaire. Comme l’explique le professeur de médecine André GRIMALDI, l’État a abimé l’hôpital public depuis des années, depuis qu’a commencé le règne des économistes de pensée libérale ou néolibérale pour qui les activités humaines doivent être mesurées, valorisées, et mise en concurrence sur un marché. La tarification à l’activité a mis la santé dans une logique de marché. C’est l’entrée du « new public management » dans l’hôpital. Les autorités sanitaires ont ainsi fermé des établissements, réduit le nombre de lits et géré les stocks en flux tendus. La logique comptable s’est imposée au détriment de l’objectif prioritaire de ces institutions chargée d’assurer la santé publique sur l’ensemble du territoire et sur le long terme.
L’obsession de la réduction des déficits budgétaires et la certitude que le monde était à l’abri de tout danger épidémique majeur entrainant un changement doctrinal et institutionnel, explique les cruels manques de produits et de matériel auxquels nous avons dû faire face en 2020.
Le rapport annuel 2021
Dans son rapport annuel 2021, la Cour des comptes à propos de la crise du Covid 19 semble changer ses critères d’évaluation. Elle dénonce l’impréparation de l’État face à la crise sanitaire. Le rapport est concentré sur les effets concrets et la gestion opérationnelle de la crise notamment la tension dans les hôpitaux au niveau de la réanimation et des soins critiques. Il constate que depuis plusieurs années « l’offre de soins critiques a décroché par rapport aux besoins d’une population française qui vieillit ».
Le nombre de lits en réanimation a progressé dix fois moins vite que le nombre de personnes âgées. Les recommandations de l’institution sont centrées autour du renforcement des personnels de ces services si particuliers, dans la droite ligne des demandes de nombreux médecins et infirmiers de réanimation depuis des mois.
De manière inattendue, la Cour des comptes, garante de l’orthodoxie budgétaire, remet en cause le mode de financement des services de soins critiques. Le rapport note que le système de « tarification à l’activité » fortement décrié chez les médecins comme le cœur de « l’hôpital-entreprise », fait de la réanimation une « activité structurellement déficitaire ». Il relève les limites de la « planification hospitalière » qui a abouti à la concentration des unités de soins critiques, certes souhaitable, mais qui devrait aussi rechercher « l’adaptation du nombre de lits aux besoins croissants d’une population qui vieillit, et corriger les inégalités territoriales ».
Conclusion
Après le « quoi qu’il en coûte » du Président de la République qui mettait de côté, au moins temporairement, l’orthodoxie budgétaire voilà la Cour des comptes qui estime que la concentration de l’offre ne peut être le seul acte de la politique sanitaire. Tout n’est pas perdu, peut-être que nos dirigeants réalisent que la recherche du bien-être humain prime sur la logique économique et comptable ! Ne soyons pas trop optimistes, une hirondelle ne fait pas le printemps. Attendons de voir !
20 mars 2021
La cour des comptes (excuse moi, mais je n’arrive pas à mettre de majuscules sur ces mots) découvre que le système de santé a été désorganisé… C’est l’histoire du pompier pyromane en version santé à l’échelle planétaire. Si ces énarques étaient rémunérés à ne rien faire, ils seraient moins dangereux. Nous devons payer aujourd’hui au prix fort leurs élucubrations fumeuses mais rassure toi, ils persévéreront dans leurs analyses en nous disant que tout cela, c’est pour notre bien. Je n’ai plus aucune confiance dans ces personnes .